Français
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Le français est une langue indo-européenne de la famille des langues romanes dont les locuteurs sont appelés francophones. Elle est parfois surnommée la « langue de Molière ».
Cet article concerne la langue française. Pour les autres significations, voir Français (homonymie).
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Français | |
Langues filles | Créoles et métchif d'un point de vu lexical |
---|---|
Pays | voir francophonie |
Nombre de locuteurs | 321 millions[1],[2] (2022) LM : 81 millions[3] |
Nom des locuteurs | francophones |
Typologie | SVO, flexionnelle, accusative, syllabique, à accent d'intensité |
Classification par famille | |
Statut officiel | |
Langue officielle | 28 pays : Belgique Bénin Burkina Faso Burundi Cameroun Canada République centrafricaine Comores République du Congo République démocratique du Congo Côte d'Ivoire Djibouti France Gabon Guinée Guinée équatoriale Haïti Luxembourg Madagascar Monaco Niger Rwanda Sénégal Seychelles Suisse Tchad Togo Vanuatu et de nombreuses organisations internationales, notamment : |
Régi par |
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Codes de langue | |
IETF | fr
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ISO 639-1 | fr
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ISO 639-2 | fra, fre
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ISO 639-3 | fra
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Étendue | Langue individuelle |
Type | Langue vivante |
Linguasphere | 51-AAA-i
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WALS | fre
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Glottolog | stan1290
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Échantillon | |
Article premier de la Déclaration universelle des droits de l’homme :
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Ils sont doués de raison et de conscience et doivent agir les uns envers les autres dans un esprit de fraternité. |
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Carte | |
Répartition du français et des créoles à base lexicale française dans le monde.
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Le français est parlé, en 2023, sur tous les continents par environ 321 millions de personnes[5],[2] : 235 millions l'emploient quotidiennement et 81 millions[3] en sont des locuteurs natifs. En 2018, 80 millions d'élèves et étudiants s'instruisent en français dans le monde[6]. Selon l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), il pourrait y avoir 700 millions de francophones sur Terre en 2050[7].
Le français est la cinquième langue parlée au monde après l'anglais, le mandarin, le hindi et l'espagnol. Elle est également la deuxième langue apprise sur le globe, la troisième langue des affaires et du commerce, la quatrième langue employée sur Internet[8]. Le français se classe deuxième parmi les langues étrangères les plus fréquemment enseignées à travers le monde[7]. Il est également la quatrième langue utilisée sur internet après l'espagnol, le mandarin et l'anglais[9], langue dont le vocabulaire a été fortement enrichi par le français.
Dans le monde, 27 États ont le français comme langue officielle. C'est une des six langues officielles ainsi qu'une des deux langues de travail de l'Organisation des Nations unies. Le français est une langue officielle ou de travail de nombreuses organisations gouvernementales internationales, parmi lesquelles l'Union postale universelle ou les trois autorités mondiales de régulation du système métrique. Il est aussi langue officielle ou de travail de nombreuses organisations gouvernementales régionales, telles que l'Union africaine ou l’Union européenne, et est aussi langue officielle ou de travail de nombreuses organisations non gouvernementales internationales, comme le Comité international olympique ou le Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.
L'histoire du français et des francophones est celle de la rencontre et de l'échange entre de nombreux peuples. Le français est une variété de la langue d'oïl, un groupe de langues romanes parlées originellement dans la partie septentrionale du domaine gallo-roman, sur le territoire des actuelles France, Suisse et Belgique. Les langues gallo-romanes résultent de l'évolution, sous l'influence de langues germaniques, tel que le vieux-francique des Francs, du latin populaire parlé en Gaule par les Gallo-Romains. Ces derniers formaient un ensemble de peuples d'origines principalement celtes qui furent progressivement romanisés à la suite de la conquête romaine de la région, terminée aux alentours de En 843, l'historien franc Nithard, petit-fils de Charlemagne, produit ce qui est considéré comme le premier texte connu en langue française. Il s'agit d'une chronique qui retranscrit les serments d'alliance, prononcés à Strasbourg l'année précédente, par Louis le Germanique, premier souverain allemand.
