Glyphosate
composé chimique / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
Cher Wikiwand IA, Faisons court en répondant simplement à ces questions clés :
Pouvez-vous énumérer les principaux faits et statistiques sur Glyphosate?
Résumez cet article pour un enfant de 10 ans
Le glyphosate (N-(phosphonométhyl)glycine, C3H8NO5P) est un herbicide total foliaire systémique, c’est-à-dire non sélectif, absorbé par les feuilles et à action généralisée. Exclusivement produit par Monsanto à partir de 1974 (sous la marque Roundup), il l'est aussi par d'autres firmes depuis que son brevet est entré dans le domaine public (en 2000). À la fois efficace contre les monocotylédones et dicotylédones, c'est le désherbant le plus vendu au monde ; pulvérisé chaque année sur des millions d'hectares[6], son utilisation a été environ multipliée par 100 dans le monde en 40 ans (de 1974 à 2014)[7] (environ 720000 tonnes mises sur le marché en 2012)[8]. en 2014, dans le monde, près de 0,5 kg de pesticide à base de glyphosate aurait été pulvérisé par hectare[7]. Il nécessite des adjuvants (dont tensioactif) car seul, il n'adhère pas aux feuilles et les pénètre difficilement.
Glyphosate | |||
Structure chimique du glyphosate. |
|||
Identification | |||
---|---|---|---|
Nom UICPA | N-(phosphonométhyl)glycine | ||
Synonymes |
acide 2-[(phosphonométhyl)amino]acétique acide glyphosique |
||
No CAS | 1071-83-6 | ||
No ECHA | 100.012.726 | ||
No CE | 213-997-4 | ||
SMILES | |||
InChI | |||
Apparence | solide blanc, inodore[1] | ||
Propriétés chimiques | |||
Formule | C3H8NO5P [Isomères] |
||
Masse molaire[2] | 169,073 1 ± 0,004 7 g/mol C 21,31 %, H 4,77 %, N 8,28 %, O 47,32 %, P 18,32 %, |
||
pKa | <2 ; 2.6 ; 5.6 ; 10.6 | ||
Propriétés physiques | |||
T° fusion | (décomposition) : 230 °C[1] | ||
T° ébullition | 230 °C décomposition | ||
Solubilité | dans l'eau à 25 °C : 12 g l−1[1] Insoluble dans la plupart des solvants organiques |
||
Masse volumique | 1,7 g cm−3[1] | ||
Pression de vapeur saturante | à 20 °C : négligeable[1] | ||
Précautions | |||
SGH[3] | |||
H318 et H411 H318 : Provoque des lésions oculaires graves H411 : Toxique pour les organismes aquatiques, entraîne des effets à long terme |
|||
Transport | |||
Code Kemler : 90 : matière dangereuse du point de vue de l'environnement, matières dangereuses diverses Numéro ONU : 3077 : MATIÈRE DANGEREUSE DU POINT DE VUE DE L’ENVIRONNEMENT, SOLIDE, N.S.A. Classe : 9 Étiquette : 9 : Matières et objets dangereux divers Emballage : Groupe d'emballage III : matières faiblement dangereuses. |
|||
Écotoxicologie | |||
DL50 | 1 568 mg kg−1 (souris, oral) 130 mg kg−1 (souris, i.p.) 7 940 mg kg−1 (lapin, peau) [4] |
||
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |||
modifier |
Sel d'isopropylamine de glyphosate | |
Identification | |
---|---|
Synonymes |
sel d'isopropylamine de N(-phosphonométhyl)glycine |
No CAS | 38641-94-0 |
SMILES | |
InChI | InChI : vue 3D InChI=1/C3H8NO5P.C3H9N/c5-3(6)1-4-2-10(7,8)9;1-3(2)4/h4H,1-2H2,(H,5,6)(H2,7,8,9);3H,4H2,1-2H3/f/h5,7-8H; |
Apparence | solide |
Propriétés chimiques | |
Formule | C6H17N2O5P [Isomères] |
Masse molaire[5] | 228,183 3 ± 0,007 9 g/mol C 31,58 %, H 7,51 %, N 12,28 %, O 35,06 %, P 13,57 %, |
Propriétés physiques | |
Solubilité | très soluble dans l'eau |
Masse volumique | 1,218 g ml−1 à 25 °C[réf. souhaitée] |
Précautions | |
Directive 67/548/EEC | |
Symboles : Xi : Irritant Phrases R : R36 : Irritant pour les yeux. Phrases S : S26 : En cas de contact avec les yeux, laver immédiatement et abondamment avec de l’eau et consulter un spécialiste. |
|
Écotoxicologie | |
DL50 | 10 537 mg kg−1 (rat, oral) 7 500 mg kg−1 (rat, peau)[réf. souhaitée] |
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |
modifier |
Glyphosate-trimésium | |
Identification | |
---|---|
Synonymes |
triméthylsulfonium de l'ion N-(phosphonométhyl)glycine |
No CAS | 81591-81-3 |
SMILES | |
InChI | InChI : vue 3D InChI=1/C3H8NO5P.C3H9S/c5-3(6)1-4-2-10(7,8)9;1-4(2)3/h4H,1-2H2,(H,5,6)(H2,7,8,9);1-3H3/q;+1/p-1/fC3H7NO5P.C3H9S/h7-8H;/q-1;m |
Propriétés chimiques | |
Formule | C6H16NO5PS [Isomères] 245,235087 g∙mol-1 C12H32NO5PS3 [Isomères] 397,558731 g∙mol-1 |
Propriétés physiques | |
T° ébullition | 110 °C à 760 mmHg[réf. souhaitée] |
Solubilité | 1 050 g l−1 dans l'eau à 20 °C ; ou 4 300 g l−1 eau à 25 °C[réf. souhaitée] |
Masse volumique | 1,27 g cm−3[réf. souhaitée] |
Précautions | |
Directive 67/548/EEC | |
Numéro index : 607-316-00-3 Symboles : Xn : Nocif N : Dangereux pour l’environnement Phrases R : R22 : Nocif en cas d’ingestion. R51/53 : Toxique pour les organismes aquatiques, peut entraîner des effets néfastes à long terme pour l’environnement aquatique. Phrases S : (S2) : Conserver hors de portée des enfants. S46 : En cas d’ingestion, consulter immédiatement un médecin et lui montrer l’emballage ou l’étiquette. S61 : Éviter le rejet dans l’environnement. Consulter les instructions spéciales/la fiche de données de sécurité. S36/37 : Porter un vêtement de protection et des gants appropriés. |
|
Unités du SI et CNTP, sauf indication contraire. | |
modifier |
Le glyphosate est classé depuis le comme « probablement cancérogène » par le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC)[9],[10],[11], agence de l'OMS qui précise que ce classement est une évaluation du niveau de preuves du danger engendré par l'exposition aux produits à base de glyphosate ; l'estimation du risque pour une population exposée au glyphosate n'est pas de son ressort.
