Guerre du Liban
guerre civile entre 1975 et 1990 / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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Pour les articles homonymes, voir Expédition française en Syrie (1860-1861), Crise de 1958 au Liban, Intervention militaire israélienne au Liban de 1982 et Conflit israélo-libanais de 2006.
La guerre du Liban, ou guerre civile libanaise (en arabe : الحرب الأهلية اللبنانية, al-ḥarb al-ahliyyah al-libnāniyyah), est une guerre civile qui se déroule de 1975 à 1990 au Liban. Elle fait entre 150 000 et 250 000 morts[1] et de nombreux disparus et exilés.
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Date |
– (15 ans et 6 mois) |
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Lieu | Liban |
Casus belli | Massacre du bus de Beyrouth par les Phalanges libanaises. |
Issue |
1-Victoire syrienne durant la guerre de libération.
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Changements territoriaux |
Occupation syrienne du Liban jusqu'en 2005 |
150 000 - 250 000[1]
Conflit israélo-arabe
Guerre froide arabe
La guerre est complexe, marquée par des violences entre communautés (chrétiens, druzes, chiites, sunnites), des affrontements au sein même des communautés (chrétiens contre chrétiens, chiites contre chiites) ainsi que de multiples interventions étrangères — des invasions par la Syrie et Israël, et des interventions moins directes de la France, de la Ligue arabe et de l'Iran —. À cette fin, la guerre froide a exercé un effet désintégrateur sur le pays, étroitement lié à la polarisation politique qui a précédé la crise libanaise de 1958. Les chrétiens phénicianistes et les Druzes conservateurs se sont majoritairement rangés du côté du monde occidental, tandis que les chrétiens pro-syriens, des chrétiens de droite ayant quitté le Front libanais, les pan-syrianistes, les panarabistes et les groupes de gauche se sont majoritairement rangés du côté des pays nationalistes arabes.
La guerre prend un autre tournant lorsque de nombreux sous-conflits s'y ajoutent suite à des réglements de compte entre factions libanaises et palestiniennes:
- Les Conflits inter-chrétiens au Liban deviennent de plus en plus forts lorsque les factions maronites des Forces de régulation des Kataeb et de la Brigade Marada s'affrontent suite à des différends politiques. Les conflits dégénèrent en tueries et batailles.
- La Guerre des camps: des milices palestiniennes rivales se combattent avec l'appui de milices libanaises et de nations étrangères.
- La Guerre des frères: les mouvements chiites Amal et Hezbollah commencent à s'affronter dans les aires urbaines, avant de se réconcilier.
La guerre se termine défavorablement pour le Front libanais, qui a vu un grand nombre de ses membres faire défection ; les Forces libanaises en tant que milice sont dissoutes. Toutefois, jusqu'en 2000, le Hezbollah et le PSNS continuent le conflit au sud contre l'Armée du Sud-Liban et Tsahal : c'est le Conflit au Sud-Liban de 1985-2000.
Les séquelles du conflit se font sentir sur une longue période avec une reconstruction difficile, le maintien de milices armées, des reprises ponctuelles de la violence et une forte instabilité politique[2]. En 1989, l'accord de Taëf a marqué le début de la fin des combats lorsqu'un comité nommé par la Ligue arabe a commencé à formuler des solutions au conflit. En mars 1991, le Parlement libanais a adopté une loi d'amnistie qui pardonnait tous les crimes politiques perpétrés avant la promulgation de la loi.
La création du Liban moderne par la France
L'Empire Ottoman subit une lourde défaite lors de la Première Guerre mondiale. Ses anciennes possessions au Proche-Orient sont divisées après sa défaite face à l’Entente.
En 1920, la France rétablit l'État du Grand Liban qui conservera ses frontières géographiques après son indépendance en 1943. Il est composé par le territoire montagneux du Mont Liban et ses périphéries immédiates, principalement les plaines de la Bekaa et du Akkar ainsi que le littoral méditerranéen.
Ce tracé géographique a été demandé par les leaders chrétiens maronites en vue d'assurer la viabilité économique du futur État, à travers les ressources agricoles des plaines de la Bekaa et de l'Akkar, greniers historiques de la montagne. Cette demande des chrétiens rend compte du grand traumatisme qu'a constitué la famine du Mont-Liban en 1916 parmi la population de la montagne, quand elle a été isolée de sa périphérie nourricière.
La communauté maronite est alors majoritaire à 80% dans le Mont-Liban et sur la plaine de Beyrouth, mais dans le nouvel État du Grand Liban elle ne représentera plus que 48 % de la population. Elle sera diluée face aux communautés sunnites et grecque-orthodoxe majoritaires sur le littoral, et chiite dans la Bekaa au sud. Malgré cette dilution démographique, les maronites ont semblé détenir la conviction de jouer le rôle prépondérant dans le nouvel État, en raison de leur ascension culturelle progressive (débutée du temps de l'émirat) et le soutien de la France mandataire.