Durant le Moyen Âge européen, en particulier entre le Xe et le XIIIe siècle, alors que le système de déclinaisons de l'ancien français s'effondre, les langues d'oïl commencent à se diffuser hors de leur domaine d'origine du fait des invasions normandes des îles Britanniques, du sud de l'Italie ou bien des croisades qui, en établissant des États latins au Levant, font du français une base de la lingua franca méditerranéenne. En 1539, par l’ordonnance de Villers-Cotterêts, le moyen français, langue maternelle des dynasties capétiennes, devient une langue juridique et administrative en France. À la même période, il commence à se diffuser plus massivement hors d'Europe, d'abord en Amérique, puis en Afrique, en Asie et en Océanie, sous l'effet de l'expansion des empires coloniaux français puis belges. À partir du XVIIe siècle, dans les océans Atlantique, Indien et Pacifique, les déportations de populations pratiquées par les empires européens vers leurs colonies amènent, dans un contexte principalement d'esclavage, à la formation de nombreux créoles à base lexicale française.
En 1794, par le décret révolutionnaire du 2 thermidor an II et malgré le fait qu'il ait été, sous l'Ancien Régime, la langue des cours royales et princières européennes, le français classique, langue des Lumières, devient la seule langue officielle de la Première République française[10]. Une des particularités du français se trouve dans le fait que son développement et sa codification ont été en partie l'œuvre de groupes intellectuels, comme la Pléiade, ou d'institutions, comme l'Académie française. Le français est ainsi souvent considéré comme une langue « académique ». À partir du XIXe siècle, et malgré quelques réformes au cours des siècles suivants, son orthographe codifiée commence à se figer. Elle est considérée comme transparente dans le sens de la lecture, mais opaque dans le sens de l'écriture. Au cours du XXe siècle, le français devient une langue d'envergure mondiale en même temps qu'il s'émancipe de l'Europe : à partir de ce siècle le nombre de francophones vivant hors d'Europe dépasse le nombre de locuteurs sur le continent d'origine de la langue.
Entre le et le et sous l'impulsion de ceux qui deviendront les « cinq pères fondateurs de la Francophonie » — Léopold Sédar Senghor, poète, écrivain et premier président de la république du Sénégal, Habib Bourguiba, avocat et premier président de la République tunisienne, Hamani Diori, professeur et premier président de la république du Niger, Norodom Sihanouk, roi du Cambodge et Jean-Marc Léger, écrivain et journaliste canadien — a lieu, dans la salle des séances de l'Assemblée nationale du Niger, la conférence de Niamey. Celle-ci, une des premières conférences réunissant les gouvernements des états francophones, établit l'Agence de coopération culturelle et technique, le premier organisme intergouvernemental francophone, et jette ainsi les bases pour la création d'une Organisation internationale de la francophonie (OIF) qui réunit les peuples partageant la langue française. En 1988, en commémoration de cet évènement, les États membres de l'Organisation font du 20 mars la Journée internationale de la francophonie. En 1989, ont lieu au Maroc les premiers jeux de la Francophonie qui réunissent pour la première fois les athlètes de la communauté francophone autour de la langue qu'ils partagent. En 1997, à Hanoï, capitale du Viêt Nam, les États francophones adoptent la Charte institutionnelle de la Francophonie qui sera complétée en 2005 à Antananarivo, capitale de Madagascar, par la Charte de la Francophonie. Ces deux chartes présentent l'importance du multilinguisme pour le monde francophone, les valeurs de solidarité, d'égalité et de fraternité entre les peuples qui doivent être véhiculées par la langue française, vecteur de progrès et de modernité, ainsi que le rôle actif que doivent exercer les francophones pour la préservation de la diversité linguistique et culturelle. En 2010, l'Organisation des Nations unies déclare que le 20 mars de chaque année sera observée à travers le monde la Journée de la langue française en souvenir de la conférence de Niamey. Les organisations francophones proposent autour de cette date des semaines d'échanges et de discussions souvent appelées « Semaine de la langue française et de la francophonie ».
