Impact climatique du transport aérien
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L'impact climatique du transport aérien est la contribution au réchauffement climatique de l'aviation utilisée pour le transport de personnes et de marchandises. Il résulte principalement de la combustion de kérosène dans les réacteurs d'avion, qui émet du dioxyde de carbone (CO2), un gaz à effet de serre qui s'accumule dans l'atmosphère et dont les émissions représentent 2,5 % des émissions anthropiques de CO2. D'autres émissions contribuant à l'effet de serre s'ajoutent au CO2 : les oxydes d'azote (NOx), dont l'effet sur le réchauffement climatique est indirect, et les traînées de condensation et cirrus artificiels qui se forment dans certaines conditions. Leur durée de vie beaucoup plus courte que celle du CO2 rend difficile la comparaison de leurs effets respectifs. La contribution du secteur aérien mondial au forçage radiatif effectif est estimée à 3,8 % de la contribution anthropogénique totale en 2018.
La Base Carbone administrée par l'Ademe en France fournit des facteurs d'émission moyens pour différents types de trajets en avion. Par exemple, ce facteur est de 152 g CO2éq/passager-km pour un trajet long-courrier en 2018, dont 69 g de CO2 liés à la combustion du kérosène, 14 g de CO2 liés à sa production et sa distribution et 69 g d'émissions à courte durée de vie.
Jusqu'en 2019, l'impact climatique du transport aérien a augmenté régulièrement car les améliorations technologiques des avions et l'optimisation des procédures opérationnelles ont été insuffisantes pour compenser la forte croissance du trafic. En 2015, le Parlement européen prévoyait que la part des émissions de CO2 de l'aviation internationale pourrait atteindre 22 % des émissions mondiales en 2050 si le secteur continuait à faire moins d'efforts que les autres.
Le premier accord mondial visant à réduire l'impact climatique du transport aérien international a été conclu le au sein de l'OACI. Il comble ainsi l'absence de mesures concernant le transport aérien international dans l'Accord de Paris. Il adopte un « panier de mesures techniques » et institue un système dénommé CORSIA de compensation des émissions de CO2 pour la fraction des émissions qui dépasserait le niveau atteint en 2020. L'accord vise à atteindre les objectifs que s'était fixés l'organisation en 2010 : améliorer l'efficacité énergétique de 2 % par an et stabiliser les émissions de CO2 au niveau qu'elles auront atteint en 2020. Les compagnies aériennes achèteront des crédits-carbone auprès d’autres secteurs sur une base volontaire à partir de 2021, puis de manière obligatoire à partir de 2027. Des organisations non gouvernementales environnementales (ONGE) ont critiqué le manque d'ambition de cet accord.
La combustion de kérosène dans les réacteurs d'avions produit principalement du dioxyde de carbone (CO2) et de la vapeur d'eau, ainsi que des polluants gazeux comme les oxydes d'azote (NOx), ou particulaires comme des suies ou des sulfates.
- Le CO2, qui a une durée de vie très longue (100 ans), se mélange de manière homogène à la basse atmosphère et s'y accumule, contribuant à l'augmentation continue de l'effet de serre.
- La vapeur d'eau et les aérosols y contribuent également puissamment mais de manière transitoire. Selon l'altitude de vol et les conditions atmosphériques, la vapeur d'eau se condense ou non pour former des traînées de condensation (ou cirrus homogenitus selon le nouvel Atlas international des nuages de 2017[2]) qui disparaissent en quelques secondes ou minutes ou peuvent s'étaler et former des cirrus (dits homomutatus[3]) qui peuvent subsister plus longtemps. Cette eau rejoint rapidement le cycle de l'eau, sauf lorsqu'elle est émise dans la stratosphère.
- Les oxydes d'azote sont dégradés par des réactions photochimiques qui consomment du méthane (CH4) et produisent de l'ozone (O3). La destruction de méthane, un gaz à effet de serre puissant, contrebalance en partie le forçage radiatif du CO2. L'ozone est un gaz à effet de serre, mais du fait de sa durée de vie courte, il n'est en général pas comptabilisé en équivalent CO2.
Les avions à réaction ont donc un impact durable lié au CO2 et un impact transitoire sur l'équilibre radiatif de l'atmosphère, qui disparaîtrait en quelques jours si le trafic aérien cessait.
Les avions à hélice, qui utilisent de l'essence, du kérosène ou du gazole, ne forment pas de traînées de condensation mais émettent du CO2, des oxydes d'azote et des particules.
Les émissions des avions sont très inégalement réparties entre les deux hémisphères. En 2006, 93 % du kérosène était brûlé dans l’hémisphère Nord et 69 % entre 30° N et 60° N. Trois régions du monde concentraient plus de 50 % des émissions mondiales : États-Unis (26 %), Europe (15 %) et Extrême-Orient (11 %)[4]. Alors que le CO2 émis par les avions se répartit de manière homogène autour du globe terrestre du fait de sa longue durée de vie, les autres émissions se dispersent assez peu et leur impact peut être localement très différent de l'impact moyen estimé.