En mai 2016, le panel permanent d'experts commun entre l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) et de l'Organisation mondiale de la santé (OMS/WHO) a estimé qu'il est improbable que le glyphosate soit cancérigène par voie alimentaire[12]. Des appréciations similaires ont été rendues par l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA/EFSA) ainsi que par les différentes agences nationales récemment chargées d'évaluer le risque sanitaire du glyphosate par voie alimentaire ou dans le cadre d'une exposition professionnelle.
En 2021, des chercheurs de l'INSERM considèrent que le « lien entre glyphosate et certaines pathologies ou problématiques est plus fort que ce que l'on pensait jusqu'ici »[13].
Le glyphosate est une molécule de synthèse, découverte dans les années 1950 par le chimiste suisse Henri Martin (de)[14],[15].
C'est un acide organique faible, analogue structurel d'un acide aminé naturel, la glycine, doté d'un groupement phosphonate (son nom est la contraction de glycine, phospho- et -ate) ; de cette structure, il présente quatre pKa (<2 ; 2,6 ; 5,6 ; 10,6)[16]. Avec sa structure zwitterionique, il est aussi amphotère[17], très soluble dans l'eau et très polaire (logP < −3,2[17]), une somme de caractéristiques qui a longtemps, dans certains contextes (hospitalier notamment, en cas de suspicion d'empoisonnement par exemple), rendu son analyse chimique difficile, longue et coûteuse.
Le glyphosate est aujourd’hui connu du grand public et du monde agricole comme herbicide total (brevet déposé par Monsanto en 1974[18]) ; mais il avait d'abord été breveté 10 ans plus tôt, en 1964 par Toy et Uhing comme chélateur, agent mouillant, composé biologiquement actif et intermédiaire chimique pour la production d'acides aminométhylènephosphiniques dérivés[19]. Sa propriété chimique de chélateur pourrait expliquer certains de ses effets sur l'environnement[20]. Il a d'ailleurs été utilisé pour supprimer des dépôts minéraux dans les tuyauteries avant d'être un pesticide. Parce que chélateur d'oligoéléments minéraux et de métaux, il s'adsorbe facilement dans les sols (plus ou moins selon le pH), ce qui le rend théoriquement assez peu mobile dans le sol.
C'est enfin un antibiotique puissant (brevet déposé par Monsanto en 2010)[21],[22]. Il n'a cependant jamais reçu d'autorisation de mise sur le marché (AMM) pour cette dernière utilisation.
Pour accroître sa solubilité et permettre son passage dans la plante et la sève, les industriels le préparent souvent sous forme de sel d’isopropylamine (C6H17N2O5P, Roundup)[23]. Des additifs (tensioactifs, tels que le polyoxyéthylène amine) lui sont ajoutés pour le fixer sur les plantes[24],[25]. La toxicité de ce tensioactif a conduit au retrait en France en 2016 de tous les produits à base de glyphosate en contenant[26].
Herbicide, pour détruire les adventices
Le glyphosate est l'herbicide le plus utilisé dans le monde[27]. En France, environ 8 000 t/an de matière active ont été utilisées en 2016[28]. Son succès repose sur un coût faible, une bonne efficacité et une très grande souplesse d'utilisation. Il est largement utilisé pour du désherbage agricole mais aussi pour l'entretien des espaces urbains et industriels. En agriculture, le glyphosate permet une destruction efficace des adventices ou des repousses avec un coût réduit, y compris en « agriculture de conservation » pour désherber sans retourner la terre[29].
Herbicide aussi utilisé comme dessicant (juste avant la récolte)
Le glyphosate est de plus en plus utilisé en pré-récolte en Europe, dans les régions agronomique tardives, sur de nombreuses cultures (blé, tournesol, colza, orge d'hiver, betterave sucrière) pour accélérer la maturité et détruire les adventices présentes dans la culture[30]. Ceci vise à avancer la date de récolte. En général, le délai du traitement avant récolte à respecter est de 7 jours.
En France, certains produits phytosanitaires à base de glyphosate sont homologués pour traiter un blé mûr (destruction de chardon) et le récolter entre 7 et 14 jours après[31].