La langue française est un attribut culturel souverain pour de nombreux peuples et États comme en France où depuis 1992 « la langue de la République est le français » ou au Québec où depuis 1977 elle « permet au peuple québécois d’exprimer son identité ». Elle est également le principal véhicule des cultures francophones dans le monde et le moyen principal d'expression de leurs pensées. La langue, parfois surnommée « langue de Molière[11] », ne cesse de s'enrichir que ce soit de façon formelle, par des décrets par exemple, mais aussi de façon informelle.
Formation du français
La majorité du fonds lexical français provient du latin (en tant que langue-mère) ou bien est construit à partir des racines gréco-latines. De nombreux termes possèdent un doublon de même étymologie, l'un ayant évolué à travers les siècles à partir du latin populaire tandis que l’autre est emprunté directement au latin classique : métier/ministère, façon/faction, raide/rigide, froid/frigide, frêle/fragile, rançon/rédemption, raison/ration, poison/potion, chance/cadence, etc. Souvent l'invention de mots à partir d'un mot bien français passe par un emprunt à sa forme en latin classique : mère/maternel, frère/fraternel, cheveu/capillaire, foi/fidèle, œil/oculaire, sûr/sécurité, siècle/séculaire, etc. Un changement de paradigme[12] en étymologie romane remplace la méthode traditionnelle fondée sur les données du latin écrit par celle de la méthode comparative, dans le but de rebâtir l'étymologie proto-romane du noyau commun du lexique héréditaire roman, nuançant ainsi l'idée selon laquelle « la majorité du fonds lexical français provient du latin »[Note 1].
On ignore jusqu'à quel point la langue gauloise a pu influencer le français. Son apport lexical se réduirait à une centaine de mots, tels que char/charrue, mouton, crème, dont une partie proviendrait d'emprunts du latin au gaulois. L'étymologie de ces expressions n'est d'ailleurs pas toujours assurée. Quant à son influence sur la syntaxe et la prononciation, elle est également indéterminée.
Le francique, en tant que substrat, a laissé également quelques mots importants (gris, blanc, blond, bleu, etc.) et aurait fortement influencé la prononciation du protofrançais puis des langues d'oïl.
Les termes utilisés au Moyen Âge pour désigner les langues d'oïl dans leur ensemble sont franceis (dès le Xe siècle) puis françois et roman (essentiellement jusqu'au XIIe siècle). Il est notable que les termes normand, picard, lorrain, bourguignon n'apparaissent jamais dans les textes médiévaux avant le XIVe siècle pour désigner les variantes l'ancien français, attestant du sentiment d'unité linguistique du Nord du royaume durant la période médiévale. Ainsi, l'historien normand Wace, dans son Roman de Rou, utilise concurremment les termes de franceis et rumanz, mais pas celui de « normand »[13] ; de même, le romancier médiéval Chrétien de Troyes, d'origine champenoise, désigne sa langue comme la « langue françoise »[14]. Le terme de « français » n'est donc nullement limité à la langue du seul domaine royal. De la même façon, si le terme de « Français » désigne essentiellement les habitants des terres situées sous le contrôle direct du roi par opposition aux Normands, Bourguignons ou Picards, cet usage n'est pas exclusif ; ainsi, la Tapisserie de Bayeux désigne les troupes du duc de Normandie parties conquérir l'Angleterre en 1066 sous le terme latin générique de Franci (les Français) et non de Normanni, ces troupes étant originaires de tout le Nord du royaume. L'emploi de ces usages concurrents n'est pas sans créer des ambiguïtés dans les textes médiévaux ; ainsi, Roger Bacon, désignant le français sous le terme latin de lingua Gallicana (traduisible par « langue française »), indique qu'elle est parlée à la fois par les Picards, les Bourguignons, et les Français "purs" (puros Gallicos), c'est-à-dire les Français du domaine royal[15], par opposition à un terme plus générique de Gallicos, Français, comprenant l'ensemble de la zone linguistique d'oïl, ou plus généralement tous les habitants du royaume. Il indique que les mots des uns « horrifient » les autres, donnant une idée des divergences entre les différents dialectes de l'ancien français.
