Bataille des Dardanelles
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Ne doit pas être confondu avec Bataille de Gallipoli (1416).
La bataille des Dardanelles, également appelée bataille de Gallipoli (ou campagne des Dardanelles, ou campagne de Gallipoli), est un affrontement de la Première Guerre mondiale qui oppose l'Empire ottoman aux troupes britanniques et françaises dans la péninsule de Gallipoli dans l'actuelle Turquie du 18 mars 1915 au 9 janvier 1916.
Date |
- (9 mois et 22 jours) |
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Lieu | Péninsule de Gallipoli, vilayet d'Andrinople, Empire ottoman |
Issue | Victoire ottomane |
Empire britannique France | Empire ottoman
Soutenu par |
6 divisions (début) 16 divisions (fin) Total 489 000 Britanniques[3] 79 000 Français[3] (effectif maximum de 42 000 fin mai 1915) |
5 divisions (début) 15 divisions (fin) Total 315 500 Ottomans[3] |
252 000[4] | 218 000 - 251 000[4] |
Batailles
- Opérations navales
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- Krithia
- Baie ANZAC
- Baie de Suvla
Front du Moyen-Orient
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- Megiddo (9-1918)
- Damas (9-1918)
- Alep (10-1918)
Coordonnées | 40° 14′ 15″ nord, 26° 16′ 39″ est |
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La péninsule de Gallipoli forme la partie nord du détroit des Dardanelles reliant la mer Égée à la mer de Marmara. Durant la Première Guerre mondiale, cette région est contrôlée par l'Empire ottoman alors en guerre contre les puissances alliées dont le Royaume-Uni, la France et la Russie. Pour pouvoir ravitailler cette dernière, le contrôle des « Détroits » est indispensable mais une tentative alliée pour traverser les Dardanelles échoue le 18 mars 1915 en raison des mines qui y ont été posées. Pour que les dragueurs de mines puissent opérer en sécurité, il est nécessaire de réduire au silence les batteries ottomanes sur les hauteurs du détroit. Un débarquement est donc organisé le 25 avril au cap Helles et dans la baie ANZAC à l'extrémité sud de la péninsule.
Le terrain difficile, l'impréparation alliée et la forte résistance ottomane provoquent rapidement l'enlisement du front et les tentatives des deux camps pour débloquer la situation se soldent par de sanglants revers. Le 6 août, les Alliés débarquent dans la baie de Suvla (en) au nord mais ils ne parviennent pas non plus à atteindre les hauteurs dominant le détroit au milieu de la péninsule et ce secteur se couvre également de tranchées. L'impasse de la situation et l'entrée en guerre de la Bulgarie aux côtés des Empires centraux poussent les Alliés à évacuer leurs positions en et en et les unités sont redéployées en Égypte ou sur le front de Salonique en Grèce.
La bataille est un sérieux revers pour les Alliés et l'un des rares succès ottomans durant le conflit. En Turquie, l'affrontement est resté célèbre car il marque le début de l'ascension de Mustafa Kemal qui devient par la suite un des principaux acteurs de la guerre d'indépendance et le premier président du pays. La campagne est également un élément fondateur de l'identité nationale turque. Commémorée sous le nom de journée de l'ANZAC, la date du débarquement du est la plus importante célébration militaire en Australie et en Nouvelle-Zélande, où elle surpasse le jour du Souvenir du 11 novembre.
Entrée en guerre de l'Empire ottoman
Au début du XXe siècle, l'Empire ottoman est surnommé l'« homme malade de l'Europe »[5] en raison de son instabilité politique, des revers militaires et des tensions sociales liées à un siècle de déclin. En 1908, un groupe d'officiers appelés les Jeunes-Turcs prend le pouvoir lors d'un coup d'État ; le sultan Abdülhamid II est renversé et son frère Mehmed V lui succède même s'il n'a plus aucun pouvoir[6],[7]. Le nouveau régime lance de nombreuses réformes afin de moderniser l'économie et l'administration de l'Empire. L'Allemagne est déjà un soutien de l'Empire et elle finance plusieurs projets de modernisation comme le chemin de fer Berlin-Bagdad. Son influence s'accroit aux dépens de la présence britannique traditionnelle et des officiers allemands participent à la réorganisation de l'armée[8]. Malgré ces investissements, les ressources de l'Empire sont épuisées par les guerres balkaniques en 1912 et 1913. La faction pro-allemande menée par Enver Pacha, l'ancien attaché militaire ottoman à Berlin, s'oppose à l'influence britannique au sein du gouvernement et renforce les liens de l'Empire avec l'Allemagne[6],[9],[10]. Ce rapprochement se traduit en par l'arrivée à Constantinople d'une mission militaire allemande menée par le général Otto Liman von Sanders. Dans le même temps, la position géographique de l'Empire signifie que sa neutralité revêt une importance considérable pour la Russie et ses alliés français et britanniques dans le cas d'une guerre en Europe[6].
