Société Radio-Canada
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La Société Radio-Canada (SRC ; en anglais : Canadian Broadcasting Corporation, CBC), souvent appelée CBC/Radio-Canada, est une société de la Couronne canadienne.
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Société Radio-Canada (en) Canadian Broadcasting Corporation | |
Création | 1936 |
---|---|
Dates clés | 1952 : début de la diffusion télévisuelle
1995 : lancement du site web radio-canada.ca 2022: inauguration de la Nouvelle Maison de Radio-Canada |
Forme juridique | Société d'État |
Siège social | Montréal (Québec) Ville de Québec (Québec) Canada |
Direction | Catherine Tait, Présidente-directrice générale |
Activité | Médias |
Produits | Radio, Télévision |
Site web | cbc.radio-canada.ca |
Société précédente | Canadian Radio Broadcasting Commission (en) |
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La SRC est le plus ancien service de diffusion du Canada : elle a été créée le . Les services radiophoniques comprennent CBC Radio One, CBC Music, ICI Radio-Canada Première, ICI Musique et le service international Radio Canada International. Les services télévisuels sont CBC Television, CBC News Network et documentary en anglais, ICI Radio-Canada Télé, ICI RDI, ICI ARTV et ICI Explora en français.
En tant que société d'État, la SRC fonctionne de façon autonome par rapport au gouvernement. Elle est régie par la Loi sur la radiodiffusion de 1991, et est directement responsable devant le parlement canadien, via le ministère du Patrimoine canadien.
D' à , les plateformes de diffusion de la Société Radio-Canada ont changé graduellement de nom et d'image afin de créer une uniformisation corporative, telles que les chaînes de France Télévisions ou de la BBC. Ainsi, la Première chaîne radio est devenue ICI Radio-Canada Première, la première chaîne télé est connue en tant qu'ICI Radio-Canada Télé, le Réseau de l'information est RDI est devenue ICI RDI, Artv est devenue ICI ARTV, Explora est ICI Explora et ainsi de suite. Le nom de la société lui, ne changera pas et restera CBC/Radio-Canada ainsi que CBC et tous ses services.
La SRC dispose de plusieurs stations de radios, de réseaux de télévision terrestre (seulement accessible dans de grandes localités) ou câblée, aussi bien en français qu'en anglais, mais également dans des langues autochtones.
Radio-Canada Ohdio donne accès à des émissions de radio en direct ou en rattrapage, des balados, des concerts, des listes d'écoute musicale et des livres audio à écouter en continu ou à télécharger[1].
Origine et hégémonie (1929-1970)
C'est en 1929, que la commission Aird (Commission royale sur la diffusion radio) recommande la création d'un réseau national de diffusion radiophonique, principalement en raison de l'influence grandissante de la radio américaine passant par des réseaux qui commencent à s'étendre au Canada. En mai 1932, le gouvernement Bennett crée la Commission canadienne de la radiodiffusion (CCR), en suivant les recommandations du comité, mais en subordonnant l'organisme au ministre et au Parlement. L'hiver suivant, la Commission diffuse surtout des émissions réalisées par le Canadien National (CN), mais le programme s'enrichira bientôt de concerts symphoniques, de pièces de théâtre, d'actualités quotidiennes, etc. Une étape est franchie en 1936, lorsqu'une petite équipe est dépêchée sur les lieux d'un désastre minier à Moose River (en) et fait passer à l'antenne trois jours durant des bulletins d'information aux demi-heures[2].
La CCR utilise le réseau de stations de radio que le CN utilisait à l'intention de ses passagers, couvrant essentiellement le centre et l'est du Canada. C'est le qu'elle prend le nom de CBC/Radio-Canada, en devenant une société d'État à part entière.
Durant les décennies suivantes, la SRC jouera un rôle de pionnier au Canada. Elle introduit la modulation de fréquence (radio FM) en 1946, et entame la diffusion d'émissions de télévision en 1952 avec l'ouverture de la station CBFT à Montréal le et de CBLT à Toronto le surlendemain. Certaines émissions sont enregistrées sur kinéscope à fins d'archives et de rediffusion ultérieure. Quelques émissions américaines ou produites par CBLT à Toronto sont expédiées sur kinéscope à CBFT Montréal, qui diffusait alors dans les deux langues. Un système de relais par micro-onde pour relier les stations est en construction dès , en commençant par relier Buffalo (New York) à Toronto, permettant la diffusion simultanée d'émissions américaines à Toronto depuis le [3]. Le lien entre Toronto et Montréal, relié par douze tours de relais, entre en fonction le [4]. La station CBOT à Ottawa est lancée à l'occasion du couronnement de la Reine Élisabeth II le . Les enregistrements en kinéscope de la cérémonie sont envoyées en trois parties entre 13 h 30 et 18 h (heure de Grande-Bretagne) par hélicoptère à l'aérodrome de North Weald, puis mis à bord d'un Canberra des Royal Air Force à destination de Goose Bay au Labrador. Un chasseur à réaction de l'Aviation royale canadienne transportera le colis à l'aérodrome de Saint-Hubert, où il sera ensuite envoyé au studio de Radio-Canada à Montréal et diffusé dès 16 h 30, heure de Montréal, simultanément sur les trois stations[5].
