Louis XV
roi de France et de Navarre de 1715 à 1774 / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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Louis XV, dit « le Bien-Aimé », né le à Versailles et mort le dans la même ville, est un roi de France et de Navarre. Membre de la maison de Bourbon, il règne sur le royaume de France du à sa mort. Il est le seul roi de France à naître et mourir au château de Versailles.
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S'il est surnommé le « Bien-Aimé » en début de règne, l'appréciation du peuple évolue par la suite. À la fin de son règne, il reste aimé dans la plupart des régions de France mais est très impopulaire à Paris, à tel point que sa mort donnera lieu à des fêtes joyeuses dans la capitale.
Orphelin à l'âge de deux ans, duc d'Anjou puis dauphin de France du au , il succède à son arrière-grand-père Louis XIV à l'âge de cinq ans. La régence est exercée par le duc d'Orléans qui doit faire casser le testament de son oncle Louis XIV pour s'imposer, en contrepartie de l'octroi du droit de remontrance au Parlement. Ce droit affaiblit le règne de Louis XV.
Sacré en , ce dernier maintient le duc d'Orléans comme premier ministre jusqu'à sa mort, l'année suivante. Le duc de Bourbon lui succède de à , puis c'est son ancien précepteur, le cardinal de Fleury de à , sous le gouvernement duquel la France prospère et s’agrandit des duchés de Lorraine et de Bar. Sur le plan administratif, la gestion des finances est renforcée. Toutefois, la volonté de faire de la bulle Unigenitus une loi d’État conduit à la confrontation avec les parlements très imprégnés de jansénisme.
À la mort du ministre Fleury, en , Louis XV gouverne seul. Unique survivant de la famille royale à proprement parler (il est le seul arrière-petit-fils de Louis XIV vivant en France), marié à la fille d'un roi de Pologne détrôné, Louis XV est isolé à la tête de l'État, intelligent mais très secret. L'absolutisme de droit divin fait face, d'une part, à l'opposition des parlements qui affirment, à la suite de Le Paige, que leur corps a une ancienneté et, partant, une autorité égale, voire supérieure à celle du roi : en , leur force se manifeste lorsqu'ils obtiennent l'expulsion des jésuites de France, alors qu'un parti dévot et aristocratique souhaite contrôler davantage la monarchie.
Pour diriger l'État, Louis XV s’appuie sur quelques secrétaires d’État et ministres, quelques Conseils ainsi qu’un nombre restreint de hauts fonctionnaires, dont le plus important est Choiseul. Cette machinerie administrative est renforcée par la création des premières grandes écoles masculines d'Etat (École royale de la Marine du Havre, École nationale des ponts et chaussées, École royale du génie de Mézières). Elle relègue la noblesse traditionnelle et les corps locaux, ce qui coupe la monarchie de ses relais traditionnels, dans une France que transforme aussi l'administration économique, sous l'influence de la physiocratie naissante. L'aristocratie et une partie du clergé sont donc nostalgiques d'une monarchie d'équilibre, tempérée par des corps intermédiaires et une morale chrétienne (conforme aux écrits de Fénelon qui ont une grande influence y compris sur le roi lors des traités de paix). Dans la société urbaine, la philosophie des Lumières conteste également son absolutisme tout en s'opposant à l'emprise de l'Église.
Progressivement, l'image du souverain se désacralise et sa gestion de l'État est contestée.
Sur un plan religieux et moral, n'étant pas philosophiquement un libertin, le roi se sent coupable de ses infidélités conjugales. Sous la pression du clan des dévots, manifeste lors de l'épisode de Metz, il finit par ne plus communier, ni pratiquer les rituels thaumaturgiques des rois de France, ce qui entraîne la désacralisation de la fonction royale et une rupture avec son fils, le dauphin.
