Peuls
groupe ethnique établi dans la bande sahélo-saharienne / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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Les Peuls, appelés aussi Foulani, Fulbhés, Fulfulde, Pular ou encore Fellata selon les pays, sont un peuple traditionnellement pasteur établi dans toute l'Afrique de l'Ouest et au-delà de la bande sahélo-saharienne, soit au total une quinzaine de pays différents[3] et pour un total estimé entre 25 et 65 millions de personnes selon les critères retenus[4],[1].
Pour la langue, voir Peul.
Fulɓe
𞤊𞤓𞤂𞤇𞤉 - 𞤄𞤋𞤐𞤁𞤌𞤂 𞤀𞤁𞤂𞤃
Nigeria | 16 000 000 (7,9%)[1] |
---|---|
Guinée | 4 900 000 (40,9%)[1] |
Sénégal | 3 600 000 (26,3 %)[1] |
Cameroun | 2 900 000 (10%)[1] |
Mali | 2 700 000 (13 %)[1] |
Niger | 1 700 000 (7%)[1] |
Burkina Faso | 1 500 000 (7 %)[1] |
Bénin | 480 000 (5%)[1] |
Tchad | 460 000 (4 %)[1] |
Côte d'Ivoire | 423 000 (1,5 %)[1] |
Mauritanie | 400 000 (10 %)[1] |
Gambie | 312 400 (16%)[1] |
Guinée-Bissau | 320 000 (17 %)[1] |
Togo | 95 000 (1%)[1] |
Population totale | entre 50 et 65 millions[2],[1] |
Langues | Pulaar, Fulfuldé |
---|---|
Religions | Islam (sunnisme prédominant) |
Particulièrement nombreux au Nigeria, au Niger, dans le nord et ouest du Cameroun[5], au Mali, au Sénégal, en Mauritanie et en Guinée, ils sont également présents au Tchad, en Gambie, au Burkina Faso, au Bénin, en Guinée-Bissau, en Sierra Leone, au Ghana, en Côte d'Ivoire, au Togo et au Soudan. Ils sont souvent minoritaires, à l'exception de la Guinée, où ils représentent la communauté la plus importante du pays avec 53,4 % de la population[6].
Leur dispersion et leur mobilité a favorisé les échanges et les métissages avec d'autres populations subsahariennes. Le socle de leur identité est toutefois la religion musulmane, la compétence pastorale, une tendance à l'endogamie et la langue peule[7]. Ils comptent, en tout état de cause, de multiples groupes.
Le terme « Peul » est la transcription française du mot wolof pë'l qui désigne ce peuple selon l'orthographe la plus utilisée dans les textes français contemporains (on rencontre encore parfois « Peulh », notamment dans la toponymie de villages et localités par exemple au Burkina Faso, ou encore « Peuhl ») ou encore prononcé [poullo], pluriel ’« Fulbhe » [Foulbé] dans d'autres endroits.
Les Peuls se désignent eux-mêmes sous le nom de « Pullo » (sing.) (prononcé [poullo]), dont le pluriel est « Fulɓe »[8]. Pullo peut également être écrit sous différentes orthographes : Pulli, Pullo, Pulo, Poules, Pouli (terme qui, au temps de l'imamat du Fouta-Djalon islamisé, désignait les Peuls non convertis à la religion islamique). Fulɓe pourra pour sa part être écrit Fulbhe (en utilisant une digramme bh comme en Guinée), Fulbe ou Foulbé.
En haoussa, on les désigne sous le nom de Foulani[9] (Filani, Fulani, Fellani), terme repris en anglais et en arabe.
Ils sont également appelés Fellata (Fellaata, Fulata, Felata), Fufulde (Fulfede), Foulankunda (Fulakunda), Foulanke (Fulanke), Foula (Foulah, Fulah, Fula, Fullah, Fellah, Ful, Foule[10], Foulhs, Phouls, Fouli, Foullah, etc.), Pulaar (Poular), Poullôri, Futa, Hilani, Peuls Pandé[11].
Selon une hypothèse, le mot « Pullo » viendrait du verbe « fullade » (éparpiller, disperser au souffle)[12]. Cependant, il s'agit sans doute là d'une étymologie populaire sans fondement scientifique et, à l'heure actuelle, il n'existe aucun consensus quant à l'étymologie du nom ou de ses dérivés[13].