La première station de télévision privée affiliée à CBC est CKSO, située à Sudbury, en Ontario (), et celle à Radio-Canada est CFCM-TV à Québec le .
De 1944 à 1962, la SRC diffuse sur deux réseaux radiophoniques anglophones de la bande AM : Trans-Canada Network et Dominion Network. Ce dernier est un réseau de stations privées (sauf CJBC, publique) qui diffuse des programmes légers et des émissions américaines. Il sera dissous en 1962. Trans-Canada Network, composante publique, diffuse des programmes plus sérieux. C'est ce qui deviendra CBC Radio, avant d'être renommée CBC Radio One.
Le , le signal télévisé de la SRC couvre le pays d'un océan à l'autre. La couleur arrive le , pour se généraliser en 1974. En 1968, grâce à ses 214 stations et stations affiliées, la télévision de Radio-Canada rejoint 95,2 % de la population anglophone et 89,6 % des Canadiens d'expression française[6]. Pendant les années 1960, la SRC joue un rôle dans la Révolution tranquille en donnant la parole à de nombreux acteurs politiques prônant l'État-providence.
En 1978, la SRC devient le premier diffuseur au monde à utiliser un satellite pour diffuser des programmes télévisés, couvrant le Canada d'un océan à l'autre. En août 1978 le budget de la SRC pour 1979-80 est gelé à son niveau de 1978 ce qui représente une coupure de 71 millions de dollars[7],[8].
Perte d'hégémonie et compressions budgétaires (1980-1999)
La télévision de Radio-Canada n'a aucune concurrence francophone canadienne avant la fondation de Télé-Métropole, en 1961, qui ne diffuse qu'à Montréal. À partir des années 1970, la SRC perd son hégémonie, mais continue de jouer un rôle important. Par la suite, l'influence culturelle de la SRC, comme celle de nombreux diffuseurs publics dans le monde, se met à diminuer, notamment en raison des sévères restrictions budgétaires imposées par le gouvernement canadien, qui débutent dans les années 1980 et s'accroissent par étapes jusqu'aux années 2000[réf. nécessaire].
Première vague de compression (années 1980)
En décembre 1984, quelques mois après les élections fédérales ayant amené Brian Mulroney au pouvoir, le gouvernement annonce des coupures de $75 millions qui résultent en l'abolition de 1 051 postes (dont 192 à Montréal et 18 à Québec), la cessation de la publication du magazine Ici Radio-Canada, des visites guidées de la Maison de Radio-Canada à Montréal et du système télétexte Iris[9],[10]. Un sondage Gallup mené en février 1985 indique que les Canadiens sont peu préoccupés par les compressions à Radio-Canada, seuls 24 % ayant une opinion défavorable aux coupures contre 22 % favorables[11].
Dans un contexte de fort déficit public à la fin des années 1980, le ministre des Finances Michael Wilson engage d'importantes compressions fiscales et budgétaires (14 milliards de dollars sur deux années). Selon Pierre Juneau, président de Radio-Canada, le budget de la société est amputé de 240 millions de dollars sur quatre ans. Il qualifie ces compressions de « catastrophiques », précise que « l'effet des coupures est désastreux, ce ne sera plus jamais Radio-Canada que l'on a connu » et annonce 550 mises à pied. Dans le détail, les coupes directes approchent $140 millions et le solde des $100 millions restants correspond à des taxes additionnelles à acquitter. Le ministre fédéral de la Communication, Marcel Masse justifie les restrictions budgétaires par la nécessité de réduire le déficit[12] :
« C'est à Radio-Canada qu'incombe la responsabilité d'effectuer des compressions. [...] Le gouvernement a décidé de réduire le déficit national. Ayant décidé cela, le gouvernement a voulu s'assurer que tous participeraient à cet objectif. Cela ne veut pas dire que chaque service doit modifier son propre mandat, cela signifie que comme nation, si nous ne réagissons pas sur la question du déficit, tous les programmes gouvernementaux seront menacés. »
— Marcel Masse, Ministre fédéral des Communications, le
En , en raison de nouvelles compressions, la SRC met fin aux activités locales de deux stations télé francophones en Ontario, CBLFT (Toronto) et CBEFT (Windsor)[13], qui deviennent des semi-satellites de CBOFT (Ottawa). Un bulletin de nouvelles distinct pour Toronto est produit à partir des studios d'Ottawa. Au mois d', la SRC obtient l'autorisation du CRTC pour reconvertir CBLFT en station locale[14], et l'antenne diffuse, entre autres, Le Téléjournal Ontario chaque soir à 18 h.