De plus, sur le plan diplomatique, le royaume voit sa situation, excellente en début de règne, s'affaiblir, ce qui entraîne un coût militaire et fiscal important. D'abord attaché à la paix appuyée sur un pacte de famille (une Europe des Bourbon) le roi doit faire face à la montée de la Prusse de Frédéric II et à celle de la Russie qui s’affirment comme des puissances européennes, face à une Autriche qui doit lutter pour conserver sa place. Enfin, la Grande-Bretagne où le roi abandonne l'idée de restaurer les Stuart catholiques devient une puissance maritime et coloniale rivale à la France ce qui pousse son chancelier Choiseul à préparer une guerre à laquelle il répugne.
Cela vaut au royaume d'être impliqué dans deux conflits majeurs : la guerre de Succession d'Autriche qui est militairement bien conduite mais ne débouche sur aucun gain diplomatique et la coûteuse guerre de Sept Ans. Les engagements ont lieu dans les Pays Bas, en Allemagne ou sur mer. Sur les océans, l’Angleterre déploie une flotte alors sans égale qui soutient sa politique vigoureuse d’expansion outre-mer. La France connaît quelques succès militaires sur le continent européen et parvient à s'étendre en Corse. En revanche, elle perd le contrôle d'une grande partie de son empire colonial (Nouvelle-France en Amérique, Indes).
Le roi doit alors faire face aux remontrances fiscales des parlements, qu'il finit par briser en en les faisant réformer par son chancelier Maupeou. Cette opposition et celle d’une partie de la noblesse de la cour, sa relation avec Madame de Pompadour, puis l'hostilité du nouveau dauphin envers sa dernière maîtresse Madame du Barry, sa difficulté à se faire valoir à une époque où l’opinion publique (essentiellement alors parisienne) commence à compter, ses hésitations entre fermeté et laisser-faire, qui donnent lieu à des changements de stratégie brusques finissent par le rendre très impopulaire. Sa mort — de la variole — provoque des festivités dans Paris, comme il y en avait eu à la mort de Louis XIV.
Sous une apparente stabilité, son règne est celui d'une mutation silencieuse. Les arts sont florissants, notamment la peinture, la sculpture, la musique et les arts décoratifs. L'architecture française atteint un de ses sommets, tandis que les arts décoratifs (meubles, sculptures, céramiques, tapisserie, etc.) appréciés, tant en France que dans les Cours européennes, connaissent une forte expansion. Mais, c'est surtout en philosophie et en politique que les mutations des Lumières s'affirment et entraînent de profonds changements à partir de .
Naissance et baptême
Louis de France (futur Louis XV) naît le au château de Versailles. Il est d'ailleurs le seul roi de France à naître et mourir dans ce château[1]. Arrière-petit-fils de Louis XIV, il est le troisième fils de Louis de France, duc de Bourgogne, surnommé le Petit Dauphin par opposition à son père Louis de France (1661-1711) dit le Grand Dauphin, et de Marie-Adélaïde de Savoie et, à ce titre, le quatrième prince en ligne successorale. De ses deux frères aînés, également prénommés Louis, le premier, titré duc de Bretagne, est mort en à l'âge d'un an, le second Louis de France (1707-1712), reprenant le titre de duc de Bretagne, est né en et mort en [2].
Immédiatement après sa naissance, le futur Louis XV est ondoyé dans la chambre de la duchesse de Bourgogne par le cardinal Toussaint de Forbin-Janson, évêque de Beauvais, grand aumônier de France, en présence de Claude Huchon, curé de l'église Notre-Dame de Versailles[3]. Le petit prince est immédiatement confié à la duchesse de Ventadour qui devient sa gouvernante, secondée par Madame de La Lande, sous-gouvernante et élevé dans l'aile des princes.
Héritier du trône de France
Ce n'est pas lui qui aurait dû succéder à son arrière-grand-père, Louis XIV, mais le Grand Dauphin, puis son père le duc de Bourgogne, bientôt surnommé le Petit Dauphin, petit-fils de Louis XIV, et enfin son frère aîné, le duc de Bretagne. Mais, de à , la mort frappe à plusieurs reprises la famille royale et met brusquement le jeune prince de 2 ans en première place dans la succession de Louis XIV : le Grand Dauphin meurt de la variole le . Le duc de Bourgogne devient dauphin. L'année suivante, une « rougeole maligne » emporte son épouse le , puis le Petit Dauphin le suivant[4]. À la mort de son frère, le duc de Bretagne, il devient l'héritier du trône de France avec le titre de dauphin de Viennois. Malade, on craint longtemps pour la santé du jeune prince, mais, progressivement, il se remet, soigné par sa gouvernante et protégé par elle des abus de saignées qui ont vraisemblablement causé la mort de son frère[5].
