Airbus A380
plus gros avion civil du monde, produit par Airbus de 2007 à 2021 / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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L'Airbus A380 est un avion de ligne civil très gros-porteur long-courrier quadriréacteur à double pont, produit par Airbus de 2004 à 2021. Ses éléments sont fabriqués et assemblés dans différents pays européens, principalement en France, en Allemagne, en Espagne et au Royaume-Uni. L'assemblage final est réalisé sur le site de Toulouse, en France.
Airbus A380 (caract. A380-800) | ||
Un Airbus A380-800 de Emirates, le plus gros client de l'appareil. | ||
Rôle | Avion de ligne long-courrier | |
---|---|---|
Constructeur | Airbus | |
Équipage | 2 PNT (Personnel naviguant technique) 18 PNC (Personnel naviguant commercial) | |
Premier vol | ||
Mise en service | (16 ans) | |
Premier client | Singapore Airlines | |
Client principal | Emirates : 123 Singapore Airlines : 24 Lufthansa : 14 Qantas : 12 British Airways : 12 |
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Investissement | 15 - 20 milliards €[1] | |
Coût unitaire | A380-800 : 436,9 M$[2] (2017) | |
Années de production | 2004-2021 | |
Commandes | 251[3] | |
Livraisons | 251[3] | |
Variantes | • A380-800 • A380PLUS |
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Dimensions | ||
Longueur | 72,72 m | |
Envergure | 79,75 m | |
Hauteur | 24,09 m | |
Aire alaire | 845 m2 | |
Masse et capacité d'emport | ||
Max. à vide | 369 t | |
À vide | 276,8 t | |
Max. au décollage | 575 t | |
Max. à l'atterrissage | 394 t | |
Kérosène | 320 m3 | |
Passagers | • 407 - 538 en 3 classes • 615 en 2 classes[4] • 853 (autorisés)[easa 1] |
|
Fret | 38 LD3 ou 13 conteneurs | |
Motorisation | ||
Moteurs | Quatre turbofans Rolls-Royce Trent 900 ou Engine Alliance GP7200 | |
Poussée unitaire | 311 à 340 kN | |
Poussée totale | 1 208 kN | |
Performances | ||
Vitesse de croisière maximale | 950 km/h (Mach 0,89) | |
Vitesse maximale | 1 020 km/h (Mach 0,93) |
|
Autonomie | 15 200 km | |
Altitude de croisière | 10 700 m | |
Plafond | 13 100 m | |
Charge alaire | 660,2 kg/m2 | |
Rapport poussée/poids | 0,22 | |
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L'A380 est, en 2023, le plus gros avion civil de transport de passagers en service et le quatrième plus gros avion de l'histoire de l'aéronautique. Il est doté de quatre turboréacteurs Rolls-Royce Trent 900 ou Engine Alliance GP7200 d'une consommation de 3 L/100 km/passager. Le pont supérieur de l'A380 s'étend sur toute la longueur du fuselage, ce qui donne à la cabine une surface de plancher beaucoup plus importante que celle de son concurrent direct, le Boeing 747-400[5].
L'A380-800 a un rayon d'action de 15 400 kilomètres, ce qui lui permet de voler de New York jusqu'à Hong Kong sans escale, à la vitesse de 910 km/h (Mach 0,85) jusqu'à 1 012 km/h (Mach 0,94)[6].
Le programme A380, d'un coût total de développement de 8 milliards d'euros[7], est lancé au milieu des années 1990. L'A380 est produit à 254 exemplaires volants : 5 appareils d'essai (dont 2 revendus ensuite) et 249 appareils pour les compagnies aériennes (251 en exploitation commerciale). Le dernier appareil est produit en 2021[8]. Son principal client est Emirates, la compagnie de Dubaï.
Le gros porteur souffre d'un paradoxe : malgré ses qualités, et même s'il est particulièrement apprécié par ses passagers[9],[10], l'A380 n'a pas répondu au besoin des compagnies : aucun nouveau client n'achète un exemplaire à partir de 2015, tandis qu'aucune compagnie n'augmente ses commandes en dehors d'Emirates, qui finit par annuler l'achat de 39 appareils en 2019. Face à ce fiasco commercial, Airbus annonce le la fin de la production de l'A380 pour 2021.
Genèse
Stratégies d'Airbus et de Boeing : très gros porteur contre très long-courrier
À la fin des années 1980, Airbus s'établit comme un sérieux concurrent de Boeing sur le segment des petits et moyens porteurs et envisage de s'attaquer au marché des appareils de 600 à 800 places[11]. Au début des années 1990, Airbus se met officiellement à chercher un moyen de concurrencer Boeing et son 747 sur le marché des très gros porteurs.
Il existe déjà des très gros porteurs militaires, comme les Antonov An-124 et An-225, mais pas d'avion de transport civil de cette taille.
Les premières esquisses d'un aéronef très gros porteur Airbus, capable de transporter plus de 800 passagers sont réalisées au cours de l'été 1988. Cet ambitieux projet reste un secret du département « technologie et développement de produits nouveaux » d'Airbus pendant deux ans et demi[12].
