Guerre des Malouines
guerre entre l'Argentine et le Royaume-Uni en 1982 au sujet des îles Malouines / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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La guerre des Malouines ou guerre de l'Atlantique Sud (Falklands War en anglais, Guerra de las Malvinas en espagnol) est un conflit opposant l'Argentine au Royaume-Uni dans les îles Malouines et dans la Géorgie du Sud-et-les îles Sandwich du Sud.
Date |
– (2 mois et 12 jours) |
---|---|
Lieu | Îles Malouines, Géorgie du Sud-et-les Îles Sandwich du Sud, zone maritime et aérienne environnante |
Casus belli | Invasion des îles Malouines |
Issue |
Victoire britannique
|
Royaume-Uni | Argentine |
Margaret Thatcher Sir Terence Lewin Sir John Fieldhouse (en) Sandy Woodward Jeremy Moore (en) Julian Thompson Tony Wilson |
Leopoldo Galtieri Jorge Anaya Basilio Lami Dozo Juan Lombardo Ernesto Crespo Mario Benjamín Menéndez |
20 000 hommes au sol[1] | 10 000 hommes au sol[1] |
258 morts[2] 777 blessés 106 prisonniers 10 avions Harrier 24 hélicoptères 2 destroyers 2 frégates 1 barge de débarquement de chars 1 CDIC 1 porte-conteneurs |
649 morts[3] 1 068 blessés 11 313 prisonniers 35 avions de chasse 2 bombardiers 4 avions de transports militaires 25 avions légers d'attaque au sol 9 avions d'entraînements armés 25 hélicoptères 1 croiseur léger 1 sous-marin (es) 2 navires garde-côtes 4 navires cargos 1 navire espion |
Civils : 3 morts
Batailles
- Invasion argentine
- Géorgie du Sud
- Occupation (en)
- Paraquet
- Black Buck
- ARA General Belgrano
- ARA Alferez Sobral
- HMS Sheffield
- Île Pebble
- Mikado
- Sutton
- San Carlos
- HMS Ardent
- Seal Cove
- HMS Antelope
- Atlantic Conveyor
- HMS Coventry
- Goose Green
- Mount Kent
- Top Malo House
- Gazelle XX377
- Bluff Cove
- Many Branch Point
- Mount Harriet
- Two Sisters
- HMS Glamorgan
- Mount Longdon (en)
- Wireless Ridge (en)
- Mount Tumbledown (en)
- Port Stanley
- Île Thulé
Coordonnées | 51° 45′ sud, 59° 00′ ouest |
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Il commence le avec le débarquement de l'armée argentine aux Malouines, suivi le lendemain par l'invasion de la Géorgie du Sud, et se termine le par un cessez-le-feu. Il se conclut sur une victoire du Royaume-Uni qui affirme ainsi sa souveraineté sur ces territoires.
C'est la première guerre conventionnelle entre deux puissances occidentales (d'un niveau militaire assez proche) depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Le conflit est causé par la volonté de la dictature militaire argentine de faire valoir par la force ses positions sur la souveraineté de ces archipels, placés par les Nations unies sur la liste des territoires contestés. Ce conflit s'inscrit dans la continuité des controverses qui commencent dès la découverte de ces îles qui ont été occupées successivement par la France, l'Espagne puis le Royaume-Uni.
Sur le plan humain, le bilan de cette guerre est de 907 tués avec 649 militaires argentins, 255 militaires britanniques et trois insulaires. Politiquement, la déroute argentine a de lourdes conséquences puisqu'elle précipite la chute de la junte militaire qui gouvernait jusqu'alors le pays. Elle est remplacée par un gouvernement démocratiquement élu. De son côté, le gouvernement de Margaret Thatcher sort renforcé de cette victoire et le parti conservateur remporte les élections en 1983.
En 2012, l'Argentine vote la déclaration d'Ushuaïa demandant le respect des résolutions de l'ONU.
Malgré trois décennies passées et les tentatives répétées de pacification du conflit, l’Organisation des Nations unies considère toujours les archipels comme des territoires non-autonomes, dont la souveraineté n'a pu être départagée entre l'Argentine et le Royaume-Uni.
Les îles apparaissent sur des portulans dès 1502. Le , Amerigo Vespucci passe par un archipel qui semble être les Malouines. La première carte complète des îles est réalisée en 1520 par Andrés de San Martín, lors de l'expédition de Magellan[4]. Le , un bateau espagnol dirigé par Alonso de Camargo accoste les Malouines et y reste jusqu'au de la même année[5].