Durant la crise de juillet, en 1914, les diplomates allemands proposent aux Ottomans de former une alliance contre la Russie en échange de gains territoriaux dans le Caucase et dans le nord-ouest de la Perse. La faction pro-britannique est alors isolée du fait de l'absence de l'ambassadeur britannique[11]. Le , deux jours après le début de la Première Guerre mondiale, les dirigeants ottomans approuvent une alliance secrète avec l'Allemagne contre la Russie[12] mais l'accord ne les contraint pas à entreprendre des actions militaires[13],[6]. Le 2 août, le gouvernement britannique réquisitionne deux cuirassés, le Sultan Osman I et le Reşadiye, construits par les chantiers navals britanniques pour le compte de l'Empire ottoman ; cela affaiblit les partisans du Royaume-Uni à Constantinople malgré les propositions d'indemnisation si l'Empire reste neutre[14]. À la suite de cet incident diplomatique, le gouvernement allemand offre deux croiseurs en remplacement, le SMS Goeben et le SMS Breslau, pour accroître son influence. Les Alliés tentent d'intercepter les navires mais ces derniers s'échappent quand le gouvernement ottoman les autorise à traverser les Dardanelles jusqu'à Constantinople. L'Empire est cependant neutre et la convention de Londres signée en 1841 interdit tout passage de navires de guerre dans les Dardanelles[15] ; en autorisant l'entrée des navires allemands, ces derniers confirment leurs liens avec l'Allemagne[6].
En septembre, la mission navale britannique à Constantinople créée en 1912 par l'amiral Arthur Limpus (en) est rappelée du fait de l'entrée en guerre, apparemment imminente, de l'Empire ottoman ; le commandement de la marine ottomane est transmis au contre-amiral Wilhelm Souchon de la marine allemande[16],[17]. Sans en référer au gouvernement ottoman, le commandant allemand des fortifications des Dardanelles ordonne la fermeture du détroit le 27 septembre[17]. La présence navale allemande et les succès militaires de l'Allemagne sur les différents fronts du conflit pousse le gouvernement ottoman à déclarer la guerre à la Russie[18]. Le 27 octobre, les deux croiseurs de la marine ottomane Yavuz Sultan Selim et Midilli (antérieurement le Breslau et le Goeben) entrent en mer Noire, bombardent le port russe d'Odessa et coulent plusieurs navires[19]. Les Ottomans refusent d'expulser les missions allemandes comme le demandent les Alliés et ils entrent officiellement en guerre aux côtés des Empires centraux le 31 octobre[20],[19] ; la Russie déclare la guerre à l'Empire le 2 novembre. Le lendemain, l'ambassadeur britannique quitte Constantinople et une escadre britannique bombarde les forts de Kumkale et de Seddulbahir à l'entrée méditerranéenne du détroit[21]. Le Royaume-Uni et la France déclarent à leur tour la guerre à l'Empire le 5 novembre et les Ottomans passent à l'offensive dans le Caucase à la fin du mois[22]. Les combats éclatent également en Mésopotamie lorsque les Britanniques débarquent dans le golfe Persique pour prendre le contrôle des installations pétrolières de la région[23]. Les Ottomans planifient une offensive contre l'Égypte britannique au début de l'année 1915 pour occuper le canal de Suez et couper les liens entre le Royaume-Uni et ses colonies indiennes[24]. L'historien Hew Strachan estime que rétrospectivement l'entrée en guerre ottomane ne fait aucun doute après l'arrivée du Goeben et du Breslau et que les retards sont plus liés à l'impréparation ottomane qu'à des hésitations sur la politique à tenir[25].