Pré-étude Boeing-Airbus
Les constructeurs américains Boeing et McDonnell Douglas ont également des projets de cette ampleur avec le Boeing New Large Airplane et le McDonnell Douglas MD-12. Face aux coûts de développement que représente un tel projet, Daimler-Benz et British Aerospace, deux membres du consortium, poussent Airbus à accepter une étude conjointe proposée par Boeing[13] sur la faisabilité d'un super gros porteur, connu sous le nom de « Very Large Commercial Transport ».
Les deux constructeurs savent qu'il n'y a pas de place pour deux appareils sur une telle niche de marché, comme l'a montré le lancement simultané du L-1011 de Lockheed et du DC-10 de McDonnell Douglas qui avait conduit Lockheed à cesser la production d'avions civils.
En , lorsque cette enquête de deux ans et demi se termine[14], Boeing et Airbus décident de ne pas construire un appareil ensemble[15].
Retrait de Boeing
Le coût du développement d'un super gros porteur est évalué par Boeing entre 12 et 15 milliards de dollars, et par Airbus à 8 milliards. A posteriori, l'évaluation de Boeing semblait meilleure puisque le coût officiel du développement de l'A380 est de 18,6 milliards de dollars (12 milliards d'euros)[16]. Ron Woodard, le président de Boeing, indiquait d'ailleurs qu'il est « difficile d'imaginer qu'Airbus puisse développer un avion totalement nouveau pour un investissement de 8 milliards de dollars »[17].
Boeing estime que le marché potentiel des très gros porteurs n'est pas suffisamment important pour justifier un tel investissement, et préfére développer des versions dérivées de son 747[17], ce qu'il fait dans les années suivantes et qui correspond de fait à la pratique récurrente de Boeing préférant l’évolution sur une base existante, même si en partie obsolète, plutôt qu’un saut technologique coûteux et risqué (cas du 737 maintes fois remanié et a contrario du 787 Dreamliner)
En 1997, Boeing abandonne l'étude des 747-500 et 747-600 faute d'un intérêt suffisant de la part des compagnies aériennes. En 2000, Boeing propose encore deux projets de 747 agrandis aux compagnies aériennes, les modestes 747X et 747X stretch mais là encore, les projets n'aboutiront pas, la demande étant jugée insuffisante. Boeing, qui a l'exclusivité effective du marché des gros porteurs et un savoir-faire unique de 30 ans dans ce domaine renonce donc à renouveler son 747. Cela indique soit que le constructeur américain faisait une erreur stratégique, soit que le marché potentiel ne permettrait pas une rentabilité satisfaisante pour lui et encore moins pour Airbus qui n'a à cette époque que la maîtrise des petits et des moyens porteurs.
Choix d'Airbus
De nombreux responsables d'Airbus sont persuadés que Boeing n'a aucune envie de lancer un tel projet avec son principal concurrent et que l'échec de cette enquête commune n'était qu'un leurre pour permettre au constructeur américain de conserver la suprématie avec ses 747[13]. C'est une mauvaise interprétation puisque Boeing est effectivement resté sur le marché des gros porteurs avec son 747-400 sorti en 1989 et laisse à Airbus le marché des très gros porteurs. Le désintérêt de Boeing pour un développement commun d'un très gros porteur est autant économique que stratégique.
Lorsqu'Airbus apprend en 1996 que Boeing compte lancer un projet de 747 agrandi[18], la division « très gros porteur » est immédiatement créée et le constructeur européen décide de lancer son propre projet[15]. En réalité, Boeing ne lance pas de projet de 747 « très gros porteur » mais évalue seulement la demande du marché pour des avions intermédiaires entre le gros porteur type 747-400 et le très gros porteur que voulait Airbus. Cet objectif raisonnable réduit l'investissement à « seulement » 5 milliards de dollars.
Le projet du super gros porteur d'Airbus débute fin 1995 et est baptisé Airbus A3--. À partir d', Airbus noue contact avec des compagnies susceptibles d'être intéressées par le gros porteur de Boeing pour discuter de l'hypothèse d'un avion de plus de 500 places. En fait, les 26 et , le constructeur européen invite les représentants de 13 compagnies aériennes mondiales au sein de l'hôtel Le Domaine d'Auriac de Carcassonne, près de Toulouse[19]. Airbus reçoit des réponses très positives, mais le désintérêt réel de Boeing pour les très gros porteurs sème le doute chez certains partenaires d'Airbus. Le souvenir du Concorde, avion extraordinaire jamais égalé en performances mais aux pertes abyssales en exploitation faute de rotation continue est encore très présent. En , la division « très gros porteur » continue d'affirmer la rentabilité du projet[20]. Finalement, le programme se lança officiellement le [19].