Le pays, né ainsi en 1920, est donc multiconfessionnel. Il compte officiellement dix-sept communautés différentes, chacune ayant un droit privé spécifique. Parmi les chrétiens, les maronites sont les plus nombreux. Il y a des musulmans chiites et sunnites ainsi que d'autres minorités religieuses comme les druzes (5 à 7 % de la population libanaise) et les juifs (0,5 %).
La constitution de 1926
Entre 1926 et 1943, sous le contrôle français, la Constitution du Liban est mise en place.
Elle entérine l'appartenance de chaque Libanais à une communauté religieuse, et institue le « communautarisme politique », système par lequel les communautés sont représentées « équitablement » au sein de l'État sur la base d'un recensement effectué en 1932.
L'indépendance
Reconnue en 1936, l'indépendance libanaise sous mandat français est proclamée en 1941 et devient effective en 1945, après la Seconde Guerre mondiale. L'indépendance fut pendant la Seconde Guerre mondiale reconnue par la France libre, le .[pas clair]
Après l'évacuation du pays par les troupes françaises et britanniques, un système présidentiel et parlementaire « confessionnaliste » se met en place, instaurant le partage des pouvoirs entre les diverses communautés.
C'est le « pacte national » non écrit de 1943, aux termes duquel la présidence de la République est attribuée à un maronite, celle du gouvernement à un musulman sunnite et la présidence de l'Assemblée à un chiite). Les maronites ont également reçu le contrôle de l'armée. En retour, ils devaient reconnaître le Liban comme un pays arabe.
Les forces politiques au pouvoir : le clientélisme
Les forces politiques qui dominent la scène libanaise ne sont pas des partis au sens moderne du terme, mais plutôt des rassemblements autour d'un notable, épaulé par ses hommes de main, les abadays, recrutés sur une base communautaire et locale. Les affrontements politiques tournent donc le plus souvent autour d'une rivalité de clans.
Ce système est considéré comme étant une porte ouverte à la corruption car les loyautés diverses seraient d'abord familiales et locales, ensuite régionales. Chaque décision passe par un consensus entre les dirigeants qui doivent s'assurer du soutien de leur communauté respective. Les politiques ne se limitent pas au partage du pouvoir : la gestion des entreprises publiques est confiée aux partisans et aux proches.
Les années 1950 voient fleurir quelques partis politiques, dont deux jouent un rôle fondamental à partir des années 1970. Ils représentent le fossé qui à ce moment-là de l’histoire du pays semble s'être ouvert entre les Libanais. Le Parti socialiste progressiste de Kamal Joumblatt — un notable druze — dont l'idéologie laïcisante et égalitariste habille une organisation quasi féodale dans un langage marxiste, tandis que le parti Kataëb (phalanges) devient le premier du pays en 1975, avec 80 000 adhérents. Fondé par Pierre Gemayel en 1936, sur le modèle non pas idéologique, mais organisationnel des partis fascistes européens, il mobilise les couches moyennes maronites autour d'objectifs sociaux et de la défense du Liban chrétien.
Les déséquilibres économiques
La présence de travailleurs palestiniens ou syriens permanents ou temporaires assure aux entrepreneurs un volant de main-d'œuvre à bon marché, mal protégée et remplacée régulièrement. Au total, 10 % de la population active se retrouvait au chômage en 1970, au plus fort de ce qui a parfois été présenté comme le "succès économique libanais".
Les inégalités sociales et économiques présentent un double caractère régional et confessionnel. La communauté chiite est la plus pauvre, tandis que les fortunés se trouvent chez les Grecs orthodoxes et que les classes moyennes sont chez les maronites. Dans les années 1970 le Liban traverse une crise socio-économique. En cause, l'absence d'une politique de redistribution des richesses et de protection des salariés. Les clivages communautaires sont souvent dépassés par la misère et la prolétarisation, et la mobilisation syndicale et politique s'amplifie.
Les conséquences du conflit israélo-arabe
En 1948, lors de la guerre israélo-arabe de 1948 à la suite de la naissance de l'État d'Israël, environ 140 000 Palestiniens se sont réfugiés au Liban. Une grande majorité des réfugiés est logée dans des camps de l'ONU. Cette population, musulmane à 80 %, s'installe au Liban, et est l'objet de tensions.
Ainsi, tous les Palestiniens chrétiens se voient octroyer la nationalité libanaise, alors qu'elle est refusée aux Palestiniens musulmans.
L'écho des crises du Proche-Orient
À la faveur de la prospérité et de la liberté d'expression, en contraste avec la censure des États voisins, Beyrouth abrite de nombreux intellectuels et opposants politiques arabes, et devient un foyer de réflexion et de contestation. Les maisons d'édition et les quotidiens, ainsi que les nouvelles organisations politiques, se multiplient.
Le Liban devient un lieu de dialogue privilégié, non seulement entre les Arabes et le reste du monde, mais souvent aussi pour les États arabes entre eux. Membre fondateur de l'ONU et de l'UNESCO, le pays participe aux principales institutions spécialisées.