Un archipel peul
On parle pour décrire le peuplement peul à travers la bande sahélienne d'« archipel peul », car ils sont disséminés en îlots d'importance très variable. Ces îles ou des îlots [...] émergèrent au XIXe siècle dans les remous des djihads qui aboutirent à l'établissement des théocraties peules[14]. De façon générale, le peuplement peul s'est par ailleurs effectué par vagues successives, dans différentes régions, à différentes époques[15].
Les locuteurs de peul sont aujourd’hui entre 50 et 80 millions. Ils ont conservé une langue remarquablement homogène, quoique généralement non écrite et ce malgré la dispersion de ce peuple sur la plus grande partie du Sahel.
Nord-est du Burkina Faso
Au nord-est du Burkina Faso se trouve un espace peul, héritage de l'ancien émirat du Liptako fondé en 1809-1810[16], et plus connu sous le nom de « région de Dori »[16].
Une autre région historique peule est celle de Djelgoji, correspond à peu près à la province du Soum actuelle[16]. Les Peuls de cette province, les Djelgobe, sont venus de régions maliennes proches, le Macina et le Kunaari (région de Mopti), entre le XVIIe et le XVIIIe siècle[16].
Les autres principales zones d'implantation sont la province du Yagha et partiellement celle de l'Oudalan[17].
Nord du Nigeria
Au Nigeria, lors du recensement de 1963, ils représentaient 8,6 % de la population, dont environ 40 % de la population de l'État de Kano, 65 % de l'État du Nord-Est[18]. On y distingue les Foulanis (Peuls) Bidas, qui sont établis dans les villes haoussas depuis le XVe siècle et ont la main de façon presque exclusive sur les postes à responsabilité depuis la djihad d’Ousman dan Fodio, et les Foulanis Bororos, qui sont des pasteurs semi-nomades[18].
Cette distinction recoupe celle fait traditionnellement entre les groupes pastoraux, nomades et « païens », constitués de Peuls dits « rouges », des Peuls sédentaires et islamisés, dits Peuls « noirs », qui prirent la tête des guerres saintes (djihad) au XIXe siècle qui aboutirent à la naissance d'États, comme l'imamat du Fouta-Toro (Sénégal-Mauritanie), l'empire du Macina (Mali) ou l'empire de Sokoto (Nigeria)[19]. Cette typologie dichotomique est toutefois en grande partie remise en cause aujourd'hui[19].
Mali
Il y a également des communautés importantes au Mali surtout dans la région de Mopti, notamment dans le Macina (cercles de Tenenkou, Djenné, Mopti et Youwarou) et constituent la deuxième ethnie après les Bambaras[20]. On distingue ainsi chez les Peuls nomades les Seedoobe (du Mali), Weiheebe de l'Hayre les Djelgobe (venus du Burkina Faso) et surtout les Toleebe (venus du Niger)[21].
Tchad
Au Tchad, la population peule (Foulbé, Bororo) autochtone est estimée à environ 250 000 personnes.
Les Peuls Wodaabe (ou Bororos), sont notamment connus pour la fête de la beauté du Geerewol[22]. Les Saanorabe et les Diagbé sont un sous-groupe peul connu pour sa bravoure et la quantité très élevée de leurs troupeaux de vaches Na'i (zébu).
Sénégal
On les trouve au Sénégal et en Mauritanie mais aussi dans le sud du Sénégal et en Gambie.
Les Habobe constituent l'un des dizaines de sous-groupes peuls du Sénégal.
On en recense aussi au Sierra Leone, en Gambie, en Guinée-Bissau et dans le nord du Cameroun[5], toujours dans la partie sahélienne de ces pays, là où la vie pastorale est possible. En Guinée et Guinée-Bissau, une proportion importante de la population est peule.
Côte d'Ivoire
L‘immigration des éleveurs peuls dans le nord de la Côte d’Ivoire a commencé dès l’époque coloniale, dans les années 1930[23].
Toutefois, les sécheresses des premières années de la décennie soixante-dix, qui frappent durement le bétail des Peuls du Niger comme de Mauritanie, provoquent un mouvement inédit de repli vers les savanes méridionales, un mouvement qui s'accélère avec la sécheresse de 1984[24].