Au Canada, cette méthode de dessiccation au glyphosate est pratiquée sur les lentilles, le canola, le blé, le lin, le pois, le haricot sec[32], le soja, l'orge, l'avoine et les cultures fourragères (destinées à l'alimentation animale)[33].
Ces traitements sur cultures proches de la maturité expliquent en partie pourquoi on retrouve le glyphosate dans l'alimentation[34],[35],[36],[37],[38],[39]. Par exemple, en 2012, la LMR du glyphosate dans les lentilles (dans l'Union européenne) a été multipliée par 100 en passant de 0,1 à 10 mg/kg. À la demande de Monsanto, l'Autorité européenne de sécurité des aliments (AESA) a augmenté la LMR afin de prendre en compte l'utilisation autorisée du glyphosate sur les lentilles (pré-récolte) aux États-Unis et au Canada[38] (cette pratique n'est pas autorisée en Europe). Selon la Commission : « la LMR a été modifiée compte tenu des informations sur une utilisation spécifique » (la dessiccation) « qui n'avait pas encore été évaluée ». Cette augmentation de la LMR permet l'exportation de lentilles du Canada et des États-Unis vers l'Europe.
Une étude réalisée en 2015 et 2016 par l'Agence canadienne d'inspection des aliments a montré que 47 % des échantillons de haricots, pois et lentilles contenaient du glyphosate[40]. La LMR canadienne du glyphosate et de l'acide aminométhylphosphonique (AMPA) pris ensemble est de 4 mg/kg dans les lentilles sèches, alors que la LMR européenne du glyphosate seul est de 10 mg/kg pour ce produit.
Le glyphosate, par son mode d'action systémique, peut, s'il est appliqué trop tôt en pré-récolte, s'accumuler dans le grain et entraîner un dépassement de la LMR[39].
Aux États-Unis, l'utilisation trop précoce du glyphosate (une partie des graines étant encore trop humides) ou trop tardive (délais avant récolte non respectés) sur les haricots secs peut entraîner une teneur en résidus illégale conduisant les acheteurs à rejeter les importations[36].
La dessiccation avant récolte des céréales blé et orge, s'est fortement développée en Angleterre. En 2008, l'agence de l'alimentation anglaise a mené une campagne d'information auprès des agriculteurs visant à limiter cette pratique en raison d'une présence récurrente de traces de glyphosate dans le pain[37].
En 2016, deux études ont montré la présence de glyphosate dans certaines bières suisses et allemandes. Une bière allemande contenait trois cents fois la dose autorisée dans l'eau potable[35]. Il provenait vraisemblablement du malt d'orge ou du houblon. Une étude en Suisse a testé l'impact de la dessiccation au glyphosate du blé et de l'orge brassicole (pratique interdite en Suisse) : les blés traités en pré-récolte et la farine qui en est issue contiennent des quantités non négligeables de glyphosate (49 à 280 µg/kg). Lors de cette expérimentation, l'orge traité avant récolte contenait trois cents fois plus de glyphosate que l'orge témoin et le malt d'orge cinquante fois plus que le seuil de quantification non atteint par le témoin[34].
Fin 2017, le syndicat agricole français Coordination rurale réclame la suppression de son usage pour la dessiccation dans l'Union européenne et la baisse de la LMR du glyphosate dans les produits agricoles avec un retour à 0,1 mg/kg (LMR actuelle glyphosate de 0,1 à 20 mg/kg)[41].
Autres usages
Selon Rivoira et al. (2022), son absorption par les racines a été clairement évaluée, et son application sur les sols a aussi été rapportée, à des fins fongicides [42].
Efficacité et résistances
Le glyphosate s'est d'abord montré extrêmement efficace, puis des souches d'adventices résistantes sont peu à peu apparues. Les cultures d'OGM tolérants au glyphosate, surtout développées aux États-Unis à la fin des années 1990, ont contribué à une augmentation de l'usage du glyphosate dans les parcelles OGM (93 % des surfaces en soja aux États-Unis en 2006). En 2007, sept adventices avaient produit des souches résistantes à ce pesticide, dont Ambrosia trifida (l'ambroisie trifide ou grande herbe à poux) trouvée dans l'Ohio et l'Indiana, qui est une plante qui s'installe facilement dans le soja, occasionnant jusqu'à 70 % de diminution de rendement[43]. En France, l'INRA de Dijon confirmait en 2007 un premier cas de résistance au glyphosate d'une espèce végétale : l'ivraie raide (Lolium rigidum)[44].
Sur le terrain, de nombreux agriculteurs connaissent ce phénomène depuis plusieurs décennies et le gèrent par des rotations de culture ou en alternant les molécules herbicides qu'ils utilisent. L'utilisation exclusive de glyphosate générant une sélection des adventices de plus en plus tolérantes à cet herbicide au fil des générations. L'utilisation répétée d'une seule molécule phytosanitaire sans diversifier les méthodes d'actions entraine toujours tôt ou tard une certaine résistance de la part du nuisible (insecte, champignon ou bien mauvaise herbe) vis-à-vis de cette molécule [45][source insuffisante].
Certains craignent aussi que, par hybridation, des crucifères sauvages acquièrent le transgène de résistance au glyphosate et ne puissent plus être désherbées dans les champs ou bords de route par les désherbants totaux basés sur le glyphosate.
Un phénomène d'hormèse a été identifié par une étude qui a utilisé le haricot cultivé comme modèle : à faible dose, le glyphosate dope la croissance du haricot au lieu de le tuer[46].