Développement et construction
Les contraintes de taille de l'avion sont fixées par Airbus en concertation avec les principales compagnies aériennes, les services officiels et les représentants d'une soixantaine d'aéroports internationaux[21]. Afin de pouvoir utiliser les installations des aéroports existantes sans entraîner de modifications radicales des infrastructures, l'A380 doit pouvoir s'inscrire dans un « carré de 80 mètres de côté»[22]. Les dimensions de l'appareil ne doivent pas dépasser 80 m en longueur ni en largeur, la hauteur maximale est fixée à 24 m. Ces contraintes ont pour objectif de permettre à l'A380 de pouvoir manœuvrer sur les parkings et les voies de circulation des aéroports capables d'accueillir des 747. Les dépassements de 15,4 m en largeur, 3,3 m en longueur et 4,7 m en hauteur doivent être absorbés par les marges que la plupart des aéroports internationaux ont fixées autour du 747. L'incident de Bangkok montre que cette perte des marges rend les manœuvres plus délicates dans les aéroports non modifiés : le , l'Airbus A380 en tournée de démonstration en Asie avec à son bord des personnalités, heurte un hangar sur l'aéroport de Bangkok, endommageant légèrement son aile gauche.
La conception de l'A380 a pour objectif constant de transporter plus de passagers que le 747 tout en consommant moins. Le , le conseil de surveillance d'Airbus décide le lancement du programme A3--[23], rebaptisé A380, pour un montant de 8,8 milliards de dollars[17] et alors que 55 appareils sont déjà commandés par 6 compagnies[24]. Le nom A380 ne suit pas la dénomination classique des appareils d'Airbus qui s'est jusqu'à présent suivie, de A300 à A340. « A380 » fut choisi car le chiffre 8 ressemble à une vue en coupe du double pont de l'avion et est également un chiffre porte-bonheur dans de nombreux pays asiatiques dont le marché est le principal visé[12].
La configuration de l'A380 est définitivement fixée au début de l'année 2001 et la fabrication des premiers éléments du caisson de voilure débute le [25].
Budget
Le budget initial du programme A380 est évalué à 8 milliards de dollars en 1994[26] mais s'élève, en 2003, à 10,7 milliards de dollars dont 5,1 milliards pour Airbus, 3,1 milliards pour les partenaires et équipementiers et 2,5 milliards sous forme d'avances des gouvernements[27]. En 2008, le budget est évalué à 18,6 milliards de dollars. Il faut ajouter à cette somme les 7,9 milliards de dollars (5 milliards d'euros) des dépassements de coût et les pénalités de retard[28]. La charge financière totale est donc de 26,5 milliards de dollars (18 milliards d'euros avec 1 € pour 1,45 USD), très loin des 8 milliards de dollars annoncés à l'origine pour justifier la viabilité économique du projet.
Présentation au public
La présentation officielle de l'A380 a lieu le [29]. La cérémonie présente le nouvel appareil ainsi que les nouvelles couleurs de la gamme Airbus, qui ne reprennent plus les couleurs arc-en-ciel caractéristiques depuis le lancement du premier A310 mais ont dorénavant pour dominante le bleu. Le nom du constructeur est peint en bleu clair et en gras sur les côtés de la carlingue et le nom de l'appareil est également peint en bleu foncé. Toute la dérive ainsi qu'une partie de l'arrière du fuselage sont bleues et contiennent des motifs de formes arrondies, en dégradé de bleu, représentant des sphères.
Premiers essais au sol et premier vol
Le premier vol de l'A380 a lieu le à 10 h 29 sur l'aéroport de Toulouse-Blagnac, piloté par Jacques Rosay[30],[31]. L'appareil MSN001 emporte un équipage composé de six personnes (deux pilotes, un mécanicien-navigant et trois ingénieurs), est dépourvu de sièges dans la cabine mais est rempli de ballasts d'eau, censés simuler le poids des passagers et vérifier la stabilité de l'appareil et l'efficacité des commandes[32]. Lors de son décollage et bien que n'étant chargé qu'à 75 %, cet appareil a battu, avec une masse de 421 tonnes, le record mondial du plus lourd engin civil à décoller[31] : l'An-124 affiche 405 tonnes au maximum et l'An-225 Mriya, hexaréacteur développé pour le transport de la navette spatiale Bourane, a une charge maximale de 640 tonnes, record mondial toutes catégories.
Pendant les 3 h 51 min du vol, l'équipage peut, à une altitude maximale d'environ 10 000 pieds (3 000 mètres), tester les volets, la vitesse et les commandes de vol, ainsi que l'équilibrage de l'avion.
L'appareil se pose à 14 h 23 après avoir salué les 40 000 spectateurs présents en survolant la piste Concorde à une altitude de 100 mètres.
Tests et certification
Cinq A380 sont construits pour la phase de test et de présentation[33]. Le vol inaugural du marque le début d'une campagne d'essai d'une durée initialement prévue de 15 mois.
Le , l'A380 atteint la vitesse maximum de Mach 0,96 soit environ 1 175 km/h (comparée à sa vitesse de croisière de Mach 0,85) lors d'un piqué, complétant ainsi le début de l'enveloppe de vol[33].
Afin de tester l'appareil dans des conditions climatiques extrêmes, l'A380 s'est rendu le à Medellín et Bogota en Colombie pour tester les performances de l'appareil à haute altitude puis le à Iqaluit dans le grand Nord canadien pour des tests par grand froid[34].
Le , durant le test de résistance des ailes de l'appareil MSN5000, la rupture s'est produite lorsque la charge a atteint 145 % de la charge maximale, en dessous des 150 % requis pour obtenir la certification. Airbus a annoncé avoir modifié la structure pour atteindre la résistance suffisante[35].