Dès lors, les Peuls font irruption au nord de la Côte d'Ivoire et leur cheptel connaît un essor dans ce nouveau pays, suscitant des réactions violentes des populations locales[24]. Ces Peuls transhumants immigrés des régions sahélo-soudaniennes ont suscité des réactions de rejet des Sénoufos dans leur zone de population dans les années 1990, tout en évitant celle des Lobi d'un côté et des Malinké[24].
En revanche, les autorités ivoiriennes ont à l'époque soutenu de facto l’installation des éleveurs et de leur cheptel depuis le début des années 1970 en investissant considérablement en infrastructures et en suivi sanitaire[23]. Entre 1974 et 1994, afin de résoudre les problèmes de ravitaillement en viande dans les grandes villes du pays, les autorités ivoiriennes définissent une politique pastorale dans le cadre de laquelle est encouragée la sédentarisation des éleveurs peuls burkinabé et maliens, déjà présents dans le pays[25].
Le cheptel transhumant finira par représenter le tiers du cheptel bovin national en 1994[23] et le cheptel dans le Nord, 65 % du cheptel national[25].
Soudan
Des Peuls, sous le nom de Fellata, se sont établis au Soudan sur le chemin du pèlerinage à la Mecque.
Les juifs d'Afrique ?
L'écrivain et penseur malien Amadou Hampâté Bâ (1900-1991), lui-même Peul, évoquant la manière dont ils sont perçus par d'autres communautés, a établi une comparaison avec les juifs, dans la mesure où, comme les juifs avant la création d'Israël, ils sont dispersés dans de nombreux pays, où ils suscitent de la part des autres communautés des reproches récurrents qui ne diffèrent guère selon le pays : ils sont souvent perçus comme enclins au communautarisme, au népotisme, et prompts à trahir.
Les conflits classiques qui, dans leurs zones de transhumance, opposent périodiquement ces éleveurs nomades aux agriculteurs sédentaires, ainsi que le fait qu'ils soient, davantage que la plupart des autres ethnies, présents dans un nombre important de pays (et sont donc au contact de populations diverses), contribuent sans doute à expliquer cette réputation trop souvent entretenue par les populations auxquelles les opposent des différends.
Communautés dans le monde
Origines
Tradition
Les traditions orales ou écrites recueillies auprès des Peuls mentionnent pour la plupart autour d’une union entre Oqba, l’Arabe, et Tadjimaou, la princesse noire. Ces deux personnages auraient engendré quatre enfants, les ancêtres des quatre clans peuls : Barry (ou Sangare), Diallo (ou Kane), Sow (ou Sidibe), Bah (ou Balde ou Diakhite). Cette origine est tout à fait incertaine, Oqba s'identifiant probablement à Oqba ibn Nafi, le conquérant arabe mort en 683, qui n'a jamais traversé la totalité du Sahara. Cette ascendance permet en revanche aux Peuls islamisés de revendiquer des racines arabes prestigieuses[14].
Théories multiples
L'origine (ou les origines) des Peuls a donné naissance à une littérature abondante de qualité inégale, qu'il est difficile de résumer.
L'historien Cheikh Anta Diop a lié les Peuls à l'Égypte, comme il l'a fait pour les Sérères et Wolofs[26]. La théorie de Diop a cependant été réfutée par d'autres chercheurs dont le professeur Russell G. Schuh[27],[28],[29].
André Arcin les fait venir de la lisière nord du Sahara jusque dans le sud marocain. Tauxier préconise la route du sud de l'Algérie et les ferait émigrer de leur pays d'origine (moyenne Égypte) vers le VIe siècle avant l'ère chrétienne. Béranger-Féraud, Verneau et d'autres indiquent, également la route septentrionale comme étant celle de leurs migrations[30]. Le Sahara est exclu car jugé comme étant un pays désertique et inhabitable, difficile à traverser pour une population dont l'économie principale est l'élevage. Seul Motel les fait venir du sud Sahara[31]. Cette première migration d'est en ouest leur fera atteindre la vallée du fleuve Sénégal vers le VIIIe siècle de notre ère (Lhote).