Le français parlé aujourd'hui tire son nom de cet ancien franceis, langue-toit regroupant l'ensemble des dialectes d'Oïl (franceis [frãntsëé] → françoys/françois [frãswé] → français [frãsé]). Le terme de « langues d'oïl », apparu au XIIIe siècle (l'une de ses premières occurrences figure chez Dante[16]) ne se répand véritablement qu'au XIVe siècle, époque où la variante d'Île-de-France l'emporte sur les variantes régionales au point que le terme de français finit par ne désigner que celle-ci. Cette variante francilienne est parfois désignée par le terme francien, inventé en 1889 par Gaston Paris, un linguiste français, pour le distinguer des autres variantes de la langue d'oïl. Ces autres variantes se sont progressivement affaiblies au fur et à mesure que le français prenait du prestige, en grande partie également en raison de leur proximité avec celle-ci. À l'inverse, malgré un recul encore constaté, les langues ou dialectes romans non d'oïl (variétés de l'occitan, franco-provençal/arpitan, royasque, ligure, corse) et les langues non romanes (breton, flamand, francique lorrain, alsacien, basque) persistent ou résistent mieux en raison de leur plus grand éloignement avec le français. Aujourd'hui, la plupart des langues d'oïl autres que le français sont en voie de disparition.
Le français s'est enrichi du contact avec les autres langues d'oïl (notamment du normand pour ce qui est des termes maritimes), mais aussi des autres langues parlées sur le territoire français, en particulier de l'occitan. L'influence d'autres langues, dont l'arabe, l'italien, le turc, les langues autochtones et créoles d'outremer et des anciennes colonies françaises a été déterminante dans l'évolution du français, de même que le sont aujourd'hui les apports venus de l'anglais et des langues natives des immigrants des pays voisins ou plus lointains, mais aussi des pays francophones.
Emprunts plus récents, néologismes et évolution de l'orthographe
Les emprunts plus récents à d'autres langues sont assez nombreux : d'abord à l'anglais (même anciens : nord, sud), puis à l'italien, aux autres langues romanes, aux langues germaniques tels que l'allemand ou le néerlandais (ainsi boulevard vient du hollandais ou du flamand bolwerk). L'arabe a fourni, et fournit encore quelques mots : chiffre, coton, amalgame, amiral, sucre, alcool, algèbre, toubib, bled, etc.[17].
La linguiste Henriette Walter estime à moins de 13 % (soit 4 200 mots[18]) la part des mots d'origine étrangère dans la langue française courante parmi les 35 000 mots que comporte un petit dictionnaire d'usage. Ces mots viennent pour 1 053 d'entre eux de l'anglais, 698 de l'italien, 544 du proto-germanique, 481 des anciennes langues gallo-romanes, 215 de l'arabe, 164 de l'allemand, 160 du proto-celtique, 159 de l'espagnol, 153 du néerlandais, 112 du persan et du sanskrit, 101 des langues amérindiennes, 89 de diverses langues asiatiques orientales (dont le chinois ou le japonais, mais aussi certaines langues môn-khmer), 56 de diverses langues chamito-sémitiques, 55 de langues slaves ou baltes et 144 d'autres langues diverses (dont les langues malayo-polynésiennes ou langues nigéro-congolaises)[19].
Toutefois, cette proportion relativement faible d'emprunts dans le vocabulaire courant ne rend pas compte de la pénétration de termes en anglo-américain dans le domaine des affaires, où les États-Unis exercent une forte domination, domaine par ailleurs très stratégique[20].