Faibles coûts d'achat et de stockage
L'une des raisons du succès mondial (déserbant le plus utilisé au monde depuis les années 1970, avec par exemple plus de 800 000 t vendues en 2014)[47], des pesticides à base de glyphosate est son bas coût d'achat et de stockage[48], notamment depuis que son brevet est tombé dans le domaine public en 2000.
Mais ce coût varie néanmoins significativement selon le pays, le fournisseur, la concurrence, et bien sûr selon la concentration et la formulation du produit (dans les années 1980, certains adjuvants ont fortement multiplié son efficacité comme désherbant : par exemple multipliée par 6,5 en bas volume avec l'Ethokem)[49], voire selon la spéculation[50].
À titre d'exemple :
- États-Unis : en 2016, son prix moyen au litre était de 3,38 $ US par litre (d'après une étude de l’Université de l’Illinois), prix qui avait baissé de 39 % par rapport à 2014, probablement suite à la mise sur le marché de génériques du Roundup et suite à une baisse de la demande[51] ;
- Europe : en 2018, ce prix était de 2,64 € par litre, selon l’Association européenne des producteurs d’herbicides (ECPA), soit 9 % de plus que l'année précédente (2017), en raison de la hausse des coûts de production et de la réduction de l’offre[52] ;
- France : en 2019, ce prix était de 3,50 € par litre (enquête auprès de 1 500 agriculteurs), soit une hausse de 17 % en un an (par rapport à 2018), en raison notamment de spéculations sur une possible interdiction qui a encouragé certains à faire des stocks. En 2018, il s'en était vendu 9 723 tonnes en France.
Les coûts environnementaux et sanitaires, directs ou indirects, de l’usage du glyphosate sont quant à eux encore discutés[53][réf. nécessaire].
Le mécanisme d'action[54] de cet herbicide est une inhibition de l'enzyme 5-énolpyruvylshikimate-3-phosphate synthase (ou EPSPS), une enzyme de la voie de biosynthèse des acides aminés aromatiques dans les plantes.
Historiquement, et selon la littérature, depuis que les semenciers (qui sont aussi producteurs de désherbant) cherchent à produire des semences et plantes résistantes au glyphosate, ils auraient trouvé au moins trois voies pour atteindre ce but chez des végétaux cultivés, normalement vulnérables à cette molécule herbicide[54].
- Les premiers travaux ont été axés sur l'adaptation progressive (par simple sélection) des cellules végétales cultivées à une exposition lentement croissante au glyphosate. Les cellules ainsi obtenues étaient devenues résistantes au glyphosate, par exemple en raison de la surexpression du gène EPSPS, de l'amplification de ce gène (EPSPS), ou d'une plus grande stabilité enzymatique[54].
- D'autres travaux ont recherché à créer une résistance en transformant les plantes concernées avec des gènes permettant de dégrader et métaboliser le glyphosate sans dommages pour la plante :
- une enzyme dite « GOX » (pour glyphosate oxydoréductase) a été trouvée chez un micro-organisme du sol. Elle casse la liaison azote-carbone du glyphosate en produisant de l'acide aminométhylphosphonique,
- un autre gène dit « GAT » (pour glyphosate N-acétyl-transférase) s'est montré capable d'acétyler et désactive le glyphosate[54],
- un troisième mécanisme (celui qui a été utilisé pour mettre sur le marché diverses plantes transgéniques résistantes au glyphosate) a consisté à insérer par transgenèse un gène codant une forme d'enzyme EPSPS[54] plus résistante au glyphosate.
Plusieurs chercheurs ou équipes ont utilisé la mutagenèse dirigée, ou des substitutions d'acides aminés de l'EPSPS, mais la forme de l'enzyme EPSPS la plus résistante au glyphosate à ce jour serait celle qui a été isolée à partir de la souche CP4 d'Agrobacterium spp[54].
L'observation d'apparition dans les champs de « mauvaises herbes » devenues résistantes au glyphosate laissent penser que d'autres mécanismes physiologiques de résistance au glyphosate sont possibles. Un liseron des champs assez résistant présente une production élevée de l'enzyme 3-désoxy-d-arbino-heptulosonate 7-phosphate synthase, la première enzyme de la voie shikimique, ce qui suggère que le flux de carbone accru par la voie shikimique peut offrir une résistance au glyphosate[54].
Une autre adventice (Gaillet gratteron ou Galium aparine ; goosegrass pour les anglophones) se montre capable de réduire la translocation du glyphosate à partir de la surface foliaire traitée[54].
La voie la plus efficace semble être l'enzyme EPSPS, impliquée dans la voie métabolique de l'acide shikimique, laquelle est nécessaire pour la synthèse des acides aminés aromatiques tels que la phénylalanine, la tyrosine et le tryptophane ; ces acides aminés participent à la synthèse des vitamines et de beaucoup de métabolites secondaires, comme les molécules hormonales d'intérêt sur le développement de la plante telles que les folates, l'ubiquinone et des naphtoquinones[55]. La biosynthèse d'acides aminés par l'enzyme EPSPS est absente chez les animaux, si bien que cette voie n'a pas a priori d'effet sur eux.
Lutte contre la drogue
Le glyphosate est notamment utilisé par le gouvernement colombien, aidé par le gouvernement des États-Unis dans son Plan Colombie pour détruire les champs de coca produisant de la drogue qui finance des actions de groupes rebelles.
L'Équateur voisin craint aussi des conséquences sanitaires et écologiques des pulvérisations colombiennes de glyphosate près de ses frontières, dans le Putumayo. Le refus colombien d'abandonner ces pulvérisations aériennes a provoqué en 2006-2007 une crise diplomatique entre les deux pays[56].