En , les joueurs de la LNH déclenchent un mouvement de grève. Une annulation des séries éliminatoires causerait des pertes des revenus publicitaires considérables pour Radio-Canada (de l'ordre de $60 millions)[15]. La grève ne dure finalement qu'une dizaine de jours et les séries éliminatoires sont reprogrammées.
Seconde vague de compression à partir de 1995
De nouvelles compressions budgétaires (227 millions de dollars sur l'année 1995-1996) sont annoncées dans le budget Martin de 1995. Le lendemain, Tony Manera annonce sa démission à titre de président de la SRC[17]. Il est remplacé en par Perrin Beatty (en), un ancien député et ministre progressiste-conservateur[18].
Radio-Canada annonce le la suppression de 2 000 emplois, soit 2/9e des effectifs, d'ici à la fin de l'année 1996[19].
Dans le détail, le plan prévoit des compressions dans toutes les divisions de la société[16] :
- $13 millions à la radio française ;
- $16 millions à la radio anglaise ;
- $35 millions à la télévision française ;
- $67 millions à la télévision anglaise.
12 postes sont supprimés à la station de radio et de télévision de Québec. Cependant, aucun changement de programmation n'est prévu, ni à la station de Québec, ni à celles de l'Est du Québec. Dans l'ensemble, la direction de Radio-Canada est optimiste quant au maintien de la programmation[16] :
« La grille de cet hiver ne souffrira pas trop mais, ça pourrait être différent si le prochain budget Martin nous impose de nouvelles coupures. [...] Les employés se demandent si ces coupures cesseront un jour. »
— Michèle Fortin, Vice-présidente de la télévision française, le
Des mesures de compressions sont annoncées au service de l'information de la télévision française à rentrée d'automne 1996[20],[21]:
- Les téléjournaux du réseau français de Radio-Canada seront interrompus par des pauses publicitaires, comme c'est le cas sur les réseaux privés (effectif à partir du bulletin du ). La SRC attendait tirer $8 millions de revenus publicitaires supplémentaires avec cette mesure[22];
- Les quatre téléjournaux en français des provinces de l'Ouest sont abolis et remplacés par un bulletin commun aux quatre provinces d'une durée de 30 minutes.
Les compressions se poursuivent jusqu'en 1997, mais la ministre du Patrimoine canadien, la libérale Sheila Copps, annonce début 1997 que la Société Radio-Canada verra son financement stabilisé à partir de 1998 pour les cinq années suivantes (à hauteur de $900 millions par an). La direction de la SRC salue la fin des compressions et la meilleure prédictibilité du financement quinquennal[23].
Développement des canaux spécialisés
Malgré les compressions, la SRC obtient une licence d'exploitation pour sa chaîne d'information en continu de langue française et le Réseau de l'information (RDI) entre en ondes le . Cette nouvelle chaîne est intégralement financée par les redevances du câble et les recettes publicitaires et ne reçoit donc aucun financement public, même si elle bénéficie de la mutualisation des moyens avec l'antenne principale.
Le , la SRC dépose auprès du CRTC 4 demandes de canaux spécialisés en français en partenariat avec Bell Satellite[24],[25] :
- Le Réseau de l'économie (RDE) axé sur la consommation malgré la demande concurrente d'un consortium mené par TVA[note 1] pour créer Le Canal Affaires (LCA) calqué sur LCN et axé sur le monde des affaires[26] ;
- Le Réseau de l'histoire (RDH) en partenariat avec l'ONF ;
- Le projet de Télé Classique en partenariat avec TVA consacré à l'histoire de la télévision et la rediffusion d'émissions patrimoniales ;
- Un projet de Réseau des arts en partenariat avec La Sept-Arte qui est présenté comme prioritaire[27].