De nombreux néologismes ont également été formés à partir de mots grecs ou latins. Peuvent être cités mètre, gramme, phobie et leurs dérivés (kilomètre, milligramme, etc.), ainsi que des mots plus récents comme cinéma, logiciel, domotique, etc.
D'autres sont des calques ou des adaptations de l'anglais, par exemple baladeur inventé pour remplacer l'anglais walkman et discman.
De nombreux néologismes ont également été inventés pour se substituer aux mots anglais, comme :
- informatique, inventé en 1962, mot-valise formé par contraction des deux mots information et automatique ;
- pourriel, pour remplacer spam[Note 2].
Certains néologismes proviennent d'Amérique du Nord, où l'Office québécois de la langue française est très actif :
- courriel, pour remplacer e-mail[Note 3] ;
- clavardage, pour remplacer chat[Note 4] ;
- égoportrait, pour remplacer selfie[Note 5] ;
- baladodiffusion, pour remplacer podcasting[Note 6] ;
- bouquineur, pour remplacer liseuse[Note 7] ;
- livrel, pour remplacer livre numérique[Note 8].
Certains néologismes sont plutôt utilisés dans les provinces francophones du Canada et leur diffusion en France ou ailleurs peut être plus ou moins grande.
À l'époque de la conquête de la Gaule par les armées romaines de Jules César en , excepté l'Aquitaine de langue proto-basque, la Gaule était majoritairement peuplée de tribus gauloises qui parlaient des langues celtiques certainement apparentées et probablement mutuellement compréhensibles. Il n'existait donc pas une mais plusieurs langues gauloises (exemples : le belge, le gaulois transalpin, le gaulois cisalpin), qui n'étaient que très rarement écrites. La langue des Romains, le latin, connaissait l'écriture, et en tant que langue de l'autorité et langue de prestige, le latin vulgaire proche des Gaulois fut peu à peu adopté par tous au cours des siècles qui suivirent la conquête du pays en 51 av. J.-C.
La version romane de 843 des Serments de Strasbourg de 842 est le premier texte écrit en langue d'oïl, dérivée du Bas latin et remodelée à la suite de l'établissement des Germains, principalement des Francs (d'où l'appellation du français), dans le nord de la Gaule. La première mention de l'existence d'une langue romane date de 813, lors du Concile de Tours, qui la nomme lingua romana rustica, « langue romane rustique ». Il faut attendre vers 880 pour voir apparaitre le premier texte littéraire en langue française (dans une variante vraisemblablement picarde), la Séquence de sainte Eulalie.
La situation linguistique de la France est par ailleurs mal connue avant le Xe siècle. À partir de cette période cependant, le morcellement linguistique du territoire est bien attesté, avec différentes langues régionales suivantes :
- la langue d'oïl ou français, dans le nord (dont sont également issus entre autres le picard, le normand, l'angevin, le champenois), langue plus influencée par les langues germaniques que les autres idiomes de France ;
- l'occitano-roman (occitan ou langue d'oc et catalan) dans le sud avec le limousin, l'auvergnat, le languedocien, le gascon, le provençal, le vivaro-alpin : les parlers de cette région, qui baignent durant des siècles dans la culture romaine et ont conservé le droit romain, se rapprochent davantage du latin (« oc » et « oïl » signifiant « oui ») ;
- le francoprovençal (ou arpitan) avec par exemple les parlers de Savoie, lyonnais, dauphinois autour de Grenoble, forézien (région de Saint-Étienne), de Suisse romande aussi.
La période qui s'étend de la fin du XIe siècle au début du XIVe siècle correspond à une période de rayonnement du français médiéval. Le français devient une langue internationale, parlée dans toutes les cours d'Europe, ce qui influença toutes les langues européennes. Elle devient une « lingua franca », les lois sont rédigées en français, la langue de la diplomatie est le français.