Émissions de dioxyde de carbone
La combustion d'un litre de kérosène (Jet A1 Europe) libère 2,53 kg de CO2, auxquels il faut ajouter 0,53 kg pour l'amont (l'extraction, le transport et le raffinage), soit un facteur d'émission total de 3,06 kg de CO2 par litre de kérosène (ou 3,83 kg de CO2 par kilogramme de kérosène, soit encore 0,313 kg par kilowatt-heure, ou 3 645 kg par tep)[5].
En 1992, selon un rapport spécial du Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat (GIEC), les émissions de CO2 des avions comptaient pour 2 % des émissions anthropiques totales et 2,4 % des émissions liées aux combustibles fossiles. Mais comme le transport aérien ne s'est développé qu'à partir des années 1950, la concentration de CO2 dans l'atmosphère qui lui est attribuable n'était en 1992 que d'un peu plus de 1 %[6].
Selon l'Air Transport Action Group (ATAG), une coalition d'organisations et d'entreprises du secteur aérien, les vols commerciaux ont été responsables de l'émission de 895 Mt de CO2 en 2018 et de 915 Mt en 2019 sur un total de plus de 43 Gt[7], soit 2 % des émissions liées aux activités humaines.
Selon une estimation indépendante de l'industrie du transport aérien basée sur les données de consommation mondiales de kérosène de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), les émissions de CO2 dues au transport aérien ont atteint 1,03 Gt en 2018, soit 2,4 % des émissions de CO2 d'origine humaine, changement d'affectation des terres inclus[1]. Si l'on exclut le changement d'affectation des terres, la part du secteur aérien s'élève à 2,8 %[8].
Selon Lee et al., le chiffre correct se situerait quelque part entre ces deux estimations : d'une part, les chiffres fournis par le secteur aérien sont sous-estimés ; d'autre part, les données de l'AIE incluraient des consommations militaires et d'autres usages du kérosène[1] (cf. Appendix A). L'AIE précise que la consommation pour usage militaire n'est plus supposée être incluse dans les statistiques qu'elle publie depuis 2006, mais qu'elle n'est pas sure que cette directive soit respectée par tous les pays, notamment pour les données rétrospectives[9].
Sur la base de l'estimation de l'industrie du transport aérien pour 2018, le think tank The Shift Project évalue les émissions totales, amont compris, à environ 1,08 Gt de CO2[10].
France
Les émissions de CO2 de l'aviation commerciale en France sont estimées par la Direction générale de l'Aviation civile (DGAC) à 23,4 Mt pour 2019, en augmentation de 24,5 % par rapport à 2000, dont 18,5 Mt pour les vols internationaux, comptés pour la moitié du trajet, et 4,8 Mt pour les vols intérieurs (y compris Outre-mer). Les émissions totales incluant l'aviation non commerciale se sont élevées à 24,3 Mt (estimation provisoire)[11].
D'après les données d'inventaire national au titre de la CCNUCC pour 2018, le trafic aérien intérieur (y compris Outre-Mer et non commercial) représentait 4 % des émissions de l'ensemble du secteur des transports et 1,6 % des émissions totales de CO2 de la France. En réintégrant les soutes internationales aériennes et maritimes dans les bilans de la France, le secteur aérien représentait 14,9 % des émissions de CO2 des transports et 6,4 % des émissions totales de CO2[11].
Gaz et aérosols à courte durée de vie
En sus du CO2 dont la durée de vie dans l'atmosphère terrestre est très longue (100 ans) et qui s'y accumule, les avions émettent de la vapeur d'eau, des gaz et des aérosols dont la durée de vie est très courte et dont l'effet sur le bilan radiatif de la Terre ne dure que tant qu'il y a des avions en l'air[12]. Néanmoins, le forçage radiatif dont sont responsables ces émissions est important et même, en 2000, deux fois supérieur à celui du CO2 accumulé depuis les débuts de l'aviation.
Le forçage radiatif (FR) exprime en W/m2 la variation du flux de rayonnement résultant au niveau de la tropopause (ou au sommet de l’atmosphère) liée à un facteur de perturbation. Le flux de rayonnement résultant est la différence entre la puissance radiative reçue et la puissance réémise. Un forçage radiatif positif tend à réchauffer le système (plus d'énergie reçue qu'émise), alors qu'un forçage radiatif négatif va dans le sens d'un refroidissement (plus d'énergie perdue que reçue). Le GIEC prend comme référence l'année 1750 et son rapport de 2014 fournit des données sur le forçage radiatif en 2011 par rapport à 1750[13].