Cinquante ans plus tard, les îles sont abordées, en 1592, par le navigateur anglais John Davis qui voyage sur le Desire (en). John Strong explore ces îles en 1690 et baptise le détroit Falkland Sound. Des Malouins fréquentent l'archipel de 1700 à 1716 puis en 1749, un amiral britannique, George Anson, publie un récit de son voyage dans l'archipel et évoque leur position stratégique. Une expédition est conduite par le capitaine de vaisseau français Louis-Antoine de Bougainville qui débarque à Port Louis en 1764, suivi l'année suivante de celle de l'officier de marine et navigateur britannique John Byron qui débarque à Port Egmont[6].
La souveraineté sur ces îles, qui figurent aujourd'hui sur la liste des territoires non autonomes de l'ONU, est depuis lors disputée. La France est la première à les revendiquer. Mais en 1765, la Cour d'Espagne, informée de la colonisation de ces îles situées dans sa zone d'influence, fait valoir ses droits auprès de la Cour de France. En 1766, le ministre des Affaires étrangères français Étienne-François de Choiseul confie une mission diplomatique à Bougainville pour se rendre en Espagne et essayer de conserver les îles ou, à défaut, de les remettre à l'Espagne à la condition que ces îles soient physiquement occupées, pour que les Britanniques ne puissent pas les reprendre et de ce fait contrôler la route de la mer du Sud. Finalement la France les cède à l'Espagne en 1767 qui les renomme Malvinas. L'année précédente l'Espagne avait créé une vice-royauté du Rio de la Plata en Uruguay dont le territoire englobait le Nord actuel de la future Argentine, les deux tiers de la future Bolivie, le Nord du Chili, le Paraguay et l'Uruguay[6].
Les guerres d'indépendance américaine, la Révolution française, les campagnes napoléoniennes, aboutissent à la naissance de nations sud-américaines indépendantes dont l'Argentine indépendante de l'Espagne en 1810. Celle-ci reprend alors à son compte les revendications sur l'archipel. Une révolution éclate en Uruguay avec l'arrivée en mai d'une junte qui décide d'évacuer les îles Malouines qui demeurent inoccupées jusqu'en , avec l'arrivée de la frégate argentine La Heroína (en) commandée par le colonel corsaire David Jewett (en) qui hisse le pavillon argentin sur les ruines de Port Louis[6].
La colonisation argentine commence en 1823 et un gouverneur est nommé trois ans plus tard. En 1833, des colons britanniques débarquent de la frégate Clio (en), expulsent les colons argentins et rétablissent la souveraineté britannique. Depuis 1833, l'Argentine maintient sa revendication territoriale[6].
Le conflit diplomatique est discuté à l'ONU à partir de 1960 après l'adoption par l'Assemblée générale, de la « déclaration sur la garantie d'indépendance des pays et peuples colonisés »[6].
En 1965, l’ONU reconnaît que la situation des Malouines constitue une forme de colonialisme qui doit prendre fin et demande aux deux pays de s’asseoir à la table des négociations. Londres a cependant toujours refusé tout dialogue[7].
Dans la deuxième moitié du XXe siècle, marquée par plusieurs coups d’État successifs en Argentine, une junte militaire s’arroge de plus en plus de pouvoir et finit par prendre officiellement le pouvoir en 1966. Cependant, un accord est conclu en 1971 pour la construction par les Britanniques d'un aéroport et la création d'une ligne aérienne permanente entre les Malouines et l'Argentine, permettant ainsi aux 1 800 insulaires britanniques d'accéder aux écoles et aux hôpitaux argentins. Juan Perón revient au pouvoir en 1972 et le conflit pour la souveraineté sur les îles malouines est à nouveau soumis aux Nations unies par l'Argentine. En , un rapport rédigé par Lord Shackleton confirme les potentialités de développement économique des îles Malouines et de leur environnement naturel (pêche, pétrole, traitement industriel des algues…), après qu'en février 1976 et dans les eaux britanniques, le destroyer argentin Almirante Storni a ouvert le feu sur le navire de recherches RRS Shackleton et tenté sans succès de l'arraisonner. En conséquence de cet incident, la Royal Navy détache temporairement à Port Stanley la frégate HMS Chichester et diffère le désarmement de l'aviso HMS Endurance[6].
En , une nouvelle junte d'officiers généraux des trois armées chasse du pouvoir Isabel Martínez de Perón, veuve de l'ancien président Perón et établit une dictature militaire dont la politique est de plus en plus autoritaire et répressive, avec à son actif plus de 30 000 assassinats. L'Argentine fait face à des problèmes économiques graves et lorsque le général Leopoldo Galtieri parvient au pouvoir en 1981, l'inflation est de 140 % par an. Le gouvernement est très impopulaire et en , pour redorer son blason, le général Galtieri ordonne à son armée d'envahir les îles Malouines et ainsi déclarer la guerre au Royaume-Uni, l'un des cinq membres permanents du Conseil de sécurité des Nations unies, membre de l'OTAN et quatrième puissance nucléaire mondiale[8].