En , le Conseil national des stupéfiants de la Colombie a ordonné la suspension des épandages de glyphosate pour détruire les plantations illégales de coca, à la suite de l'avis du CIRC/IARC classant l'herbicide comme « probablement cancérogène », et à la demande de la Cour constitutionnelle de la Colombie, qui cite le principe de précaution. Pour mettre en œuvre cette décision, l'Agence nationale des permis environnementaux doit se prononcer immédiatement et annuler le permis accordé au programme de pulvérisation[57],[58],[59],[60]. Devant la hausse de la culture de coca, les épandages ont repris en 2018[61] et le glyphosate est réautorisé depuis 2020[62].
Cultures transgéniques
L'augmentation massive de l'utilisation du glyphosate à travers le monde est très liée à la mise sur le marché de plantes génétiquement modifiées résistantes au glyphosate.
Certaines plantes ont été modifiées génétiquement par transgénèse pour résister au glyphosate. Le principe de cette résistance est d'utiliser une version mutée du gène du maïs codant la 5-enol pyruvylshikimate-3-phosphate synthase, enzyme normalement affectée par le glyphosate. La version mutante du gène code une version différente de l'enzyme, appelée 2mEPSPS, dont le fonctionnement est beaucoup moins inhibé par le glyphosate. Il existe plusieurs variétés de plantes cultivées transgéniques résistantes au glyphosate comme le soja et le coton. Il existe aussi d'autres résistances que celle sus citée[63].
La culture majoritaire d'OGM résistant au glyphosate a entraîné des résistances chez 261 espèces de plantes, dans 71 pays, ce qui nécessite d'utiliser plus d'herbicides[64].
Selon le gouvernement du Québec, les cultures tolérantes à un herbicide permettraient de réduire l'utilisation d'herbicides car elles nécessitent moins de traitement, néanmoins les résistances pourraient entraîner une augmentation de l'utilisation d'herbicides [65].
Agriculture de conservation comme le non labour
L'usage du glyphosate a permis une adoption plus rapide de techniques d'agriculture de conservation comme le non labour[66]. Le non-travail du sol et le fait de laisser les résidus de la culture précédente au sol limite les effets négatifs du glyphosate (un pesticide est d'autant plus vite dégradé qu'il est exposé au soleil et à un milieu riche en micro-organismes) et permet d'améliorer le taux de matière organique du sol[67].
Évaluations environnementales et sanitaires
Pour autoriser ou refuser la mise sur le marché d’une molécule, les autorités sanitaires se fondent sur un dossier fourni par les demandeurs, des rapports établis par d'autres agences comme le CIRC, ainsi, en théorie, que toutes les études disponibles sur le sujet[68].
Alors que l'utilisation du glyphosate a encore fortement augmenté (depuis le milieu des années 1990 et à nouveau dans les années 2000), les données scientifiques utilisées pour les évaluations des risques sanitaires et environnementaux datent encore d'une trentaine d'années. Ainsi, lors de la ré-homologation des produits à base de glyphosate, faite en 1993 par l'EPA[69], près de 73 % des presque 300 citations utilisées pour cette « mise à jour » avaient été publiées avant 1985 ; et parmi elles, 11 seulement avaient fait l'objet d'une évaluation par des pairs.
Plus récemment (2016) une recherche faite sur PubMed[70] a révélé plus de 1 500 études sur le glyphosate publiées rien que durant la dernière décennie[7].
En 2017, des experts jugent « incongru que les évaluations de la sécurité de l'herbicide le plus largement utilisé sur la planète fassent largement appel à moins de 300 études non publiées et/ou non revues par des pairs, tout en excluant la vaste littérature moderne sur les effets du glyphosate[7]. »
De plus, Monsanto est soupçonné d'avoir directement manipulé l'information pour influencer les agences d'évaluations système d'évaluation : En 2017, le journal Le Monde a publié une série d'articles montrant que l'entreprise Monsanto avait rémunéré des scientifiques pour produire, sous leur nom, des études écrites partiellement par des employés de l'entreprise. Ces révélations se fondent sur des documents obtenus en marge d'un procès en cours aux États-Unis, documents que les journalistes ont nommés « Monsanto Papers ». Il s'agissait pour l'essentiel d'études en rapport avec le glyphosate, les journalistes dénoncent une manœuvre menée dans le but d'influencer favorablement les agences d'évaluations[71],[72]. Face à la mise en cause de ses sources, l'Autorité européenne de sécurité des aliments répond que les articles en question sont des synthèses d'études qui sont elles-mêmes prises en compte dans l'expertise de l'agence. Par ailleurs, dans le cas des deux articles sur lesquels elle s'est appuyée, elle ne se prononce pas sur le fait qu'ils aient pu être écrits directement par Monsanto mais observe que l'absence de neutralité était claire à la lecture des déclarations d'intérêts et des remerciements, qui faisaient état explicitement d'un financement par le Glyphosate Task Force, un consortium d'entreprises œuvrant pour le renouvellement de l'autorisation du glyphosate par l'Union européenne[73].