Stratégie alliée
Après les succès allemands au début du conflit, le front de l'Ouest s'est enlisé à la suite des contre-attaques alliées sur la Marne et à Ypres. L'impossibilité de la guerre de mouvement pousse les deux camps à créer des tranchées qui s'étendent rapidement de la mer du Nord jusqu'à la frontière suisse[26]. La situation est similaire à l'est et le front s'est figé sur une ligne allant de la mer Baltique à la mer Noire. Pour les Alliés, la neutralité de l'Empire ottoman et l'ouverture des Dardanelles revêtent une importance capitale car le détroit est le seul lien entre la Russie d'un côté et la France et le Royaume-Uni de l'autre. En effet, les routes terrestres sont contrôlées par l'Allemagne et l'Autriche-Hongrie, la mer Blanche au nord et la mer d'Okhotsk en Extrême-Orient sont bloquées par les glaces l'hiver et éloignées des théâtres d'opérations tandis que l'accès à la mer Baltique est bloqué par la marine allemande[27]. Tant que l'Empire reste neutre, la Russie peut être ravitaillée par la mer Noire mais le détroit est fermé et miné par les Ottomans en novembre[6],[28].
En novembre, le Royaume-Uni propose de payer l'Empire ottoman pour qu'il reste neutre cependant le ministre français de la Justice, Aristide Briand suggère de lancer une attaque préventive ; les deux propositions sont rejetées[29]. Plus tard dans le mois, le premier lord de l'Amirauté, Winston Churchill présente un projet d'attaque navale contre les Dardanelles fondé sur des rapports erronés sur les défenses ottomanes. Churchill veut redéployer en Méditerranée les cuirassés obsolètes ne pouvant opérer contre la Hochseeflotte allemande afin d'organiser une opération navale suivie d'un débarquement limité. L'opération a également pour objectif de pousser la Bulgarie et la Grèce, deux anciennes possessions ottomanes, à rejoindre le camp des Alliés[30]. Le , le grand-duc Nicolas de Russie demande l'aide britannique alors que les Ottomans lancent une grande offensive dans le Caucase. Les préparations de l'opération navale commencent immédiatement pour soulager les Russes en obligeant les Ottomans à redéployer leurs forces dans les Dardanelles[31].
- Les Dardanelles et la Thrace (à gauche), le Bosphore.
- et Constantinople, L'Illustration, 8 mai 1915.
Tentative de passage en force
Le , un hydravion britannique du HMS Ark Royal réalise un vol de reconnaissance au-dessus du détroit[32]. Deux jours plus tard, une importante escadre anglo-française menée par le cuirassé HMS Queen Elizabeth commence à pilonner les positions ottomanes sur la côte. Les Britanniques ont prévu d'utiliser les huit appareils du HMS Ark Royal pour orienter les tirs mais les mauvaises conditions climatiques ne permettent l'emploi que d'un seul Short Type 136 (en)[33]. Le 25 février, les premières fortifications à l'entrée des Dardanelles ont été écrasées tandis que le passage a été déminé[34]. Une unité de Royal Marines est alors débarquée pour détruire les canons de Kumkale sur la côte asiatique et à Sedd el Bahr à l'extrémité de la péninsule de Gallipoli tandis que le bombardement naval se tourn vers les batteries entre Kumkale et Kephez[35].