Le comportement des passagers durant un vol longue durée ainsi qu'en situation d'urgence a été testé et simulé. Le , lors d'un exercice d'évacuation d'urgence, 853 passagers et 20 membres d'équipage ont réussi à évacuer l'avion en 78,04 secondes[36] en utilisant 8 sorties de secours sur 16[37] (la norme autorise un maximum de 90 secondes avec la moitié des sorties de secours). Le seul incident à déplorer étant une jambe cassée. Trois jours plus tard l'appareil a reçu les certifications de l'AESA et de la FAA[38]. Le confort et l'ergonomie de l'avion ont été testés lors des premiers vols avec passagers. Le , 474 salariés volontaires d'Airbus ont décollé pour le premier d'une série de quatre vols[39].
Le , l'A380 MSN009, cinquième et dernier appareil à rejoindre la flotte des avions d'essai, effectue son premier vol équipé des moteurs GP7200 d'Engine Alliance[40].
La première présentation de l'A380 au grand public s'est déroulée en au Salon du Bourget, qui a attiré 480 000 visiteurs[41]. À la mi-, l'A380 a effectué une tournée de démonstration et de promotion en Asie du Sud-Est et en Australie. L'avion s'est posé sur les aéroports de Singapour, Brisbane, Sydney et Kuala Lumpur en portant successivement les couleurs de Singapore Airlines, Qantas et Malaysia Airlines. Le 19 novembre, l'A380 a également participé au Salon aéronautique de Dubaï où il a porté les couleurs de la compagnie Emirates. Après cette « tournée mondiale », la fin de la phase de test intervient le [42].
L'AESA et la FAA délivrent les certificats de vols des A380-841 (Trent 970-84 ou 970B-84) et A380-842 (Trent 972-84 ou 972B-84) le [43]. L'A380-861 (GP7270) obtient son certificat le .
En l'AESA ainsi que la FAA mesurent également le niveau de nuisances sonores au décollage de l'A380 à un niveau de 88 dB.
En , l'A380 MSN 004 immatriculé F-WWDD est remis au Musée de l'Air et de l'Espace du Bourget[44], il est suivi en 2019 par le MSN 002 immatriculé F-WXXL au musée Aeroscopia à Toulouse.
L'A380 MSN 009 est revendu en 2010 à Emirates.
Le MSN 001 a été gardé par Airbus afin de tester les moteurs d'Airbus A350 XWB, et plus tard le moteur "Zero E" d'Airbus[45].
Problèmes d'industrialisation et délais de livraison
Le lancement commercial de l'A380 a été repoussé à trois reprises en raison de problèmes d'industrialisation concernant le câblage de la cabine passagers à double pont, réalisé à Hambourg. Certains câbles se sont avérés trop courts pour être raccordés aux autres parties de l'avion lors de l'assemblage final à Toulouse[46]. Airbus a attribué ces problèmes à la complexité d'un tel système et à des facteurs propres à l'A380[47], dont la personnalisation de l'aménagement intérieur des avions selon les compagnies, et donc des faisceaux (câblage)[48]. Le manque d'intégration d'Airbus a également été mis en cause[46]. Les usines Airbus allemandes et françaises utilisaient des versions différentes du même logiciel CATIA, version 4 pour l'Allemagne et l'Espagne et version 5 pour le Royaume-Uni et la France[49]. De plus, les maquettes numériques 3D censées faciliter l'intégration des harnais électriques n'ont été réalisées que très tardivement dans le programme et les différentes équipes étaient encore en phase d'apprentissage[50].
Airbus a annoncé les premiers retards en 2005 et prévenu les compagnies clientes qu'ils pourraient atteindre jusqu'à six mois, réduisant ainsi le nombre prévu d'avions livrés fin 2009 de 120 à 90-100. Le , un second délai a été annoncé avec un nouveau décalage de 6 à 7 mois dans le calendrier des livraisons. La première livraison était toujours prévue pour fin 2006 mais le nombre d'appareils livrés en 2007 était réduit à 9, et le nombre total d'appareil livré fin 2009 réduit à 70-80. Cette annonce a entrainé une chute de 26 % de l'action EADS et conduit aux départs de Noël Forgeard et Gustav Humbert. Quatre mois plus tard, le , EADS déclarait que le programme était de nouveau différé d'un an et que le premier exemplaire de série de l'Airbus A380 ne serait livré qu'au mois d'. Les nouvelles prévisions de livraison étaient alors d'un exemplaire en 2007, 13 en 2008, 25 en 2009 et 45 en 2010[51].
En , Louis Gallois a déclaré qu'Airbus s'apprêtait à livrer 12 A380 en 2008, 21 en 2009 et finalement 44 par an à partir de 2010[52].
En raison de difficultés de production et du report des commandes liées à la crise économique mondiale de 2008, Airbus a indiqué début que seuls 14 A380 seraient livrés en 2009, et « plus de 20 » en 2010[53]. Airbus a finalement livré 12 A380 en 2008 et 10 (au lieu de 25) en 2009.