Les 4 projets de la SRC sont contestés par Télé-Québec et du ministère de la Culture et des Communications du Québec[25].
Le CRTC décide en de repousser d'un an l'examen des demandes de canaux spécialisés[27] et rejette tous les projets présentés par la SRC (ainsi que 9 autres demandes d'autres diffuseurs) dans sa décision du [28].
Seul le projet de Réseau des arts aboutira finalement à la création d'ARTV le . La SRC décide en effet, en de faire appel auprès du gouvernement fédéral de la décision du CRTC du concernant le Réseau des arts[29] et obtient gain de cause le [30]. Le CRTC accepte en de tenir des audiences publiques sur la création du réseau qui est renommé Télé des Arts et qui inclut désormais Télé-Québec[31],[32]. Le CRTC approuve définitivement le projet Télé des Arts le [33].
Fragmentation de l'auditoire et nouveaux services (depuis 2000)
Au cours de l'année 2003 la SRC discute avec TF1 et France Télévisions de son intérêt à participer à la création d'un réseau international d'information continue en langue française (un projet qui se conclut quelques années plus tard par la création du réseau France 24 auquel Radio-Canada ne participe pas)[34].
En , la SRC annonce le démantèlement de la Chaîne culturelle, qui devient Espace musique en septembre de la même année. La presque totalité de la programmation est changée, une partie de la programmation culturelle est transférée à la Première chaîne et la musique, jusque-là presque entièrement classique avec un peu de jazz, devient beaucoup plus éclectique[35]. Ce virage est motivé par des cotes d'écoute trop faibles, qu'on attribue à un contenu trop élitiste[36].
Une nouvelle vague de compression débute en 2009 : le lors de la présentation du budget fédéral de 2009 le gouvernement du Canada réduit le budget de Radio-Canada de 171 millions CAD[37]. Le même jour la direction de Radio-Canada annonce lors d'une conférence téléphonique la suppression de 805 emplois dont 335 au réseau français. 86,5 % des postes supprimés sont dans la branche télévision et les 13,5 % restants à la radio. La direction prend plusieurs mesures de réduction des coûts[38] :
- La fermeture du bureau de Dakar ;
- L'abolition du poste de correspondant de RDI à Paris (le correspondant pour le Téléjournal reste cependant en poste) ;
- L'annulation de plusieurs émissions d'information et d'affaires publiques (le bulletin de minuit à RDI, RDI Junior, Vous êtes ici, Macadam tribus, Fréquence libre) ;
- La réduction entre 10 % et 30 % du budget de production des émissions maintenues.
Radio-Canada dépose le une demande de licence devant le CRTC pour une nouvelle chaîne spécialisée appelée Radio-Canada Sports. Ce service en français aurait été exclusivement consacré au sport et plus particulièrement au contenu canadien et au sport amateur[39]. Le projet est abandonné le à la suite de nouvelles compressions budgétaires annoncées dans le budget fédéral de 2012[40].
Du côté de la télévision, le recul s'explique non seulement par les compressions budgétaires, mais aussi par la fragmentation de l'auditoire : déclin de la télévision en réseau en général, due à la montée de chaînes spécialisées à partir des années 1990, puis des jeux vidéo et d'Internet à partir des années 2000. Les réseaux privés du Canada affrontent la même concurrence, mais leur déclin est moindre que celui de la SRC.
Au Canada anglophone, le déclin peut être partiellement attribué à la concurrence des réseaux privés qui diffusent des émissions américaines, plus populaires que les émissions canadiennes conformes au mandat de la CBC. L'auditoire des émissions de télévision francophones a aussi décliné, surtout à cause de la concurrence des réseaux privés de langue française, mais la situation est différente en raison de la différence linguistique et culturelle du Canada français. En effet, le Québec dispose d'un star-system solide, et les productions locales continuent d'y occuper une place de choix, y compris sur les chaînes privées. Certaines émissions de la chaîne radiophonique ICI Radio-Canada Première se trouvent en tête des cotes d'écoute.