Apport des études génétiques
Une étude génétique publiée en 2019[32] montre que les populations foulanis sont issues d'un mélange entre un groupe d’Afrique de l’Ouest et un groupe ayant à la fois des ancêtres européens et nord-africains. Ainsi, les Peuls de Ziniaré au Burkina Faso ont des fractions d'ascendance d'origine d'Afrique de l'Ouest à raison de 74,5 %, 21,4 % d'origine européenne et 4,1 % d'origine est-africaine. Une structure génétique similaire est observée parmi tous les autres groupes de Foulanis, à l'exception des Foulanis de Gambie. Ce mélange doit probablement être associé aux pratiques d'élevage adoptées dans le passé, car il a entraîné des adaptations génétiques dont notamment l'élément de contrôle du gène LCT permettant aux porteurs de digérer le lactose tout au long de leur vie. Cet allèle T-13910 LP chez les individus peuls analysés dans cette étude repose sur un fond européen d'haplotype ce qui exclut une évolution parallèle convergente[32].
L'identification des fragments d'ascendance spécifiques flanquant des segments de type européen conforte l'opinion selon laquelle l'ascendance européenne dans les génomes peuls est couplée à leur composante nord-africaine. Ces deux ancêtres génétiques se sont mélangés dans le nord-ouest du continent africain depuis au moins 3 000 ans. Une étude de 2018 a établi un lien entre la diffusion de populations par le détroit de Gibraltar aux migrations néolithiques et au développement néolithique en Afrique du Nord. Cette ascendance mixte d'origine gibraltarienne avait déjà été observée dans le pool génique mitochondrial des Foulanis qui relie les Foulanis au sud-ouest de l'Europe à partir des haplogroupes d'ADNmt H1cb1 et U5b1b1b[32]. La lignée paternelle R1b-V88 montre des estimations d'âge similaires indiquant le moment où les premiers éleveurs se sont installés dans la ceinture Sahel / savane[33].
L'étude déduit que la proportion de non-Africains chez les Foulanis a été introduite par le biais de deux mélanges datés pour le premier entre 1500-2138 ans et le second entre 237–368 ans. Le premier mélange supposé entre les ancêtres ouest-africains des Peuls et un groupe nord-africain ancestral a probablement favorisé, voire catalysé des changements dans le mode de vie de ces populations et a par conséquent conduit l'expansion des Peuls dans la ceinture Sahel / savane. Ce point de vue est compatible avec les traces du pastoralisme dans la savane ouest-africaine (nord du Burkina Faso, en particulier), commençant il y a environ 2 000 ans selon des données archéologiques. Le deuxième événement d'adjonction remonte à une époque plus récente, provenant d'une source de l'Europe du Sud-Ouest. Cet événement peut probablement être expliqué par un flux de gènes ultérieur entre les Foulanis et des populations nord-africaines (qui supportent des proportions de mélanges avec les Européens en raison du flux de gènes par Gibraltar) ou encore par l'expansion coloniale européenne en Afrique[32].
À l'ouest région du Sahel
- VIe siècle av. J.-C. ? - VIIIe siècle apr. J.-C. : arrivée de pasteurs peuls dans le Hodh de la Mauritanie actuelle en passant par le nord du Sahara encore vert (gravures rupestres du Tassili et du Hoggar).
- IXe siècle : dans la légende Foutanke, le royaume des Dia Ogo.
Tous les historiens soulignent l'importance de cette population en Afrique de l'Ouest qui se sédentarise et créée de puissants royaumes théocratiques tremplins pour la guerre sainte ou djihad, contre les animistes et les peuples jugés moins musulmans (Haoussas) : le Macina au Mali, le royaume du Fouta-Toro au Sénégal et le Fouta-Djalon en Moyenne-Guinée, l'Empire de Sokoto fondé par le modibbo Ousmane dan Fodio au Nigéria et les sultanats et lamidats du Nord Cameroun[34].
De l'autre côté du fleuve Niger
- XIe siècle : fondation de l'empire almoravide englobant le Maroc et la Mauritanie, les tribus peules qui s'étaient converties mais avaient abandonné la religion musulmane, furent contraintes de se convertir à nouveau. Persécutées par ces religieux, elles durent fuir vers le sud ; un premier groupe trouva refuge en Sénégambie et au Boundou, un second groupe se réfugia dans le Bas-Sénégal, créant par la suite l'empire du Tekrour, futur Royaume du Fouta-Toro. Le troisième groupe gagna le Macina et fut rejoint par les tribus foulas qui s'étaient dirigées vers le Nil[35].
- XIIe siècle : des Peuls refusant l'islamisation de l'empire du Ghana, sous la pression des Almoravides, fuient vers la région du Fouta-Djalon, puis vers le Macina et enfin au nord du pays Haoussa.