Au début de l'année 2010, Airbus espérait pouvoir livrer 20 appareils pendant l'année mais les incidents survenus sur les réacteurs Rolls Royce de la compagnie Qantas, à la fin du mois de novembre, ont entraîné, sur les deux derniers exemplaires, des modifications qui devaient être initialement livrées au mois de décembre. De ce fait, seuls 18 appareils ont été livrés en 2010. À la suite de ces nouvelles difficultés, l'objectif de dépasser la vingtaine d'A380 livrés en 2011 s'est avéré plus difficile à atteindre que prévu pour Airbus, mais a tout de même été tenu. Pour permettre d'offrir des délais raisonnables aux compagnies clientes, Airbus n'envisageait alors la mise en œuvre des nouvelles versions de l'A380 que lorsque le seuil des 30 appareils livrés par an sera dépassé.
Ces retards de 18 mois sur le programme initial ont eu de nombreuses conséquences pour Airbus. Ils ont entraîné un surcoût du programme de 4,8 milliards d'euros[51].
Finalement, Airbus annonce le la fin de la production de l'A380 à partir de 2021, après plusieurs années de ventes décevantes[54].
Mise en service
Les A380-841/-842 obtinrent leurs certifications le [easa 2]. Encore fallut-il que les appareils assemblés plus tôt fussent modifiés selon cette certification et la spécification finale. Le premier A380 vendu, MSN003 immatriculé 9V-SKA (lors de la vente et fut réimmatriculé 2-DRPA en 2017=, fut livré à Singapore Airlines le et ensuite effectua son premier vol commercial et particulier le entre Singapour et Sydney[55]. Deux mois plus tard, le PDG de Singapore Airlines Chew Choong Seng déclara que les performances de l'A380, en consommant 20 % de kérosène de moins que les 747 de sa flotte, étaient supérieures à ce qu'espéraient la compagnie et Airbus[56].
Le plus gros client de l'A380, Emirates, reçut son premier appareil équipé de moteurs Engine Alliance le à la suite de la certification de type obtenue le [easa 2] et celui-ci effectua le 1er août le premier vol commercial vers les États-Unis. Puis la compagnie reçut son second A380 le [57].
À la suite des réparations de l'appareil endommagé par l'explosion d'un réacteur du vol 32 de Qantas, des micro-fissures furent découvertes sur les pieds de nervure des voilures[58]. De sorte que l'Agence européenne de la sécurité aérienne dut émettre une consigne de navigabilité obligeant les compagnies à vérifier certains de leurs A380. Plus tard, ces micro-fissures furent observées sur tous les A380 et forcèrent Airbus à modifier sa chaîne d'assemblage des A380 à Toulouse, causant des délais de livraison supplémentaires.
En , Bob Lange, directeur mercatique de l'A380, précisa toutefois que le taux de fiabilité pour l'ensemble de la flotte A380 en service a été supérieur à 98 %, les 9 premiers mois en 2012. De plus, concernant les 25 derniers appareils mis en ligne, ce taux a augmenté à plus de 99 %, pendant les trois derniers mois, à savoir de juillet à [a 1].
Estimations de marché
À la fin des années 1980, le constructeur prévoyait 2 046 exemplaires durant 20 ans[59]. En faveur de son projet A.., Airbus réunit confidentiellement les PDG de 13 clients potentiels en : Delta Airlines, Northwest Airlines, United Airlines, Air France, British Airways, KLM Royal Dutch Airlines, Lufthansa, All Nippon Airways, Cathay Pacific Airways, Japan Airlines, Japan Air System, Singapore Airlines ainsi que Qantas[19]. À la suite de sa plus importante étude de marché[60], Airbus estima, en 2007, que la demande sur les appareils de plus de 400 places pourrait atteindre 1 300 appareils dans les 20 prochaines années[a 2]. Toutefois, en , après cinq ans de vols commerciaux, Airbus ne comptait plus qu'entre 650 et 700 appareils sur le long terme[a 2].
Seuil de rentabilité
Il était estimé à 250 appareils au lancement du programme, à 270 en 2001, à 300 en mars 2006 puis à 420 appareils en . Le manque à gagner sur la période 2006-2010 est estimé à 6,3 milliards d'euros[61]. De nombreuses compagnies, lésées par les retards, ont exigé des compensations financières. Emirates a reçu 110 millions de dollars d’indemnités[62].
En repoussant tous les projets d'amélioration hormis ceux qui concernent l'A380-800 classique, le PDG Fabrice Brégier annonça le l'équilibre du programme dans cette année[63]. En 2015, selon un consultant, un A380 peut être vendu au prix de 250 millions de dollars au minimum pour cette optique, alors qu'Airbus dut baisser ses prix jusqu'à 100 millions de dollars au début du programme[1]. D'où, concernant les clients, l'acquisition de l'A380 devint plus difficile qu'auparavant.
Commandes et livraisons
En raison des délais de production puis de la suspension du programme fret, les 27 commandes de l'A380F ont soit été annulées soit converties en version passager. Vingt clients ont commandé des A380 dont un utilisateur privé (la compagnie de location ILFC a annulé ses 10 exemplaires, le ).