Le français, sous sa forme dialectale normande, est introduit en Angleterre dans le sillage de la conquête de ce pays par Guillaume le Conquérant en 1066, et son usage y durera plus de trois cents ans. Le vocabulaire anglais en conserve un important héritage : 50 % à 60 % du contenu lexical anglais provient de langues d'oïl de façon générale, principalement des dialectes de Normandie et d'Île-de-France[21]. On dit qu'à cette époque le français était plus utilisé en Angleterre qu'en France[22],[23],[24].
Dès le XIIe siècle, le français a une influence dans la littérature médiévale italienne.
La langue française commence à prendre de l'importance dès 1250, lorsque Saint Louis commande une traduction de la Bible en français.
À la fin du XIIIe siècle, c'est en langue d'oïl que le chroniqueur vénitien Martino Canal rédige sa Chronique des Vénitiens et assure, que « la langue française court le monde[25]. »
Vers 1256, le célèbre philosophe et chancelier florentin Brunetto Latini (1220-1294) écrit en langue française son Livre du Trésor et s'en explique en déclarant que c'est là « la parlure plus délictable et commune à toutes gens[26]. »
C'est au XIIIe siècle qu'apparurent des œuvres littéraires en français. En 1296 ou 1298, Marco Polo dicte ses récits de voyages en français dans la prison de Gênes[27],[28].
Au Moyen Âge, les devises royales étaient le plus souvent en français, par exemple celle du prestigieux Ordre de la Jarretière : « Honi soit qui mal y pense » et celle de la monarchie britannique : « Dieu et mon droit ». La devise des Pays-Bas est « Je maintiendrai ».
En 1346, pendant la guerre de Cent Ans, à Crécy, Édouard III roi d'Angleterre ne connaît pas d'autre langue que le français, comme son adversaire le roi de France[29]. En 1362, l'anglais remplace le Law French en tant que langue officielle des tribunaux via l'acte des tribunaux anglais de 1362[30]. Le discours judiciaire peut désormais être compris de tous et non la seule noblesse. La même année, l'anglais commence à être utilisé au Grand Conseil[31]. C'est en 1385 que l'anglais remplace officiellement le français dans les grammar schools[32]. Le français laisse ainsi l'anglais reprendre sa place en Angleterre.
Le Catholicon (du grec Καθολικόν, universel) est le premier dictionnaire trilingue rédigé en breton, français et latin. Il est ainsi l'un des premiers dictionnaires de breton et de français[33]. Ses six mille entrées furent rédigées en 1464 par Jehan Lagadeuc et imprimées par Jehan Calvez le à Tréguier à l'initiative de Maitre Auffret Quoatqueveran, chanoine de Tréguier.
À Aoste est rédigé en 1532 le premier acte notarié en français[34]. Dans le contexte des États de Savoie, les procès-verbaux officiels de l'Assemblée des États, puis du Conseil des Commis, passent du latin au français dès 1536, soit trois ans avant la France[35],[36],[37].
C'est en 1539 que débute officiellement la francisation de la France avec la proclamation de l'ordonnance de Villers-Cotterêts, signée par François Ier : elle impose le français comme langue du droit et de l'administration en France, en remplacement du latin. Cependant[22], il ne faut pas en conclure que tous les Français parlent cette langue : les historiens estiment que 10 % à 20 % de la population parle la langue du roi au XVIe siècle[38]. Bien que l'ordonnance soit relativement longue avec ses 192 articles[39], seuls les articles 110 et 111 concernaient la langue :
Texte original :
- 110. Que les arretz soient clers et entendibles et afin qu'il n'y ayt cause de doubter sur l'intelligence desdictz Arretz, nous voullons et ordonnons qu'ilz soient faictz et escriptz si clerement qu'il n'y ayt ne puisse avoir aulcune ambiguite ou incertitude, ne lieu a en demander interpretacion.
- 111. Nous voulons que doresenavant tous arretz, ensemble toutes aultres procedeures, soient de noz courtz souveraines ou aultres subalternes et inférieures, soient de registres, enquestes, contractz, commissions, sentences, testamens et aultres quelzconques actes et exploictz de justice ou qui en deppendent, soient prononcez, enregistrez et delivrez aux parties en langaige maternel francoys et non aultrement.