- XIIIe siècle : dans le Tekrour, d'autres Peuls se mêlent surtout aux Sérères et aux Tekrouri. Les Peuls nomadisent sur un axe ouest-est et atteignent les régions du Fouta-Djallon en Guinée, jusqu'à atteindre les régions du lac Tchad et le nord du Cameroun. C'est ainsi qu'ils se sont étendus sur une bonne partie de la bande sahélienne, du Sénégal au Soudan.
- XIIIe siècle - XIVe siècle : l'Empire du Mandé intègre dans la paix des ethnies aussi diverses que sont les Touaregs, Wolofs, Bambara, Songhaï, Tekrours, Dialonké, Malinké, Dogons, etc. Toutes ces populations ont adhéré à la Charte du Manden.
- XVe siècle : Sonni Ali Ber, empereur de l'Empire songhaï de Gao, grand maître du Soudan Occidental, rattache le Macina, territoire à majorité peule, à l'empire de Gao.
- XVIe siècle : Koli Tenguella dit Puli, à la fois Peul et Malinké, à la tête de son armée, repousse les Maures, soumet le du Royaume du Fouta-Toro après plusieurs tentatives, soumet également les Wolofs et les Sérères, annexe l'empire toucouleur (Tekrour), conquiert toutes les contrées s'étendant entre le Haut-Niger à l'est, le Bas-Sénégal au nord et à l'ouest, le Fouta-Djalon au sud[36]. Koly Tenguella une fois roi (Silatigui) du Fouta-Toro, installe sa dynastie, les Deniankobé.
Mouvements djihadistes et naissance d'États peuls
Durant le premier tiers du XIXe siècle, des changements particulièrement importants interviennent en Afrique de l'Ouest avec la mise en place de gouvernements musulmans à l'issue de luttes ouvertement prosélytes présentées comme des actions de djihad[37]. Ces djihad sont menés par des membres des élites intellectuelles et religieuses peules même s'il ne s'agit pas d'un phénomène ethnique[37].
Ces mouvements de réforme islamique (jihad) ont bouleversé l'ensemble du monde peul et ses voisins à partir du XVIIIe siècle et jusqu'au premier tiers du XIXe[37]. Les États qui en sont issus regroupent la majorité de la population peule couvrent de très vastes régions de la zone soudano-sahélienne[7].
Ainsi, des lettrés musulmans se sont posés en réformateurs-conquérants dans le Fouta Boundou (fin XVIIe siècle), premier l’État musulman déclaré comme tel, puis avec la création de l'imamat du Fouta-Djalon (1725)[37]. Ensuite, le djihad s’étendit jusqu’au Fouta Toro entre 1769 et 1776, ce qui aboutit à l’installation d’un autre imamat sur le fleuve Sénégal (1776)[37].
Imamat du Fouta-Djalon
Création de l'État théocratique du Fouta-Djalon en Moyenne-Guinée au XVIIIe siècle.
Arrivée de tribus maures arabisées Brakna et Trarza au Fouta-Toro, le Walo et le Cayor au XVIIIe siècle. Les troupes de Tashomba, appuyées de Marocains et de Hormans (métis de Marocains et de Noirs), mettent à sac le Fouta-Toro et renversent le régime des Deniankobé. Ils le remplacent par un régime maraboutique (tribus Zénaga). Guerres intestines entre les différents membres de la famille régnante, pillages et razzias fréquentes dans les villages agricoles, appauvrissent rapidement le pays. Mise en place de différents Syratiks au profit soit des Brakna, soit des Trarza. L'action des Maures dans cette région est un échec économique et social. Sous l'influence grandissante des tribus maraboutiques, retrait des Maures en 1786[38].
XVIIIe siècle - Les Dialloubé (pluriel de Diallo) gouvernent les Peuls du Macina[39]. Amadu Bari reçoit la bannière du djihad des mains du Toucouleur Usman dan Fodio, et le titre de cheikou[40].