Désherbant largement utilisé par l'agriculture mondiale, le glyphosate est soupçonné de provoquer des cancers. En 2023, il y a une possibilité de renouvellement pour dix ans de l'autorisation d'utilisation du glyphosate dans l'Union européenne. La Commission propose d'assortir l'autorisation de « mesures d'atténuation des risques » aux alentours des zones pulvérisées, avec des « bandes tampons » de cinq à dix mètres, des équipements permettant de réduire « les dérives de pulvérisation », ainsi que l'interdiction de l'utilisation pour la dessiccation (l'épandage pour sécher les cultures avant la récolte)[74]
Jusque dans les années 2000, la mobilité et cinétique environnementale du glyphosate est restée mal connue et l'est encore incomplètement[75]. Cette information devenait importante car cette molécule est l'herbicide le plus utilisé, et son utilisation a été fortement accrue dans les zones de cultures de plantes transgéniques rendues tolérante au glyphosate[76] et parce que d'autres herbicides étaient trouvés dans l'air et les pluies[77], sources potentielles d'exposition pour l'homme et les travailleurs agricoles (ou forestiers[78]) en particulier.
Persistance / Dégradation
« La plupart des processus biologiques et d'oxydation peuvent détruire les molécules de glyphosate, conduisant alors à des sous-produits (les principaux étant l' acide aminométhylphosphonique (AMPA pour Aminomethylphosphonic acid, « son sous-produit le plus toxique et persistant ») et la Sarcosine) qui peuvent être ou non affectés par ces processus »[80].
Lorsque le glyphosate est utilisé sur des plantes génétiquement modifiées pour y être résistantes, ces plantes le dégradent fortement en AMPA et glyoxylate[80]. Sur ces cultures, les résidus du glyphosate sont négigeables, tandis que ceux de l'AMPA peuvent être très élevés[80].
La vitesse de dégradation environnementale du glyphosate dépend du type de sol et de sa composition microbienne[79]. Il peut persister, ainsi que l'AMPA, plus d'un an dans les sols à forte teneur en argile mais est beaucoup plus rapidement lessivé dans les sols sableux[80].
Dans l'eau, le glyphosate et l'AMPA peuvent également se déposer dans les sédiments où la dégradation est beaucoup plus lente[80]. En raison de son utilisation généralisée on retrouve maintenant couramment du glyphosate ou de l'AMPA dans la pluie, diverses sources d'eau et de nombreux sédiments[80].
En 2015, Monsanto été condamné en France pour publicité mensongère, ayant présenté le Roundup, premier désherbant au monde, comme biodégradable. Principale matière active du Round Up, le glyphosate a été classé en 1991 « dangereux pour l'environnement », notamment aquatique, par les autorités européennes[82].
Diverses méthodes de décontamination des eaux contenant du glyphosate ont été mises au point (et comparées par une revue d'études en 2020)[79] pour traiter le glyphosate présent dans l'eau ; il peut être adsorbé (sur charbon activé), mais il n'est alors pas détruit[83].
Une biodégradation seule ou une oxydation seule ne sont « généralement pas suffisamment efficace pour atteindre les normes requises », mais il est possible de combiner ces deux procédés[79]. Une méthode de dopage de la photodégradation dans l'eau a été proposée en 2023[84], ainsi qu'une méthode d'électrominéralisation catalysée par un film nanostructuré d'oxyde de plomb, à température ambiante et avec un très faible besoin en électricité (l'oxyde reteun est le « β-PbO2 pur, avec nanostructures d'aiguilles cubiques », susceptible de provenir d'une valorisation de déchets toxique de métaux lourds)[85].
Pour limiter la pollution par dispersion de l’air et l’exposition des travailleurs au glyphosate, il a été récemment (2022) proposé (comme pour quelques autres pesticides)[86] d'encapsuler le glyphosate dans des supports de type bille creuse d'agile ou silice afin de permettre une libération plus ponctuelle et prolongée[87]. Les auteurs n'ont pas étudié d'éventuels risques pour l'écologie des sols (vie bactérienne notamment)[88] et pour la résistance aux pesticides[87].
Détection de présence
Les analyses permettant de doser par les moyens habituels le glyphosate dans les milieux naturels ou les organismes ont longtemps été difficiles, longues et coûteuses[89],[90],[91].
En outre, son caractère zwitterionique empêche de le rechercher lors d'analyses multi-résidus de surveillance de l'environnement[92].
Enfin, « fortement retenu par le sol et par conséquent peu lessivé, le glyphosate non absorbé par les plantes est dégradé par les microorganismes. Il s'agit donc d'un herbicide non rémanent[93] ». Ceci explique que, bien qu'il soit l'un des pesticides les plus utilisés dans le monde entier, les données sur la présence de glyphosate dans les milieux (eau, air, sol) restent en 2017 « encore rares ».
Cependant, des méthodes nouvelles semblent émerger[17], notamment avec un test coloré de test de dépistage rapide du glyphosate dans l'urine ou le sérum sanguin ou dans des boissons ou échantillons de sol ; sans faux positif et avec une limite de détection de 100 µg/mL pour les échantillons biologiques et de 800 µg/mL pour les échantillons de boissons (selon sa présentation faite en 2018 dans la revue Forensic Toxicology[94]).
Depuis que des progrès techniques ont amélioré la précision des analyses et en ont diminué les coûts, on prend conscience que, bien que dégradable, le glyphosate, comme de nombreux herbicides et insecticides (y compris interdits depuis des années) est très souvent présent dans l'air[95],[96], la pluie[97],[95], les eaux marines[98], de surface et de nappe[97] et les sols[97],[99], la nourriture et les boissons, l'urine[100] et le sang[101] humains et même dans des échantillons de marijuana[102] ou des médicaments.
Dans les sols
La quantification du glyphosate est rendue difficile par le fait qu'il est adsorbé sur les particules du sol, et alors difficile à extraire sans le dénaturer.