Du côté britannique, le gouvernement conservateur, dirigé par la « Dame de fer » Margaret Thatcher, refuse tout compromis. Le tempérament de la Première ministre n'explique pas tout car le parti souhaite une réélection aux élections législatives qui doivent avoir lieu l'année d'après[9].
Les relations entre la junte militaire argentine et le gouvernement de Margaret Thatcher sont pourtant amicales dans un premier temps. Des membres de la junte sont invités à Londres, dont l'ancien chef de la marine Emilio Massera, responsable de centaines de disparitions, ou le ministre argentin des Finances, José Martínez de Hoz, qui défend des conceptions économiques proches du thatchérisme. Margaret Thatcher met fin à un programme d'aide aux réfugiés latino-américains fuyant les persécutions, qui avait été introduit par le précédent gouvernement travailliste. Les ventes d'armes à l'Argentine ont augmenté avec l'arrivée au pouvoir des conservateurs. Quatre jours seulement avant l'invasion des Malouines par l'Argentine, le gouvernement britannique tentait de vendre des avions bombardiers à la junte[10].
Malgré le soutien du gouvernement américain à la junte, son armée subit un embargo sur les armes de la part des États-Unis depuis 1978. L'URSS profite de cette contradiction pour lui apporter son appui.
La Royal Navy maintient une présence militaire dans la zone sous la forme d'une section d'une quarantaine de Royal Marines connue comme le groupe naval Naval Party 8901 et de l'aviso HMS Endurance. Des négociations essentiellement formelles continuent entre les deux pays[11] mais les mêmes arguments sont ressassés en permanence.
En 1946, avec le changement de statut de l'Empire colonial britannique qui devient le Commonwealth, et les colonies qui deviennent dominions, Londres considère ce différend territorial comme mineur. En 1965, sous l'effet de la résolution 2065 de l'Assemblée générale des Nations unies[12], qui exige l'application de la Déclaration sur l'octroi de l'indépendance aux pays coloniaux (1960), les négociations commencent ; dix-sept ans plus tard, très peu de choses ont changé[11]. En , le comité juridique interaméricain, organe consultatif de l'Organisation des États américains (OEA), déclare l'existence d'un « droit de souveraineté irréfutable » de l'Argentine sur les Malouines[11]. En , la 5e conférence du mouvement des non-alignés déclare l'Argentine « propriétaire légitime du territoire »[11].
Le différend est insolite. En effet, les deux États mettent en avant des droits issus du processus de décolonisation pour défendre leurs prétentions[11]. Ainsi, le Royaume-Uni avance l'origine britannique des 2 000 habitants (seuls une trentaine d'Argentins habitaient ces îles[11]) et invoque l'article 73 de la Charte des Nations unies et le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes, tandis que l'Argentine invoque le droit des peuples à la décolonisation, affirmant qu'il s'agit d'une terre spoliée par les Britanniques depuis 150 ans[11] ; l'ONU se montre plutôt favorable à la position de l'Argentine sans pourtant en arriver à un consensus[11]. La question des Malouines n'a jamais fait l’objet d’un règlement arbitral ni judiciaire.
Causes de la guerre
Les revendications historiques des Argentins sont partagées par l'ensemble de la classe politique y compris par la gauche péroniste. La junte militaire compte ainsi consolider sa légitimité en unissant le pays confronté à la crise. Pour cela, les militaires argentins développent le concept d'une « Argentine bicontinentale », qui comprend une partie du continent Antarctique, dotée de nombreuses ressources en matières premières. La possession des îles Malouines aurait été ainsi la première étape pour établir des « Antilles antarctiques » (îles Malouines, îles de Géorgie du Sud, les Orcades du Sud, les Sandwich du Sud, les Shetland du Sud), trait d'union maritime avec des territoires que l'Argentine aurait souhaité annexer en Antarctique. Pour les militaires au pouvoir, l'« Argentine bicontinentale » n'est pas seulement un rêve, mais une mission patriotique qui doit être accomplie un jour[13].