Frustré par la mobilité des batteries ottomanes qui échappent aux bombardements alliés et menacent les dragueurs de mines, Churchill pousse le commandant de la flotte, l'amiral Sackville Carden, à accroître la pression[36]. Ce dernier prépare une nouvelle tactique et envoie le 4 mars un télégramme à Churchill indiquant qu'il pourrait atteindre Constantinople en moins de 14 jours en lançant un assaut avec l'ensemble de ses forces[37]. Cette confiance est renforcée par l'interception de messages allemands révélant que les forts ottomans sont presque à court de munitions[37]. Il est donc décidé d'organiser une attaque générale vers le 17 mars mais Carden, malade, est remplacé par l'amiral John de Robeck[38]. Le , la flotte composée de 18 cuirassés et de nombreux croiseurs et destroyers tente de forcer le passage le plus étroit des Dardanelles large de seulement 1 500 mètres. Malgré la menace des canons ottomans, les dragueurs de mines reçoivent l'ordre de participer à l'assaut. À 14 h, un compte-rendu du quartier-général ottoman rapporte que « toutes les lignes téléphoniques ont été coupées, toutes les communications avec les forts sont interrompues, certains canons ont été touchés… en conséquence, les tirs d'artillerie des défenses ont été sévèrement réduits[39] ».
Les reconnaissances alliées n'ont cependant pas identifié tous les champs de mines ottomans et à 15 h 15, le cuirassé français Bouvet coule en deux minutes avec plus de 600 marins après avoir touché une mine[40]. Les HMS Irresistible et HMS Inflexible heurtent également des mines tandis que le HMS Ocean, envoyé pour secourir le premier connait la même mésaventure et les deux navires coulent ensemble[41]. Les cuirassés français Suffren et Gaulois sont aussi endommagés après avoir traversé une ligne de mines discrètement posée dix jours plus tôt par le mouilleur de mines Nusret[42]. Le feu ottoman, bien que réduit, reste menaçant et les dragueurs de mines, pour la plupart de simples chalutiers manœuvrés par des équipages civils, battent en retraite en laissant intacts les champs de mines.
Ces lourdes pertes contraignent de Robeck à ordonner une retraite pour sauver ce qui reste de la flotte[43]. Certains officiers comme le commodore Roger Keyes du HMS Queen Elizabeth estiment que la victoire est toute proche car les batteries ottomanes n'ont presque plus de munitions mais de Robeck, John Fisher et d'autres commandants estiment à l'inverse que les tentatives navales pour prendre le contrôle des détroits nécessiteraient des pertes inacceptables[43],[38],[44]. Le repli allié renforce le moral des Ottomans[45] et le jour est par la suite célébré en Turquie comme une grande victoire[46]. Comme la capture des Dardanelles par la mer est impossible, les préparatifs pour une opération terrestre commencent afin de prendre le contrôle des côtes, de neutraliser les batteries ottomanes et permettre aux dragueurs de mines de nettoyer le détroit en sécurité[47].
Préparatifs alliés
Le secrétaire d'État à la Guerre britannique, Horatio Herbert Kitchener, place le général Ian Hamilton à la tête de la force expéditionnaire méditerranéenne (en) de 78 000 hommes chargée de mener cette opération[38]. À ce moment, des troupes australiennes et néo-zélandaises sont stationnées en Égypte où elles s'entraînent en prévision de leur déploiement en France[48]. Ces forces sont regroupées au sein du corps d'armée australien et néo-zélandais (ANZAC) composée des unités de volontaires de la 1re division australienne et de la division d'Australie et de Nouvelle-Zélande. Cette unité commandée par le lieutenant-général William Birdwood est déployée aux côtés de la 29e division britannique, de la Royal Naval Division (en)[32] et de l'armée française d'Orient composée de troupes coloniales et métropolitaines[49],[50],[51]. Les unités britanniques et françaises rejoignent les troupes de l'ANZAC en Égypte avant d'être redéployées au cours du mois d'avril sur l'île grecque de Lemnos plus proche des Dardanelles. Ce regroupement des troupes alliées repousse l'organisation des débarquements à la fin du mois d'avril et ce délai permet aux Ottomans de renforcer leurs positions[52].
Les stratèges alliés n'envisagent pas que les débarquements puissent se faire sous le feu des Ottomans et aucun entraînement en ce sens n'est entrepris. La combativité des défenseurs est également sous-estimée par les Alliés[53] et cette nonchalance initiale est illustrée par un dépliant distribué aux troupes australiennes et britanniques en Égypte qui indique : « De manière générale, les soldats turcs manifestent leur volonté de se rendre en tenant leur fusil à l'envers et en agitant des vêtements ou des haillons de toutes les couleurs. Un véritable drapeau blanc doit être considéré avec la plus profonde suspicion car il est improbable que les soldats turcs possèdent quoi que ce soit de cette couleur[54] ». L'historien Edward J. Erickson estime que cette indolence est liée à un « sentiment de supériorité » résultant du déclin de l'Empire ottoman et des mauvaises performances de ses forces lors des guerres balkaniques. En conséquence, les troupes alliées sont mal préparées pour cette campagne[55] et dans certains cas, leurs informations sur les Dardanelles sont issues de guides touristiques achetés en Égypte[56].