Les retards importants concernant son industrialisation, le mécontentement des clients envers les premiers exemplaires livrés et la crise économique, ont profondément affecté le nombre de commandes des A380 en 2008 et 2009. En 2010, le retour de la confiance des compagnies aériennes et une brève amélioration du contexte économique ont permis à Airbus de retrouver un nombre de commandes de nouveau satisfaisant.
L'incident de la compagnie Qantas avec les moteurs Rolls-Royce en , qui conduit à la découverte de problèmes de microfissures sur les ailes, conjugué à la fragilité conjoncturelle de l'économie mondiale, entraînent de nouvelles difficultés pour Airbus. En 2011 et en 2012, le constructeur aéronautique européen reste en deçà de son objectif[64] de commandes et de livraisons supérieures à 30 exemplaires par an.
Pour le programme de l'A380, la situation financière faible de certains clients était problématique. Après l'échec du versement de Skymark Airlines en 2014, la livraison destinée à Transaero Airlines devint impossible, après que cette dernière eut perdu son certificat opérationnel le , en cumulant 4 milliards de dollars environ de dettes[65].
À la suite de la levée des sanctions internationales contre l'Iran, la compagnie nationale annonce la commande le , de 12 appareils livrables à partir de 2019[66]. Mais en , Iran Air renonce[67].
En 2018, faute de commandes suffisantes, Airbus envisage l'arrêt du programme si les commandes espérées en Chine et à Dubaï ne se concrétisaient pas[68]. Toutefois, le , Emirates annonce la commande de 36 appareils pour 16 milliards de dollars, 20 commandes fermes et 16 commandes en option, pour une livraison à partir de 2020[69]. Ce sera la dernière commande enregistrée.
Cumul des commandes et livraisons[70],[71]
Couleur | Commandes | Livraisons |
---|
Type | 2001 | 2002 | 2003 | 2004 | 2005 | 2006 | 2007 | 2008 | 2009 | 2010 | 2011 | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | Total | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Commandes fermes |
A380-800 | 78 | 34 | 10 | 10 | 24 | 33 | 9 | 4 | 32 | 19 | 9 | 42 | 13 | 2 | -2 | 4 | -70 | 251 | ||||
A380-800F | 7 | 10 | 10 | -17 | -10 | 0 | |||||||||||||||||
ACJ380 | 1 | -1[73] | 0 | ||||||||||||||||||||
Livraisons | A380-800 | 1 | 12 | 10 | 18 | 26 | 30 | 25 | 30 | 27 | 28 | 15 | 12 | 8 | 4 | 5 | 251 |
Annulations, reports, remplacements
L'A380 a été mis en service en 2007. Quatre ans plus tard ont commencé des annulations généralement remplacées par des commandes de bimoteurs :
- mars 2011, annulation de la commande d'ILFC (leasing) de 10 A380, remplacés par 100 A320 neo ;
- août 2012 (AOF). Hong Kong Airlines a déclaré réfléchir à sa commande de dix A380 en raison d'une demande insuffisante, notamment sur les vols « Classe Affaires ». EADS qui aurait du livrer le premier appareil en 2013, devra à présent convaincre Hong Kong Airlines de convertir cette commande en appareils plus petits et trouver un nouvel acheteur pour ces dix A380 ;
- octobre 2013, annulation de la commande de trois A380 par Lufthansa. Information à rapprocher de l'importante commande de bimoteurs, voir plus bas ;
- août 2015. Vietnam Airlines a définitivement renoncé à intégrer quatre A380 au sein de sa flotte. Selon Báo Đầu TU, l’achat d’A380 représenterait une charge financière trop importante. Entre 2015 et 2019, Vietnam Airlines prendra livraison de huit Boeing 787-9 Dreamliner et 10 Airbus A350XWB ;
- janvier 2016. International Consolidated Airlines Group (IAG), la maison-mère de British Airways, Iberia, Vueling et Aer Lingus) n'exercera pas ses options pour l'achat d'avions A380 en raison du prix trop élevé du très gros porteur d'Airbus, a déclaré lundi son directeur général Willie Walsh. Il a ajouté qu'IAG était intéressé par l'achat ou la location-vente de Boeing B-777-300ER[74] ;
- mars 2016. Fabrice Brégier (Airbus) a confirmé la décision d’Air France de convertir ses deux dernières commandes d’A380 en commande de trois A350-900, d’une capacité de 300 à 400 sièges[75] ;
- mai 2016. Air Austral (vols entre Paris et La Réunion) annule définitivement sa commande d'Airbus A380. À la place, elle va recevoir deux Boeing Dreamliner 787[76] ;
- septembre 2016. Singapore Airlines ne prolongera pas la location de son premier Airbus A380 lorsqu'elle arrivera à terme l'an prochain. Singapore Airlines fut la première compagnie aérienne à utiliser l'A380 en 2007. Elle en a 19 dans sa flotte[77] ;
- décembre 2016. Iran Air a conclu une commande ferme de 100 appareils Airbus pour un montant d'environ 20 milliards de dollars. La commande couvre 46 moyen-courriers A320, 38 long-courriers A330 et 16 A350. L'accord de janvier comportait 12 A380 qui n'ont pas été retenus[78] ;
- en 2018, quatre compagnies aériennes annoncent l'annulation de leurs commandes. Le , Virgin Atlantic annule son achat de six appareils. Le , la compagnie chinoise Hong Kong Airlines annule 10 appareils. Qantas renonce à son achat de huit appareils.