Emirat de Liptako
Royaume du Boundou
Royaume du Fouladou
Royaume du Fouta-Toro
Empire de Sokoto
Emirat de Jelgooji
Emirat de l'Adamaoua
Empire Toucouleur
Empire du Macina
L'Empire peul du Macina (1818-1862), avec Amadu Bari à sa tête, conquiert Tombouctou, contrôle Jelgooji, Liptako, ainsi que le confluent du Sourou et de la Volta Noire au sud-ouest de l'actuel Burkina Faso. Le XIXe siècle voit les conversions de Sékou Amadou et cette islamisation leur permet d'avoir une certaine unité politique. Seuls les Peuls Bororos, Wodaabe « les bannis », en réchappent. Les « convertis » fondent alors un empire, l'Empire peul du Macina au Mali, le royaume peul et mandingue du Fouladou, en Guinée le Fouta-Djalon et au Nigeria l'Empire de Sokoto. Tous les États à part les deux Fouta, nés au XIXe siècle, ont été très éphémères, malgré cela c'est ce qui leur a permis durant ce siècle, d'établir une certaine unité des fulbé, ce qui n'avait jamais été le cas avant.
1811 - Les Peuls remportent une grande victoire sur les Gourmantché, à Dori. Dix ans plus tard, Ilorin, sur la côte du Bénin, devient un émirat peul, après la lutte menée par Mallam Alimi. En revanche battus à Kissi par les Touaregs en 1827, les Peuls doivent abandonner l'Oudalan, région située au nord-est du Burkina Faso.
1868 - Écrasement de l'État païen rival du Ngaabu (actuelle Guinée-Bissau) par al-hajj Umar puis Samory Touré.
Résistance peule durant la période coloniale
La colonisation est tardive (Haut-Niger 1854, le Fouta-Djalon en 1896, Rivières du Sud en 1866) et relativement brève (à peine 100 ans). Le gouverneur de la Guinée française est Faidherbe. D'emblée, les Peuls apparaissent aux yeux des Européens comme des Mahométans armés, au même titre que leurs voisins Maures et Touaregs.
Leur société extrêmement hiérarchisée parait dès l'abord, trop complexe aux yeux des Européens et difficile à percer (problème de la langue)[réf. nécessaire][41]. La France engage[Quand ?][42] une politique « diplomatique » et commerciale avec les différents États peuls indépendants.
À la création d'un Gouvernement général de l'Afrique-Occidentale française visant à harmoniser la politique française, les trois colonies concernées par le Fouta Djalon sont le Sénégal, le Soudan et la Guinée. On assiste dès lors à une résistance diplomatique : plusieurs traités sont signés[43], notamment le « traité de commerce et d'amitié » (1881) entre les Almamys et Bayol qui marque la première tentative directement impérialiste de la France à l'égard du Fouta-Djalon : principalement pour contrer les intérêts anglais dans la région de la Sierra Leone[44]. En signant des traités avec la France et l'Angleterre à la fois, en 1881, en leur refusant de ce fait l'exclusivité du commerce, les dirigeants du pays, les Almamys, affichent leur indépendance à l'égard des deux puissances impérialistes et d'un même mouvement, tentent de les neutraliser : d'abord en rejetant la version française du traité[45].
La récusation de toute notion de contrôle et d'ingérence, le refus opiniâtre de laisser une puissance étrangère empiéter sur la souveraineté de l'État, non seulement en 1881, mais également lors de tentatives expansionnistes ultérieures (colonne Plat 1887-1888, colonne Levasseur 1888, colonne Audéoud 1888)[46], la mission Briquelot en 1888-1889, à l'initiative d'Archinard, tente vainement de convaincre les Almamys des intentions pacifiques de la France.
Cette résistance s’appuie sur un concept lapidaire mais clair : « Le Fuuta Djaloo doit être aux Peuls et la France aux Français. » Ce principe nationaliste réitéré prive la France d'une base « légale » d'intervention.
Le rejet par les Almamys de toute notion de protectorat s'accompagne d'une résistance militaire, consistant à entraver l'expansion de la France au Soudan en s'alliant à Samory Touré, le principal adversaire de la France. En cela, la France se révéla à peu près impuissante à peser sur les relations entre Samory Touré et les Almamys. D'autant plus que, depuis l'autonomie des Rivières du Sud (), celle-ci mène une politique d'expansion pacifique à l'égard du Fuuta Djaloo, remettant à plus tard l'éventualité d'une occupation militaire, tandis qu'Archinard multiplie les lettres d'apaisement à l'égard des Almamys.