Préparatifs ottomans
De leur côté, les Ottomans déploient la 5e armée (en) dans la zone pour repousser un débarquement sur les deux rives des Dardanelles[57]. Cette force, initialement composée de cinq divisions, est une unité de conscrits commandée par le général allemand Otto Liman von Sanders[58], assisté de nombreux officiers allemands[1]. Les commandants allemands et ottomans débattent de la meilleure tactique défensive et tous s'accordent sur le fait qu'il est nécessaire de garder le contrôle des hauteurs surplombant le détroit. L'emplacement des futurs débarquements alliés et donc la disposition des défenses ottomanes font néanmoins débat. Mustafa Kemal, alors lieutenant-colonel de 34 ans, fin connaisseur de la péninsule de Gallipoli où il a combattu les Bulgares durant les guerres balkaniques[59], considère que le cap Helles formant l'extrémité sud de la péninsule et Gaba Tepe sur la côte ouest de la péninsule sont les emplacements les plus probables pour un débarquement[60]. Dans le cas du premier, les navires alliés peuvent en effet offrir un soutien d'artillerie sur trois côtés tandis que l'étroitesse de la péninsule au niveau de Gaba Tepe permettrait facilement aux Alliés d'isoler les forces ottomanes au sud et de disposer d'une bonne position pour de futures opérations[61]
Liman von Sanders, considérant la baie de Besika sur la côte asiatique au sud du détroit comme le terrain le plus favorable à un débarquement et le plus propice aux attaques contre les principales batteries ottomanes protégeant le détroit, déploie deux divisions dans la baie[62]. Deux autres sont regroupées à Bolayır (en) au nord de la péninsule pour protéger les lignes de communication et de ravitaillement[63]. La 19e division de Mustafa Kemal et la 9e division sont disposées le long de la côte égéenne et au cap Helles tandis que le gros des défenseurs commandé par Liman von Sanders resterait à l'intérieur des terres[64]. Après l'arrivée de la 3e division et d'une brigade de cavalerie au début du mois d'avril, les forces ottomanes dans les Dardanelles comptent environ 60 000 hommes. Von Sanders met l'accent sur l'amélioration des réseaux terrestres et maritimes pour pouvoir déplacer rapidement ses forces sur les fronts en difficulté mais cette stratégie est critiquée par les commandants ottomans qui estiment que leurs unités sont trop dispersées et ne pourront pas contenir les Alliés avant l'arrivée des renforts[65]. Le commandant allemand, néanmoins convaincu de l'inefficacité d'une défense rigide, érige la mobilité de ses forces en clé du succès. Ainsi, la 19e division de Kemal, disposée près de Boghali, doit pouvoir se porter au secours de Bolayır, de Gaba Tepe, du cap Helles ou de la côte asiatique[66].
La durée des préparatifs britanniques permet aux défenseurs ottomans de renforcer leurs défenses[32]. Von Sanders note par la suite : « Les Britanniques nous ont offert quatre bonnes semaines de répit pour tous nos travaux avant le grand débarquement… Ce répit suffit à peine pour mettre en place les mesures les plus indispensables[67] ». Des routes sont construites, les plages sont piégées avec des mines improvisées tandis que des tranchées sont creusées sur les hauteurs. Des petites embarcations sont rassemblées pour permettre le transfert rapide d'hommes et d'équipements des deux côtés du détroit et les troupes réalisaient de nombreuses patrouilles pour éviter toute léthargie[67]. Les Ottomans créent une petite force aérienne avec l'aide allemande ; quatre appareils opèrent des missions de reconnaissance autour de Çanakkale en février[68] et un aérodrome est construit près de Gallipoli au début du mois d'avril[32].