Reports de livraison / mise en vente :
- mai 2012, la compagnie australienne Qantas a annoncé qu'elle reportait à 2016/2017 la réception de deux A380 d'Airbus livrables en 2013, dans le cadre de son programme d'économies destiné à enrayer le déclin de ses performances opérationnelles ;
- octobre 2013. Air France a trois A380 en commande mais elle paraît peu pressée de les réceptionner : elle a obtenu que la livraison du numéro 10 soit repoussée d'un an, au printemps 2014. Et la compagnie s'est entendue avec Airbus pour repousser de quatre ans la livraison des deux derniers avions[79]. Air France ne prend pas ses derniers exemplaires ; Singapore Airlines ne conservera pas son premier A380 arrivant en fin de leasing; Malaysia cherche à vendre la totalité de sa flotte A380[80].
Remplacements
De nombreuses compagnies ne remplacent pas leurs anciens Boeing 747 par des A380 (ou par des 747-8), mais par des gros bimoteurs (A330, A350, B777, B787) :
- décembre 2009, commande par United Airlines de 25 A-350 et 25 B787 pour remplacer 25 B-747 qui ont vingt ans ;
- juillet 2011, commande du groupe Air France-KLM de 50 long-courriers bimoteurs. Pierre-Henri Gourgeon a indiqué vouloir renouveler « 70 à 80 appareils parmi les plus anciens par de nouveaux avions ». Il s'agit de remplacer des MD 11 et des B-747 de KLM ainsi que des A340, A330-200 et 777-200 d'Air France par des A350 et des B787 ;
- aout 2011, commande de Cathay Pacific de 20 B777. Ils remplaceront les 21 B747-400 et les 13 A340-300 de la compagnie d'ici la fin de la décennie. Cathay a également commandé 10 Airbus A330 et 32 Airbus A350-900[81] ;
- octobre 2011, commande par Air Pacific de trois A330-200 pour remplacer deux Boeing B747-400 et un B767-300ER ;
- juin 2012, British Airways commande des 777-300 ER en attendant l'A380. « Nous menons un vaste programme d’acquisitions d’appareils avec Iberia. Quand le programme jumelé sera mis en œuvre, nos propres 747 vont commencer à dater et il nous faut une capacité de flexibilité suffisante avec d’autres appareils », a confié au magazine Flightglobal Airline Business Keith Williams, le directeur général de British Airways ;
- mi-septembre 2013, Lufthansa devrait approuver une commande de 50 avions gros porteurs pour remplacer 22 B747-400 et plus de 20 A340. La compagnie devrait choisir entre le B787 et l’A350[82]. La compagnie allemande a finalement commandé 34 B777-9X (au lieu des B787) et 25 A350-900 pour remplacer ses quadrimoteurs (septembre 2013) ;
- octobre 2013, Japan Air Lines, qui avait mis en service plus de cent B747 depuis 1970, a retiré ses derniers 747 en 2011 et les a remplacé par des B777 et des B787. La compagnie vient de commander 31 A350 plus 25 autres en option. Elle n'exploite plus aucun quadrimoteur ;
- aout 2016, La compagnie Malaysian Airlines souhaite se séparer de ses A380 alors qu'elle doit recevoir six A350. Peter Bellew, directeur général de la compagnie d'État malaisienne, a indiqué qu'il comptait ajouter trois à quatre A330 à sa flotte l'an prochain et confirmer une option sur 25 appareils 737 MAX prise cet été auprès de Boeing. S'il ne trouve pas d'acquéreurs, le groupe pourrait se résoudre à les louer. Peter Bellew compte en tous cas retirer les super jumbo de la flotte d'ici fin 2018[83] ;
- février 2019. La compagnie Emirates a décidé d'annuler la livraison de ses 39 derniers A380 en commande au profit de 70 nouveaux biréacteurs gros-porteurs produits par Airbus, à savoir 40 A330neo (A330-900) et 30 A350 XWB (A350-900). Le 272e et dernier A380 est livré à Emirates le [84].
Fin du programme
À la suite de ces annulations, et même en ralentissant la cadence de production, le carnet de commande est vide après 2021.
La fin du programme A380 est annoncée par Tom Enders le : « Si vous avez un produit que plus personne ne veut ou que vous pouvez vendre seulement à perte, vous devez arrêter de le produire »[85] :
- Lufthansa modernise sa flotte et revend six A380. Le groupe allemand s'offre 20 Boeing 787-9 et 20 A350 supplémentaires, pour 12 milliards de dollars, mais revend six de ses 14 A380 à Airbus[86] ;
- Air France-KLM a annoncé la commande de 10 A350-900 supplémentaires pour remplacer ses dix A380 d'ici à fin 2022[87].