Crise libanaise de 1958
Une démocratie en crise
À partir de la fin des années 1960, la vie politique libanaise est entachée d'affaires de corruption généralisée avec des fonctionnaires contraints de démissionner par dizaines, ainsi que par les désaccords sur les thèmes de politique extérieure et de traitement de la résistance palestinienne. La classe dirigeante est en proie à des tensions internes, l'enjeu de cette agitation étant le partage des postes de pouvoir. Les mouvements se radicalisent et la tension grimpe.
Les Libanais conservateurs chrétiens craignent pour la cohésion nationale alors que les musulmans sont solidaires de la résistance. Les milices commencent à s'armer massivement. Le clan considéré comme pro-arabe est soutenu par les Palestiniens, alors que les principaux partis libanais chrétiens se tournent vers l'Occident. Des vagues d'affrontements commencent, opposant les Kataëb (phalangistes libanais) aux Palestiniens et aux mouvement arabes
La question palestinienne
Après la guerre des Six Jours et l'occupation des territoires de Cisjordanie et de Gaza par Israël en 1967, puis la terrible répression jordanienne contre les fedayins palestiniens en — connue sous le nom de Septembre noir —, les groupes palestiniens au Liban deviennent le foyer du sentiment panarabe et révolutionnaire. Des jeunes Libanais, suivent l'enseignement paramilitaire et idéologique des camps palestiniens, tandis que l'hostilité envers les Palestiniens s'étend chez les maronites[3].
Les camps de réfugiés servent de base d’entraînement militaire et plusieurs centaines de fedayins lancent des opérations contre les villages du nord d'Israël et des attentats et prises d'otages à l'étranger. Face à ces attaques, Israël multiplie les opérations en territoire libanais : on en a compté 3 000 entre 1968 et 1974. Ces représailles alimentent le sentiment anti-israélien et pro-palestinien au Liban[4]. Israël exige du Liban qu'il assure la paix sur la frontière en contrôlant l'activité des Palestiniens sur son territoire.
Le , à Saïda puis à Beyrouth, lors de manifestations de soutien aux fedayins, des affrontements opposent les Palestiniens à la gendarmerie libanaise, faisant 14 morts et plus de 80 blessés ; l'armée tente de reprendre par la force le contrôle des camps, mais elle échoue ; le gouvernement libanais se rend compte qu'il n'est plus en mesure de désarmer les combattants palestiniens, bien armés, soutenus par plusieurs États arabes et par une partie de l'opinion libanaise[5]. Le gouvernement de Rachid Karamé se résigne à demander la médiation de l’Égypte. Les accords du Caire sont signés le , sous l'égide du président égyptien Nasser, entre Yasser Arafat, commandant de l'OLP, et le général Émile Boustani (en), commandant en chef de l'armée. L'extraterritorialité des camps des fedayins est reconnue. Cet arrangement est voté par le parlement libanais le , mais son texte est tenu secret, car il est contraire au plein exercice de la souveraineté libanaise : les députés votent la confiance au gouvernement sur un texte dont ils ignorent la teneur[6],[7]. En effet, cet accord consacre le droit des fedayins à mener, à partir du territoire libanais, des opérations militaires et des attaques dans le cadre de leur lutte nationale armée et tout en respectant, ajoute le texte, la souveraineté de l'État libanais. Cet accord permet aux Palestiniens de s'organiser militairement au Liban et d'y créer — selon leurs adversaires — un véritable État dans l'État.
À la différence des États arabes voisins, au pouvoir politique considérée comme "fort", qui n'hésitent pas à traiter le problème palestinien de manière radicale, la présence des réfugiés palestiniens au Liban et surtout les attaques de l'OLP contre Israël deviennent le point principal de désaccord entre les deux grands blocs. L'OLP va profiter de l’environnement démocratique existant au Liban, ainsi que de la nature multiconfessionnelle fragile du pays lui permettant de donner au conflit un habillage inter-libanais et rendant impossible la maîtrise de la présence palestinienne au Liban[réf. nécessaire]. En 1974, Yasser Arafat commence à orienter son action sur le plan politique ; mais il est débordé par des groupes palestiniens minoritaires comme le FPLP-Commandement général et le FDLP qui organisent des attaques contre les kibboutz israéliens ainsi que des attentats anti-israéliens à l'étranger[8].
Étapes du conflit
On peut diviser la guerre civile libanaise en deux grandes phases délimitées par l'intervention israélienne de 1982. De 1975 à 1982, une coalition à dominante maronite, le Front libanais, s'oppose à une coalition « palestino-progressiste » à dominante musulmane dont la principale force armée, l'OLP, est palestinienne. L'intervention israélienne élimine du jeu l'OLP, dont la direction est évacuée vers la Tunisie, tandis que la mort de Bachir Gemayel et d'une partie de son état-major affaiblit le camp chrétien. La seconde phase (1982-1990) est marquée par l'échec des forces d'interposition occidentales, la montée en puissance des partis chiites, Amal et Hezbollah, le retrait progressif des troupes israéliennes, et enfin par le recours à la Syrie, accepté ou refusé par les différents partis libanais.