Pour ce qui est des informations, la lutte entre le réseau public et ses concurrents privés est chaude. Ainsi, après les élections fédérales de 2006, CBC Television a affirmé dans une publicité écrite que 2,2 millions de Canadiens avaient regardé sa couverture de l'évènement, ce qui la mettrait au-dessus de tout autre diffuseur. Toutefois, dans des publicités similaires, CTV a aussi revendiqué être en tête, et affirmé que CBC n'avait été regardé que par 1,2 million de personnes. Du côté francophone, les soirées électorales du réseau privé TVA sont maintenant plus écoutées que celles de la SRC.[réf. nécessaire]
En décembre 2023, Radio-Canada annonce la suppression de 600 emplois ce qui représente 10 % de sa masse salariale, ainsi que 200 autres emplois vacants. Sur ces 600 emplois, 250 concernent des activités francophones, 250 autres concernent des activités anglophones et 100 autres postes concernent des activités supports[41].
Lors de sa mise sur pied, Radio-Canada n'était qu'un simple réseau de radio publique. Elle devenait, plus tard, le référent audiovisuel du pays. Durant le XXe siècle, les grandes avancées technologiques en matière de télécommunications ont métamorphosé la Société.
L'introduction de la télévision a généré avec elle la nécessité de créer des images, des illustrations graphiques communicantes (qui apportent un soutien à différents moments et à des situations dans les émissions[42]), des décors, des ensembles, des logos et une gamme d'éléments graphiques utiles pour la communication audiovisuelle. Grâce à l'équipe de designers et de professionnels, une grande majorité de ces productions ont été créés au cœur même de la Société[43]. L'équipe fait partie à la fois du Design Office CBC à Toronto pour le service en anglais et à la fois du design de la SRC à Montréal pour le service en français.
Le travail accompli par l'équipe de design depuis la fondation de Radio-Canada a été caractérisé pour répondre, de façon créative, aux besoins du temps, au positionnement de la marque, cherchant, ainsi, à créer un rappel de ses productions (produits) afin de nourrir la mémoire collective du client final (le consommateur).
Identité visuelle
L'identité visuelle de Radio-Canada a été un long processus d'affirmation qui, à son tour, a répondu au défi de réfléchir à la consolidation du Canada en tant que pays.
Depuis sa création comme logo de la station de radio officielle du pays, l'identité visuelle est passée par la transition vers le monde de l'audiovisuel, répondant, ainsi, à l'évolution technique de la couleur. Cette transformation se termine (pour l'instant) avec l'affirmation et la consolidation d'une image, marque qui cherche à représenter la nature mondiale des temps modernes et l'identité d'un pays multiculturel comme le Canada[44].
Historique du logo[45]
- Logo de 1940 à 1958.
- Logo de 1958 à 1974.
- Logo alternatif utilisé entre les années 1960 et 1974.
- Logo en couleur de 1966 à 1974.
- Logo du au 1er janvier 1986
- Logo du 1er janvier 1986 au .
- Logo depuis le .
Étant donné que, dans les années 1940, les stations de Radio-Canada se retrouvaient un peu dans toutes les régions du pays, recouvrant ainsi 90 % de la population canadienne, Hortense Binette créait le symbole électrisant en or pour rejoindre le Canada entier. Binette était étudiante à l'École des Beaux-Arts lorsqu'elle gagna le concours de logo lancé par la Société Radio-Canada en 1940. Le premier logo représentait le contact et le lien puissant entre le média et les régions canadiennes. Ces dernières étaient évoquées par la carte du Canada. Par ailleurs, le modernisme en Europe était déjà très fréquent dans l'année de la conception de ce premier logo. Ce mouvement moderne marquait la rupture avec la mise en page traditionnelle et symétrique[46]. On pouvait remarquer l'influence du modernisme européen dans le concept de Binette. Sur la page web de CBC dans laquelle est publiée une présentation flash des logos de Radio-Canada, Annette Blum de la Faculty of Design, OCAD University, analyse le logo : « Stylistic influences from European Modernism and Bauhaus may be seen in Binette's choices for the mark, such as her use of flat planes of sharply contrasting colours, her stylistic treatment of the diagonal flashes, and a strong emphasis on typography. »[47]. Ceci étant dit, Hortense Binette s'était inspirée du modernisme européen pour représenter Radio-Canada la radiodiffusion fédérale.