Échec commercial
De nombreuses raisons expliquent l'échec commercial de l'A380, dont notamment le choix du très gros porteur quadrimoteur[88] ;
- La folie des grandeurs ? Selon un ancien dirigeant d'Airbus (qui n'est pas nommé) « la cause racine de cette folie des grandeurs vient du fait qu'ils ont pris le problème à l'envers ; ils ont voulu absolument dézinguer le 747… plutôt que de partir du besoin des compagnies aériennes pour ensuite définir un avion. Ils ont donc misé sur le quadrimoteur très longue distance (15 000 km) » ;
- il aurait été lancé trop tard. « Le temps qu'on développe tout ça, on arrive à 2007, le monde a changé »[89]. En 2007, cela fait alors déjà 7 ans que Boeing a lancé son 777 long-courrier (777-300 ER) à la demande d'Air France. Pour Gérard Feldzer, l'A380 est arrivé 10 ans trop tard[90]. En annonçant la fin de la production de l'avion, Tom Enders a déclaré : « Nous sommes arrivés dix ans trop tard, voire plus »[91] ;
- il aurait été lancé trop tôt. Sans remettre en cause la pertinence de l'avion sur le fond, le PDG d'Airbus Fabrice Brégier estime en que « l'A380 a été lancé trop tôt »[92]. L'une des raisons d'être de l'A380 est en effet la prévision selon laquelle la saturation des grands aéroports internationaux obligerait les compagnies à utiliser des appareils plus gros, faute de créneaux horaires disponibles. Cette prédiction ne s'est partiellement réalisée que sur quelques aéroports[93]. L'A380 a été conçu pour s'adapter au système Hub and spoke[94] alors que les compagnies aériennes préfèrent actuellement les vols Point-to-Point (en) en utilisant des appareils de taille plus modeste[95]. En fait il semble que ce choix à faire entre deux types d'avions adaptés à deux modes de transports différents soit un faux débat : des avions comme le B777-300 ER ou l'A350, et depuis 2019 les A321 LR et XLR, bien que de capacités plus faibles que l'A380, sont capables de satisfaire ces deux modes de transport, ce que l'A380 ne peut pas faire partout (car il nécessite des aménagements d'aéroport spéciaux)[96] ;
- surestimation du marché du très gros porteur, estimé par Airbus jusqu'à 1 300 avions sur 20 ans ;
- l'avion est très grand et très lourd[97], car il a été dimensionné pour recevoir jusqu'à 850 passagers. Comme il ne transporte en général que entre 470 et 550 passagers, très en dessous de sa capacité maximale, il n'est rentable que s'il est rempli. Il nécessite une grande longueur de piste, des taxiways élargis, des installations d'embarquement/débarquement spécifiques (double passerelle, salles d'embarquement adaptées) qui ne sont présentes que dans les plus grands aéroports[98] ;
- l'avion coûte cher à fabriquer ; les pièces de grandes dimensions (fuselage, ailes) viennent de loin, leur transport a nécessité des infrastructures et des procédures exceptionnelles. Le train d'atterrissage comporte cinq trains (un avant et quatre principaux), pour un total de 22 roues ;
- l'avion coûte cher en exploitation ; contraint dès le départ à ne pas dépasser 80 mètres d'envergure, l'allongement de l'aile est inférieur à celui des avions plus petits (7,8 au lieu de 9 à 9,5), ce qui augmente sa traînée induite et sa consommation[99]. Il a quatre moteurs, ce qui augmente les coûts de carburant, les coûts de maintenance et les durées d'immobilisation au sol pour entretien ou en cas de panne[100]. L'entretien de quatre moteurs l'immobilise quinze jours ouvrables par semestre au lieu de huit pour un bimoteur comme l'A330[101] ;
- sa capacité de fret est insuffisante, alors que le fret est un facteur clé dans l'économie des lignes aériennes. Le B777 avec 14 à 23 t et l'A330-300 avec 17 t ont une capacité de fret très supérieure à celle de l'A380 (10 à 12 t)[102] ;
- l'extension progressive des normes ETOPS, autorisant les bimoteurs à voler de plus en plus loin, a mis fin au monopole du quadrimoteur sur les vols long-courrier ;
- c'est en fait le bimoteur, petit ou gros, qui répondait et qui répond aux besoins des compagnies. Selon Didier Evrard, directeur du programme A350 : « c'est un succès commercial sans précédent… nous n'avons donc aucun doute sur le fait que cette famille d'appareils est la bonne réponse aux besoins des compagnies »[103]. Avec une configuration de base de 365 sièges, le B777-300 ER a privé l'A380 de la quasi-totalité du marché du renouvellement du B747 que convoitait Airbus. Les compagnies ont en effet préféré sacrifier un peu de capacité pour une meilleure performance économique en termes de coût au siège et de coût à l'étape[102]. Décision emblématique, à partir de 2023, des A321neo sont construit dans l’usine Jean-Luc Lagardère où l’A380 était fabriqué
Ironie de l'histoire, c'est le choix du gros bimoteur (l'Airbus A300 en 1967) qui est à la racine du succès d'Airbus ; c'est ce fil directeur qui a été repris avec succès par Boeing avec le 777 et le 787.