Il est utilisé, en forêt (pour préparer et dégager les plants), en milieu rural, pour le désherbage en vue de l’ensemencement de nombreuses cultures et comme défoliant ou dessicant pour certaines autres cultures (blé, orge, légumes, colza ou moutarde sauvage, lin, cultures fourragères), ou dans les jardins par les particuliers et souvent pour la culture sans labour (technique permettant cependant la réduction des doses employées en semant sous couvert par exemple).
Dans l'eau
Le glyphosate est soluble dans l'eau douce à raison de 12 g/L à 25 °C, mais il est aussi fortement adsorbé sur les particules du sol sec et alors peu mobilisable par l'eau[103].
Il était réputé peu mobile dans les sols et rapidement dégradable, et donc à faible risque de contamination des nappes, mais de nombreuses études montrent qu'il est pourtant de plus en plus présent dans les eaux de surface, voire souterraines et littorales. On a supposé qu'un usage intensif et mal contrôlé (dont en jardinage et désherbage de voirie) expliquerait sa présence dans de nombreux cours d'eau et nappes phréatiques, mais ceci n'est pas confirmé par les études qui révèlent une présence ubiquitaire. Une explication plus étayée est que dans certains contextes de pulvérisations, une partie importante du glyphosate dérive dans l'atmosphère ou le vent (avant d'atteindre sa cible), dérive et retombe plus loin (retombées sèches ou humides) ou qu'il est conservée sans se dégrader dans le sol quand ce dernier – au moment de la pulvérisation – est encore gorgé de l'eau de pluies récentes[103], selon qu'il pleut ou non après la pulvérisation[103]. Dans le contexte édaphique d'une étude récente (2018) de 0,06 à 1,0 % du glyphosate appliqué a été retrouvé dans l'eau lixiviant le sol ; cependant la teneur en glyphosate dans le lixiviat des sols ne dépendait pas des pluies tombées après l'épandage, « mais plutôt des conditions hydrologiques du sol au moment de la pulvérisation, reflétées par les précipitations cumulées des 7 jours précédent ; plus le sol était humide et engorgé au moment de la pulvérisation, plus il a ensuite libéré de glyphosate » (dans le contexte de cette étude, un cumul de 5 mm de pluie dans la semaine précédant l'épandage suffisait à fortement augmenter le relargage de glyphosate dans l'eau[103]), selon les auteurs. « Éviter la pulvérisation dans de telles conditions peut atténuer le relargage potentiel de glyphosate »[103], mais l'air ne doit pas être trop sec non plus au moment de la pulvérisation.
On sait en outre depuis 1985 que le glyphosate est plus mobile et soluble dans les sols alcalins (ou riches en phosphates, un minéral indispensable aux plantes, présent en quantité dans les sols riches ou bien amendés)[104].
Une étude a détecté des taux de 200 à 300 µg/L de glyphosate peu après une pulvérisation directe dans de l'eau stagnante. Ce taux n'a été réduit que de moitié après trois semaines environ. Le Roundup n'a jamais été autorisé dans l'UE pour désherber des mares et étangs de pêche en eau. La nature des bactéries présentes, la présence ou absence d'un biofilm important, la quantité d'ultraviolets, la température (saison) et le pH jouent probablement également un rôle dans la vitesse de dégradation du glyphosate dans l'eau[105].
En Suisse, du glyphosate est présent dans la grande majorité des ruisseaux de la région de Zurich à des taux médians de 0,11 à 0,20 μg/L (et de 2,1 à 2,6 μg/L pour le 95e centile)[92]. Les résidus trouvés dans les cours d'eau et les eaux usées traitées montrent que les utilisations non agricoles contribuent significativement aussi aux charges globales de glyphosate et d'AMPA dans les eaux de surface. L'AMPA a été trouvé dans deux aquifères karstiques, sur quatorze testés[92]. Dans les eaux souterraines, son métabolite, l'AMPA, a été détecté à des concentrations supérieurs à 0,1 μg/l, exigence de la Loi fédérale sur la protection des eaux (LOEaux), dans deux stations de mesure sur 550 lors de relevés effectués avant 2014, publiés dans un rapport du gouvernement en 2019[106]. L'évolution de cette contamination n'a pas été documentée depuis.
Au Québec, après pulvérisation en sylviculture, on n'en a pas trouvé (seuil de détection de 1,0 µg/L) dans huit cours d'eau protégés par une zone tampon de 30 m. On en a trouvé en revanche dans deux échantillons provenant de fossés (16,9 µg/L au max.)[107]. Des zones tampons de 3 m sont inefficaces entre les champs et cours d'eau. Dans les étangs ayant reçu une pulvérisation directe, le taux était de 2 800 µg/L dans l'eau juste après la pulvérisation, mais chutait à 288 µg/L 24 h plus tard. Des études ont porté sur son adsorption dans la zone insaturée d'un aquifère sédimentaire[108] ou sur le continent[107], mais sa cinétique dans ces sédiments ou dans l'eau interstitielle des sédiments semble peu étudiée.
En 2005, du glyphosate ou ses produits de dégradation est (sont) retrouvé(s) dans certains sédiments marins[109].