La télévision en Amérique du Nord prenait déjà sa forme autour des années 1940, ce n'est que dans les années 1950 que la diffusion à la télévision devint populaire au Canada[48]. La toute première télédiffusion de la Société Radio-Canada remontait à 1952. L'arrivée de la télévision influençait le logo de Binette. Ce logo n'était pas fait pour la télévision, ce qui bouleversa le symbole. Une simple modification était alors nécessaire afin de répondre aux exigences techniques de la télédiffusion. C'est en 1958 que Jean-Paul Boileau, un fabricant de maquettes de renom, un scénariste, un génie de la technique du Shot Glass[49] et un membre de l'équipe de conception de Radio-Canada, modifia le logo pour l'adapter au petit écran ne conservant que la carte géographique et la typographie. Le logo simplifié mettait en évidence l'importance de la diffusion tant au niveau national qu'en international[44]. D'ailleurs, la carte du Canada occupait une place importante dans le logo. Le designer graphique Todd Falkowsky notait à ce sujet : « The map form is important, presenting the entire country to the viewer, reminding us the CBC is a shared resource, reflecting stories from all corners of the country. »[47] Le fait de conserver la carte évoquait l'union de l'ensemble du pays, car, au même moment, la Société inaugurait ses services du Nord pour atteindre le public éloigné. Le logo de 1958 était destiné à la télédiffusion rappelant ainsi l'appartenance à la nation canadienne.
Dans le rapport annuel de 1964[50], la Société Radio-Canada élaborait déjà son plan d'action pour se préparer à l'arrivée de la télévision en couleur, prévu pour 1966[51]. L'idée était de pouvoir déjà diffuser les émissions en couleur pour l'Expo 67 et de pouvoir continuer la diffusion en couleur après ce grand événement international. Trente ans après sa mise sur pied, Radio-Canada transformait une deuxième fois son identité visuelle en 1966. Crée pour le lancement de la télévision couleur et qui ne devait être que temporaire, le logo papillon en arc-en-ciel évoquait la nouvelle ère de la technologie[44]. Hubert Tison, designer graphique de la Société, était le concepteur de ce nouveau logo. Avec les arcs-en-ciel qui se dispersaient vers tous les côtés, Tison s'était fait influencer par le phénomène préoccupé par l'esthétique. Vu que, dans les années 1960, le design graphique était une façon de trouver des solutions sur les problèmes de communication dû à la progression technologique. Annette Blum disait aussi : « The CBC butterfly logo reflects this new simplicity, with its centralized motif and strong geometric shapes. The concept of an image radiating outwards from a central point may be seen to foreshadow the later 'gem' logos. »[47]. Ceci permettrait de croire qu'un autre logo était à venir. Le logo de 1966 en papillon n'était que pour le lancement de la télévision en couleur et l'on utilisait pendant huit ans[44].
Les Jeux olympiques de 1976 venaient influencer le logo de la Société Radio-Canada. Cette dernière se préparait à la diffusion-hôte pour les Jeux olympiques, ce qui permettait à la Société de devenir le diffuseur à l'échelle internationale. Avec la lettre « C », pour le Canada, en expansion, le nouveau logo évoquait la diffusion mondiale par les ondes en plus de son rôle national déjà existant. Créé par Burton Kramer en 1974, le rouge au centre vers l'orangé sur un fond bleu symbolisait le dynamisme du média réunissant ainsi la télévision et la radio[52]. Ces deux modes de transmission étant aussi rassemblés sous le même toit lors de l'inauguration de la Maison Radio-Canada à Montréal en . La nouvelle identité visuelle avait connu un grand succès et servait également à créer différents aspects visuels. Comme le mentionne Greg Durrell dans son commentaire cité sur la page web de CBC « The comprehensive program addressed every aspect of the corporation's visual needs, including— but not limited to— standards for stationery, vehicles, posters, billboards, banners and clothing. »[47], l'énumération de cette dernière met en évidence que Kramer avait réussi à intégrer entièrement le système de design. Les années 1970 était une époque où les arts graphiques s'étaient accrus dans les services publics et l'affirmation de l'identité et l'autonomie était un fait réel[53]. C'est pourquoi Radio-Canada avait adopté un logo identifiant son pays et avait intégré tous les aspects visuels pour répondre aux besoins. Enfin, le style de ce logo correspondait à la diffusion internationale tout en conservant l'identité nationale.
Dans les années 1970 et 1980, l'ordinateur offrait de nouvelles possibilités de création aux graphistes. La progression technique de la photographie et l'arrivée de l'informatique jouaient un rôle important dans la création et la reproduction des images et du texte[54]. Dans ce contexte, le logo orangé sur un fond bleu devenait difficile pour la reproduction et devait être révisé. Avec l'approbation de Kramer, Hubert Tison et Robert Innes modifiaient le logo pour simplifier la structure en élaborant un cahier de normes, ce qui assurait une meilleure constance dans la reproduction du logo. Les deux designers imposaient la couleur corporative bleue et conservait la lettre « C » en expansion. Ce logo avait été modifié en 1986 et collaborait dans l'institutionnalisation de la personnalité graphique de Radio-Canada. En se penchant sur le commentaire de Todd Falkowsky, « The 80s were the birth of branding proper, and all major companies applied the business lessons of rebranding and communication design to their public faces. With free trade and more accessible media outlets, it is fitting that the CBC would demonstrate this new focus and shift the lens and logo from just Canada to itself, to Canada to the world and back home. »[55], les années 1980 connaissaient également une forte croissance des médias et cela facilitait l'accès aux médias par le public. Les concurrences se progressaient de plus en plus et Radio-Canada devait attirer l'attention de ses spectateurs. Essentiellement, Hubert Tison et Robert Innes modifiaient le logo pour permettre la reproduction.