Pour préserver sa souveraineté, le Fuuta Djaloo sait aussi habilement exploiter les conflits franco-français et franco-anglais. Jusqu'au décret du instituant le Gouvernement général de l'Afrique occidentale française, explicitement voulu pour harmoniser la politique française, trois colonies sont concernées par le Fouta Djalon : le Sénégal, le Soudan et la Guinée. Chacune d'entre elles active sa propre politique à l'égard de l'état peul encore indépendant. Frictions et conflits divisent en permanence les trois colonies.
Si les Almami font parfois preuve de naïveté en politique, ils savent très bien tirer avantage de ces mésintelligences. Ils instrumentalisent les contradictions franco-françaises pour retarder la mainmise sur leur pays. On assiste également chez le « petit peuple » peul à une résistance sociale : comme le « rachat » de captifs ou l'interception des caravanes - la politique de la France à l'égard des captifs étant faite d'ambiguïté. Elle consiste en particulier à inciter les captifs à s'enfuir de chez leurs propriétaires peuls, pour les détourner à son propre profit.[pas clair] Beeckman : Il serait indispensable de prévenir aux commandants du Soudan de ne pas recevoir aussi facilement les fugitifs du Fuuta Djallon qui servent à peupler les villages de liberté au détriment de notre nouvelle possession, qui a cependant besoin de tous ses bras pour la culture[47].
Las, les Français fourbissent le concept de féodalité, inadapté mais commode, paradigme négatif pour stigmatiser, ouvrir le procès du régime, justifier l'intervention militaire et l'occupation du pays[Lequel ?], en se servant des rancœurs et des frustrations du petit peuple opprimé[Par qui ?][48]. Le , les Français défont Bokar Biro, le neveu de Soriya Ibrahima, qui lui avait succédé après sa mort en (alternance Amadu / Bokar Biro, 1891-1896) à la bataille de Porédaka[49].
Contrairement aux autres colonies françaises, ils[Qui ?]ne seront pas intégrés dans l'armée. Officiellement pour des raisons « physiques »[50]. La résistance peule est documentée sur le plan historique par un certain nombre d'études et d'ouvrages, textes, lettres manuscrites par des Peuls eux-mêmes et archivées, aux Archives nationales du Sénégal (ANS) et en France[51],[52]. En Guinée, le référendum du sonnera la fin de la période coloniale.
Post-indépendance
À partir des années 1960, la montée des nouvelles générations non soumises à l'esclavage, permettent aux jiyaabe et aux descendants des Bourouré d'autrefois, de jouer un rôle politique indéniable dans différents pays. Au Sénégal, Mamadou Dia, élu président du Conseil de Gouvernement en , le demeure après la proclamation de l'indépendance du pays en 1960, mais, accusé d'une tentative de coup d'État en 1962, il est destitué. Dès 1960, Ahmadou Ahidjo, se trouva à la tête du Cameroun. C'est aussi le temps de brefs sursauts nationalistes. De 1983 à 1987, Thomas Sankara préside aux destinées du Burkina Faso. En Guinée, les opposants peuls au régime politique dictatorial de Sékou Touré sont persécutés, entraînant au début des années 1970 la fuite d'un million de Peuls. Aujourd'hui, la diaspora peule concerne les États-Unis, le Canada, l'Angleterre, la France, le Portugal, les îles du Cap-Vert et les pays africains limitrophes.
Guerre du Sahel
Au Mali, en 2012, des Peuls du Hayré et du Seeno, à l’est de Mopti, ont rejoint le Mouvement pour l’unicité et le jihad en Afrique de l’Ouest (Mujao) dans le seul but de faire le djihad[53].
Les Peuls sont aujourd'hui presque tous musulmans.
La conversion des Peuls est tardive par rapport à l'islamisation du Soudan médiéval[54]. Une partie des Peuls d'Afrique de l'Ouest a en revanche été ensuite parmi les propagateurs de l'islam sunnite, notamment avec des personnages de l'ethnie Tekrour (TooroBé), comme Usman dan Fodio (1754 - 1817), fondateur de l'empire de Sokoto (Dèm du Sokoto), Sékou Amadou (1776- appr. 1844), fondateur de l'empire peul du Macina, Modibbo Adama (1786-1844), fondateur du royaume peul de l'Adamawa.
Sur le plan socio-géographique, les Peuls conquérants pratiquant le djihad sont souvent des familles peules sédentaires (en particulier en Afrique de l'Ouest) et métissées avec les populations avec lesquelles ils cohabitent.
Création d'écoles coraniques, propagateurs de confréries soufies, soufisme[55].