En 2006, selon l'IFEN le glyphosate et l'AMPA étaient les substances les plus retrouvées dans les eaux en France[110], sans surprise car le glyphosate est l'herbicide le plus vendu en France ; par ailleurs, l’AMPA est aussi le résidu de dégradation d’autres substances présentes dans les formulations d'autres produits utilisés en milieux industriels ou domestiques[111],[112]. La distinction de la source de l'AMPA dans les eaux de surface et la nappe phréatique ne peut pas être faite directement[112]
Protection de captages ; Bandes enherbées ou boisées
Alors que la teneur des eaux en glyphosate continuait rapidement à croître dans le monde, de nombreuses législations (nord-américaines et européennes notamment) ont cherché à protéger les eaux superficielles des pesticides et engrais en imposant des bandes enherbées sur les berges proches des cultures ; ces bandes peuvent aussi être des ripisylves artificielles en Amérique du Nord. Elles sont alors généralement constituées de saules choisis pour leur croissance rapide et leur aptitude à épurer l'eau (et leur facilité de valorisation en bois énergie). Autour des captages, les épandages sont en outre interdits en périmètre rapproché.
En 2017, les zones-tampons végétalisées doivent au Québec mesurer au moins 3 mètres de largeur[113].
Leur efficacité sur le glyphosate n'avait pas été mesurée[113]. Une étude récente l'a évaluée pour des bandes enherbées ou plantées de saules (Salix miyabeana) en matière d'atténuation du lessivage du glyphosate agricole (mais aussi de son principal produit de dégradation l'AMBA). Les bandes de saules ont été testées en faible et forte densité (avec 33 333 et 55 556 tiges par hectare) et dans deux contextes de trophie du sol (sol riche en matière organique comparé à un sol au contraire très minéral)[113]. L'eau de ruissellement et l'eau interstitielle ont été analysées (avec des lysimètres à 35 cm et 70 cm de profondeur). Alors que ces bandes ont montré par ailleurs des effets positifs pour d'autres polluants d'origine agricole (plus de 50 à 60 % des phosphates et nitrates[114]), cette étude a montré qu'elles n'ont pas d'effets significatifs sur le glyphosate ni sur les transferts d'AMPA vers les cours d'eau (peut être parce que les racines de saules ou des végétaux spontanés restaurent et décolmatent les anciens sols agricoles labourés en y restaurant les transferts horizontaux et verticaux). Le glyphosate persiste dans et sous ces bandes végétalisées, et paradoxalement, elles ont même accéléré son transfert (et celui d'AMPA) vers les eaux souterraines. Dans le sol superficiel, le glyphosate y est moins présent côté berge, mais seulement avec une réduction de 27 à 54 %[113]. La densité des tiges de saules n'a pas eu d'effet sur les transferts de glyphosate. Pour ce cas d'étude, après pulvérisation de l'herbicide de plein champ à base de glyphosate, ce dernier est retrouvé dans les 20 premiers centimètres du sol à une dose moyenne de 210 μg/kg de sol sec, allant de doses non détectables à 317 μg/kg de sol sec)[113].
Circulation via les aérosols, l'air et la pluie
Sa faible pression de vapeur saturante (inférieure à 10−5 Pa à 25 °C)[115] le rend peu soluble dans l'air. Mais il peut y être présent sous forme d'aérosol ou fixé sur des poussières issues de sol poudreux et sec traité. Dans certaines conditions il peut aussi y être pour partie dégradée par photodécomposition sous l'effet des ultraviolets solaires.
Le glyphosate a donc d'abord été considéré très peu volatil dans l'air ; et son impact en termes de pollution atmosphérique et sa présence aérienne ont été longtemps supposés négligeables. Il ne concernait, pensait-on, que principalement et localement les aérosols provenant des dispositifs d'épandages. Les fiches de sécurité n'exigent d'ailleurs pas d'appareil de protection respiratoire, ce qui n'est pas le cas de tous les pesticides, y compris autorisés en agriculture biologique[116],[117].
En 2011, une étude[118] s'est pour la première fois intéressée à la présence et au devenir du glyphosate et de son premier produit de dégradation (l'AMPA) dans l'atmosphère et dans la pluie en Amérique du Nord. Elle a révélé que ces deux molécules étaient bien présentes dans l'air (et par suite dans les pluies). Les chercheurs ont échantillonné de l'air et des pluies, hebdomadairement durant deux saisons (2007-2008) de croissance des végétaux dans des zones agricoles du Mississippi et de l'Iowa. Ils avaient aussi échantillonné des pluies dans l'Indiana (en 2004 et uniquement durant la saison de croissance des plantes) lors d'une phase préliminaire de l'étude. Leurs analyses ont montré une fréquence de détection du glyphosate variant de 60 à 100 % (à la fois dans l'air et à la pluie). Le taux de glyphosate dans l'air variait de moins de 0,01 à 9,1 ng/m3 dans l'air, mais de 0,1 à 2,5 μg/L dans la pluie[118]. Dans l'air, la fréquence de détection et de concentrations médiane et maximale de ce produit (glyphosate) était comparable voire supérieure à celles des autres herbicides les plus utilisés dans le bassin du fleuve Mississippi, mais sa concentration dans l'eau de pluie était plus élevée que celle des autres herbicides (a priori en raison de sa forte solubilisation dans l'eau)[118]. Les auteurs ne disposaient pas du tonnage épandu (ni des quantités introduites dans l'air) dans les zones d'étude, mais ils ont estimé d'après leurs analyses que jusqu'à 0,7 % du tonnage appliqué sur les plantes est extrait de l'air via la pluie (avec des variations selon la pluviométrie)[118]. En moyenne 97 % du glyphosate dispersé dans l'air serait ainsi éliminé par une pluie hebdomadaire de 30 mm, par contre il est alors au moins en partie réintroduit dans les milieux aquatiques, cours d'eau et leurs sédiments (où des études antérieures l'avaient déjà retrouvé[119] alors qu'il était supposé fixé et rapidement inactivé dans les sols[120] et où il met plus de temps à se dégrader[121]).