En français moderne :
- 110. Que les arrêts soient clairs et intelligibles, et afin qu'il n'y ait pas de doutes sur la compréhension desdits arrêts, nous voulons et ordonnons qu'ils soient faits et écrits si clairement, qu'il n'y ait ni ne puisse avoir aucune ambigüité ou incertitude, ni lieu à demander interprétation.
- 111. Nous voulons donc que dorénavant tous arrêts, et ensemble toutes autres procédures, qu'il s'agisse de nos cours souveraines ou autres subalternes et inférieures, des registres, enquêtes, contrats, testaments et autres quelconques actes et exploits de justice ou qui en dépendent, soient prononcés, enregistrés et délivrés aux parties en langage maternel français et non autrement.
En 1549, Joachim Du Bellay écrit La Défense et illustration de la langue française.
Au long du XVIIe siècle, le français s’impose comme langue scientifique et comme langue d'enseignement. En 1606, publication post mortem du premier dictionnaire de la langue française « Trésor de la langue française tant ancienne que moderne » de Jean Nicot. Le Discours de la méthode (1637) de René Descartes constitue une étape importante car il s'agit d'un des premiers essais philosophiques écrits en français et non en latin comme les Méditations sur la philosophie première. En réalité, René Descartes avait été censuré dans ses Méditations métaphysiques ; il avait donc réécrit son livre et l’avait publié sous le nom Discours de la méthode, en français, sachant que les élites ne liraient pas son livre car écrit en langue vernaculaire tandis que les lettrés ouverts à ses idées pourraient le lire sans craindre la menace de la censure.
Enfant du latin, le français le remplace en tant que langue internationale au XVIIe siècle avant de laisser à son tour sa place à l'anglais depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. La cause principale de cette hégémonie française tient à la puissance de l'État français à l'époque. En 1685, Pierre Bayle peut ainsi écrire que le français est « le point de communication de tous les peuples de l'Europe »[40]. Le , le traité de Rastatt marquant la fin de la guerre de Succession d'Espagne est rédigé uniquement en français[41]. Le célèbre philosophe et savant allemand, Gottfried Wilhelm Leibniz (1646-1716), écrivait le plus souvent en français.
À Saint-Pétersbourg, Catherine II impératrice de Russie (1762-1796) fait rédiger tous les mémoires de l'Académie en français[42].
Frédéric II de Prusse (1740-1786) est un grand amateur de la langue française, il correspond en français avec Voltaire et écrit son autobiographie en français[43], il ira jusqu'à remplacer le latin par le français à l'Académie de Berlin[44].
En 1777, le marquis de Caraccioli publie un livre intitulé L’Europe française ou Paris, le modèle des nations étrangères. En 1783, l'Académie de Berlin proposait, comme thème de concours aux écrivains, le sujet suivant : « Qu'est-ce qui a rendu la langue française universelle ? »[45],[46].
En 1892, le premier journal communautaire au monde est inventé en Australie, il est appelé Le Courrier australien[47].
En 1911, Jacques Novicow rédige un article[48] nommé Le Français, langue auxiliaire de l'Europe. Cet article explique pourquoi le français devrait devenir la langue véhiculaire de toute l'Europe[49].
La maintenance de la langue française est suivie par : l'Académie française, la Délégation générale à la langue française et aux langues de France (DGLFLF), le Service de la langue française (Belgique), l'Office québécois de la langue française (OQLF), les Conseils supérieurs de la langue française de France, de Belgique et du Québec.
En 1985, la chaine francophone internationale TV5 Monde est fondée. Malgré des débuts très humbles, la chaîne grossit très rapidement et devient dans les années 2000 l'un des trois plus grands réseaux mondiaux de télévision, aux côtés de MTV et de CNN[50]. En 2010, elle est surnommée « la plus grande classe de français du monde »[51].