Avec l'arrivée de la concurrence mondiale, Radio-Canada modifiait son logo en changeant la couleur bleue en rouge pour que le public puisse identifier la Société plus facilement et pour se différencier de leurs concurrents. Modifié en 1993, on conservait la lettre « C », car cette lettre appartenait à la Radio-Canada depuis 1974. Par contre, « C » devenait plus renfermé pour symboliser le lien de rapprochement entre CBC et SRC, la télévision et la radio ainsi que la chaîne anglaise et française. Le nouveau logo composait maintenant 13 pièces au lieu de 28 pièces. Ces simples modifications apportaient une meilleure reproduction, tant à l'écran qu'à l'imprimé, et assurait la qualité de résolution et de lecture. Todd Falkowsky énonçait et va jusqu'à affirmer ces propos : « The red colour represents Canada in a symbolic way, the radiating form respects the DNA of the CBC brand and will not get lost in translation. Canadians would still recognize this as the CBC logo and the improved structure — fewer visual parts and colour — fits across multiple screens, legible on a mobile phone, laptop or in print and is visually less cluttered. »[55]. Les normes graphiques étaient aussi très proches du logo précédent pour permettre une transition graduelle. La nouvelle couleur, rouge, évoquait et évoque encore aujourd'hui la vivacité, l'action, le dynamisme, l'appartenance à la radio, à la télé et à la nation canadienne. Le Réseau National prenait forme pour affirmer l'appartenance à la nation. Bref, cette modification apportée, en 1993, avait pour but de s'identifier à la nation canadienne et de se différencier des autres concurrents[44].
Quoi qu'il en soit, on peut affirmer que le premier logo de 1940, représentant Radio-Canada comme étant la radiodiffusion fédérale, était un résultat de l'influence du modernisme européen évoqué par Hortense Binette. Ensuite, on peut soutenir que Jean-Paul Boileau avait créé le logo de 1958 pour la télédiffusion en évoquant l'appartenance à la nation canadienne par la carte du Canada. De plus, le logo de 1966 en papillon, créé par Hubert Tison, prévoyait seulement le lancement de la télévision en couleur et fut utilisé pendant huit ans. De même, on peut apercevoir que Burton Kramer avait créé le logo de 1974 afin de représenter, par l'influence des Jeux olympiques, la diffusion à l'échelle internationale en conservant l'identité canadienne par la lettre « C » en expansion. Sans compter qu'Hubert Tison et Robert Innes apportaient au logo de 1986 la qualité de reproduction ne conservant que la couleur corporative bleue. Enfin, le logo de 1993, changé en rouge, permit à la Société Radio-Canada de se différencier des autres concurrents tout en respectant son identité canadienne.
Préfixe ICI
Un nouveau défi est apparu pour l'équipe de création de Radio-Canada après avoir réussi à unifier les concepts de CBC et la SRC en mettant en œuvre la dernière révision du logo[44] (diffusion en français). Il y avait un besoin de générer un souvenir plus immédiat et approprié, puisque dans les émissions l'acronyme SRC accompagné par le logo n'arrivait pas à laisser ce rappel que l'entreprise cherchait. Le public était plus habitué à parler de Radio-Canada comme un nom propre que de l'acronyme SRC. Entre autres, le nom complet était trop long pour être inclus dans la constitution du logo.
Dans le même ordre d'idées, grâce aux chaînes satellitaires spécialisées qui se sont créés (Explora, Art tv, etc.), il eût une expansion de la famille au cours des dix dernières années. Alors, c'était nécessaire de réunir autour du logo à la fois le nom du canal, ainsi comme son « nom de famille » (CBC ou SRC). Par contre, il y eût ici le problème du préfixe SRC et le manque de rappel comme marque.