Le futur Louis XV est baptisé en urgence le en l'appartement des enfants de France au château de Versailles par Henri-Charles du Cambout, duc de Coislin, évêque de Metz, premier aumônier du roi, en présence de Claude Huchon, curé de l'église Notre-Dame de Versailles[6] : son parrain est Louis Marie de Prie, marquis de Planes, et sa marraine est Marie Isabelle Gabrielle Angélique de La Mothe-Houdancourt[7].
Éducation et formation
En , Louis est confié à un précepteur, l'abbé Perot. Sous le contrôle de sa gouvernante qui l'élève pendant sept ans, il lui apprend à lire et à écrire, lui enseigne des rudiments d'histoire et de géographie et lui donne l'enseignement religieux nécessaire au futur roi très chrétien[8]. En , le jeune dauphin reçoit également un maître à écrire[9]. Il est également initié à la danse à partir de l'âge de huit ans par Claude Ballon et montre des dispositions pour cet art. Il participe en à un spectacle, Les Folies de Cardenio, dans lequel il intervient en compagnie de soixante-huit danseurs, professionnels et courtisans, puis en dans l'opéra-ballet Les Éléments.
Au jour anniversaire de ses sept ans, le , ayant atteint l'âge de raison, il « passe aux hommes »[10]. Louis XV est désormais confié à un gouverneur, le maréchal duc François de Villeroy (un ami d'enfance de Louis XIV et fils de Nicolas V de Villeroy, gouverneur de Louis XIV) qui lui impose tous les rituels de la cour de Versailles mis en place par Louis XIV[11]. Son précepteur, André Hercule de Fleury, évêque de Fréjus lui apprend désormais le latin, les mathématiques, l'histoire et la géographie, la cartographie, le dessin[12] et l'astronomie, matières qui le passionnent[13] et son grand veneur lui apprend la chasse. En , il dispose d'une imprimerie et apprend la typographie, et en , il s'initie au tournage du bois et de l'ivoire. À partir de , il a des maîtres de musique. Il a peu d'affinités pour cette discipline, mais il est attiré par l'architecture[14]. Son éducation balance entre les choix de Villeroy et l'ouverture voulue par Philippe d'Orléans, le Régent[15].
Activité de représentation du roi durant sa minorité
Le futur Louis XV commence sa vie publique peu de temps avant la mort de son bisaïeul Louis XIV. Quand, le , Louis XIV reçoit en grande pompe dans la galerie des Glaces de Versailles l'ambassadeur de Perse[16], il associe son successeur d'à peine cinq ans à la cérémonie, le plaçant à sa droite. En , l'enfant participe avec le vieux roi à la cérémonie de la Cène du Jeudi saint et à celle du lavement des pieds. Il est toujours accompagné de sa gouvernante, Madame de Ventadour. Dans les derniers temps de la vie de Louis XIV, le futur roi participe à plusieurs défilés militaires et cérémonies afin d'acquérir l'habitude de la vie publique[17].
Le , sentant la mort venir, Louis XIV fait entrer le jeune Louis dans sa chambre, l'embrasse et lui parle avec gravité de sa future tâche de roi, dans des mots passés à la postérité, il lui livre une sorte de testament politique :
« Mignon, vous allez être un grand roi, mais tout votre bonheur dépendra d'être soumis à Dieu et du soin que vous aurez de soulager vos peuples. Il faut pour cela que vous évitiez autant que vous le pourrez de faire la guerre : c'est la ruine des peuples. Ne suivez pas le mauvais exemple que je vous ai donné sur cela ; j'ai souvent entrepris la guerre trop légèrement et l'ai soutenue par vanité. Ne m'imitez pas, mais soyez un prince pacifique, et que votre principale application soit de soulager vos sujets [18] »