L’enjeu des îles Malouines n’est pas anodin pour les deux pays, car elles sont une ouverture vers le continent Antarctique encore inexploité. Selon le spécialiste en géopolitique sud-américaine Carlos Alberto Pereyra Mele, ni l’Argentine ni le Royaume-Uni ne peuvent se permettre de perdre les Malouines : « L’Argentine a besoin du pétrole de l’archipel puisque, selon les statistiques de 2009 de son Secrétariat de l’énergie, 86,6 % de l’énergie consommée dans le pays provient du pétrole et du gaz, tandis que les réserves argentines pour ces deux ressources seront épuisées respectivement dans neuf et sept ans. Or, entre 2003 et 2010, l’utilisation du pétrole et de ses dérivés a cru de 37,3 % tandis que celle du gaz a cru de 23 %. Pour combler le déficit, l’Argentine a multiplié par sept ses importations de combustibles qui sont passées d’une valeur annuelle de 549 millions de dollars à 4,5 milliards de dollars américains[non pertinent].
Pour les Britanniques, l’archipel des Malouines, qui inclut les îles Sandwich du Sud et Géorgie du Sud, forme un vaste territoire maritime de 350 milles nautiques qui recèle de grandes richesses. Si on tient compte de l’Antarctique tout proche, la dispute entre le Royaume-Uni et l’Argentine concerne plus de trois millions de kilomètres carrés de plate-forme continentale »[14]. Les îles et les eaux territoriales s’y rattachant permettraient aux deux nations de s’approprier les matières premières disponibles dans le continent Antarctique. Ce conflit pour l'instant non-armé est donc encore pertinent et d’actualité au XXIe siècle[15]. Pour ce qui est du Royaume-Uni, la réplique militaire du gouvernement était certaine. Margaret Thatcher ne pouvait se permettre de perdre la face si proche d’une élection. L'inaction aurait ôté toute crédibilité à la Première ministre.
Préludes
Nombre d'éléments et de signes ambigus se développent dans les années précédant le conflit.
D'un coté la junte argentine affirme ses revendications sur les Malouines et espère ainsi détourner l'attention de l'opinion publique internationale et nationale sur trois points : l'issue défavorable à l'Argentine que l'arbitrage du pape a porté sur l'affaire des îles du Canal de Beagle, la période de répression féroce et les atteintes considérables aux droits de l'Homme qui ont suivi l'arrivée au pouvoir des militaires à Buenos Aires et la crise économique que le pays connaît en raison de la politique délibérément monétariste du gouvernement.
Elle pense pouvoir interpréter l'indifférence affichée par le Secrétaire d’État américain Alexander Haig comme une approbation implicite, de la part des États-Unis, d'une éventuelle invasion, car les États-Unis ont besoin de l'Argentine sur le continent sud-américain dans le cadre de leur lutte contre le communisme.
De l'autre coté, le gouvernement britannique montre des signes discrets mais visibles de désengagement et de désintérêt pour les îles. Des tiraillements certains entre les différents ministères et administrations se font jour. La dernière unité de la Royal Navy présente sur place, le navire HMS Endurance est prévue pour être retirée en 1981 dans le cadre d'une réduction globale et drastique de la flotte. La loi sur la nationalité britannique de 1981 retire la nationalité complète aux résidents des Îles Malouines.
Une menace subtile d'invasion se fait jour à l'ONU mais les Britanniques n'y font pas attention et continuent à négocier[16].
Ces éléments conduisent les observateurs extérieurs à des erreurs d'appréciation. Margaret Thatcher en est prévenue[17].
Le plan d'invasion est conçu par l'amiral Jorge Anaya, amiral notoirement anti-britannique de la marine argentine. Après l'échec des négociations en , les plans sont finalisés et l'invasion est prévue pour le mois de mai puis d'avril. Les conditions météorologiques sont déterminantes dans la décision, suffisamment tôt pour pouvoir bénéficier lors de l'invasion, des conditions de l'arrière saison australe tout en évitant une riposte pendant l'hiver austral, défavorable aux opérations militaires. Le , le navire de patrouille pour l'Antarctique de la Royal Navy HMS Endurance reçoit l'ordre d'expulser des ferrailleurs civils argentins venus démonter une installation de chasse à la baleine sur l'île de Géorgie du Sud, et accusés par Londres d'être des militaires argentins[11]. Il en est toutefois empêché par trois vaisseaux de guerre argentins et n'insiste pas. Buenos Aires qualifie par la suite cet acte d'agression[11]. Le , malgré la preuve supplémentaire[réf. nécessaire] que la marine argentine embarque des troupes depuis la Base navale de Puerto Belgrano, le comité interarmées de renseignement du Royaume-Uni pour l'Amérique latine déclare que l'« invasion n'était pas imminente. »[réf. nécessaire]
Rupture des relations diplomatiques directes entre l'Argentine et le Royaume-Uni
Lorsque les relations diplomatiques bilatérales sont rompues, les diplomates péruviens à Londres représentent les intérêts diplomatiques argentins auprès du gouvernement britannique. Les diplomates suisses représentaient la couronne britannique auprès des autorités argentines.