En 2013, l'équipe de création de Radio-Canada (Montréal) a présenté l'incorporation du préfixe ICI en réponse au besoin d'intégration et de rappel.
Le principe de base du préfixe était d'utiliser une phonétique simple liée au populaire C-B-C. Aussi, l'idée était de créer quelque chose qui éveille un sentiment d'appartenance au public francophone. ICI répond à ces deux critères. Sa connotation d'appartenance a été facilement prise par les téléspectateurs francophones et a créé une atmosphère de famille (« ici », chez nous). Radio-Canada parvient, alors, à évoquer une conscience collective en seulement trois sons phonétiques.
Sa mise en œuvre a été graduelle et, même à ce jour, continue de rencontrer la résistance dans certains secteurs de l'opinion publique. Or, l'approbation et l'appropriation a été dans le prévu par la société et le groupe créatif[56].
Équipe de Design
L'arrivée de la télévision, l'étape ultérieure à la couleur de cette dernière, le progrès technologique vers les multimédias, la haute définition et les réseaux sociaux ont engendré la nécessité de créer des éléments visuels multiples et divers. Il était, alors, indispensable de consolider un département de design pour travailler à l'interne.
Dès le début, deux départements ont été établis. D'abord, le service en anglais basé à Toronto, ensuite, le service en français établi à Montréal[56]. Au fil du temps, un troisième sera mis sur pied à Halifax, responsable de la production d'images en format vidéo[57].
L'équipe de conception est configurée à partir d'un groupe multidisciplinaire. Il est chargé de créer des éléments nécessaires pour la survie d'une émission tels que des maquettes, des décorations, des scènes, des images, des dessins, des accessoires, des marionnettes, des génériques, des collages, des photographies, des affiches promotionnelles, des images 3D, des titres et des polices spécifiques[58]. Parfois aussi, l'équipe de conception doit répondre à des exigences plus complexes comme le soutien à une réalisation spécifique, le développement des histoires ou des illustrations des chansons (pour les émissions destinés aux enfants), des illustrations informatives (télé-journaux), des animations, de l'identité de chaque émission (header, titre, intro, outro), etc. L'équipe travaille toujours en étroite collaboration avec le réalisateur de l'émission[56].
Un bulletin d'information, par exemple, peut exiger des images explicatives. Ayant au moins le besoin d'un minimum de trois illustrations pour une émission, en comptant trois émissions par jour, 7 jours sur 7, pendant les 52 semaines de l'année et chaque élément d'illustration graphique n'aura plus que 30 secondes à l'antenne[42]. Chaque année, en moyenne, on pouvait parler d'un millier d'images en plein écran seulement pour les bulletins de nouvelles. S'il s'agissait d'une animation, alors les graphistes doivent développer les textes en série de 24 images par seconde[59].
L'équipe de conception a reçu une certaine reconnaissance dans le milieu. Cependant, peut-être la plus importante est la double nomination d'Academy Award pour les films d'animation Crac et L'homme qui plantait des arbres, illustrés par Frédéric Back[56].
Le mandat de la Société Radio-Canada est fixé par la Loi sur la Radiodiffusion adoptée en 1991. Cette loi dispose que la programmation de la société d'état devrait à la fois[60] :
- Être principalement et typiquement canadienne.
- Refléter la globalité canadienne et rendre compte de la diversité régionale du pays, tant au plan national qu'au niveau régional, tout en répondant aux besoins particuliers des régions.
- Contribuer activement à l'expression culturelle et à l'échange des diverses formes qu'elle peut prendre.
- Être offerte en français et en anglais, de manière à refléter la situation et les besoins particuliers des deux collectivités de langue officielle, y compris ceux des minorités de l'une ou l'autre langue.
- Chercher à être de qualité équivalente en français et en anglais.
- Contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationales.
- Être offerte partout au Canada de la manière la plus adéquate et efficace, au fur et à mesure de la disponibilité des moyens. (Malgré son mandat, la société d'état n'est pas disposée à offrir ses services directement et sans frais à la totalité des foyers Canadiens, car depuis le passage à la norme de diffusion numérique, seules les antennes locales directement liées aux stations ont été converties à cette nouvelle norme de diffusion).
- Refléter le caractère multiculturel et multiracial du Canada.
Ce mandat rend la SRC sujette à critique, puisqu'il stipule qu'elle doit entre autres « contribuer au partage d'une conscience et d'une identité nationale »[61]. Cela pousse bien des souverainistes québécois, tels que le cinéaste Pierre Falardeau, à surnommer la société publique « Radio-Cadenas[62] ».