Émissions de NOx
Les oxydes d'azote (NOx) ne sont pas des gaz à effet de serre, mais réagissent avec d'autres espèces chimiques présentes dans l'atmosphère et provoquent, à l'altitude de vol des avions subsoniques (9 à 13 km) :
- la production d'ozone, un gaz à effet de serre puissant mais à courte durée de vie, donc un réchauffement des températures de surface (à ces altitudes, les émissions de NOx produisent plus d'ozone que près du sol et cet ozone provoque un réchauffement plus important)[6]. L'ozone ainsi produit est surtout cantonné dans l'hémisphère nord où le trafic aérien est plus important. Son forçage radiatif est de 0,021 9 W/m2 (évaluation du GIEC pour 2000)[14] ;
- la destruction de méthane, gaz à effet de serre puissant d'une durée de vie de 12 ans, donc un refroidissement. En 1992, la part du trafic aérien dans la concentration atmosphérique de méthane était estimée à 2 %[15]. Son forçage radiatif est de −0,010 4 W/m2 (évaluation du GIEC pour 2000)[14].
À l'altitude des vols supersoniques, les émissions de NOx détruisent la couche d'ozone stratosphérique[16].
Effet des traînées de condensation et des cirrus induits
La vapeur d'eau émise par les réacteurs d'avions peut former des traînées de condensation persistantes lorsque l'atmosphère est sursaturée en glace et que la température est inférieure à −40 °C. Ces traînées sont constituées de cristaux de glace dont la taille est en général inférieure à celle des cristaux constituant les cirrus naturels. Leur présence tend à réchauffer la Terre. Bien qu'elles réfléchissent une partie de la lumière solaire incidente et donc tendent à la refroidir, l'effet de serre qu'elles provoquent, qui tend à la réchauffer, est prédominant[17]. Le forçage radiatif net des traînées de condensation est le plus important la nuit, car de jour, le réchauffement et le refroidissement s'annulent en partie[18].
Le forçage radiatif des traînées de condensation dépend de leur étendue globale et de leur épaisseur optique, qu'il est difficile d'évaluer avec précision. En 1992, l'étendue moyenne avait été estimée à 0,1 % de la surface terrestre, avec des proportions plus élevées dans les régions à fort trafic aérien (0,5 % en Europe centrale). Elle dépend de l'intensité du trafic aérien et de l'étendue des zones de sursaturation qui peut varier avec l'évolution du climat. Par ailleurs, l'épaisseur optique dépend de la taille et de la forme des particules de glace, qui dépendent elles-mêmes de la nature et de la quantité d'aérosols émis par le réacteur, ces aérosols agissant comme noyaux de condensation[15],[19]. Le forçage radiatif des traînées est de 0,01 W/m2 (0,005 à 0,03, confiance moyenne) (évaluation du GIEC pour 2011)[20]
Il arrive que les traînées de condensation s'étalent pour former des cirrus qui peuvent persister plusieurs heures. Il a été établi que ces cirrus artificiels entraînent également un forçage radiatif positif, dont l'estimation est très incertaine du fait qu'il est impossible de distinguer cirrus naturels et artificiels. Environ 30 % de la surface de la terre est couverte par des cirrus et des études ont montré qu'en Europe cette couverture nuageuse avait augmenté de 1 à 2 % par décennie sur les deux dernières décennies, mais sans pouvoir déterminer avec certitude quelle en était la (ou les) cause(s)[21].
Le forçage radiatif combiné des traînées de condensation et des cirrus induits est de 0,05 W/m2 (0,02 à 0,15, confiance faible) (évaluation du GIEC pour 2011)[20].
Émissions de vapeur d'eau
L'essentiel des émissions de vapeur d'eau des avions subsoniques se fait dans la troposphère, où elle est évacuée sous forme de pluie dans un délai d'une à deux semaines. Une petite fraction est toutefois émise dans la basse stratosphère, où elle peut s'accumuler. Le forçage radiatif de la vapeur d'eau stratosphérique est toutefois très faible[15] : 0,002 W/m2 (évaluation du GIEC pour 2000)[14].
Émissions d'aérosols
Les réacteurs émettent enfin des suies résultant de la combustion incomplète du kérosène ainsi que des sulfates résultant de la combustion du soufre qu'il contient en faibles quantités. Ces aérosols solides ont un effet direct sur la température de surface de la terre ; les suies tendent à la réchauffer, les sulfates à la refroidir. Les quantités émises sont toutefois faibles par rapport aux autres sources anthropiques. Le forçage radiatif direct des aérosols est de −0,001 W/m2 (sulfates : −0,003 5 W/m2, suies : 0,002 5 W/m2) (évaluation du GIEC pour 2000)[14].
Ces aérosols sont impliqués également dans la formation des traînées de condensations, des cirrus et des autres nuages, mais comme leur contribution est insuffisamment connue, elle ne fait pas l'objet d'évaluation séparée. Elle est de fait incluse dans le forçage radiatif des traînées de condensation et des cirrus induits[15],[22],[17].
Forçage radiatif total
En 2007, dans son quatrième rapport, le GIEC évaluait le forçage radiatif dû à l'aviation à 78 mW/m2 en 2005 (entre 38 et 139 mW/m2 avec une probabilité de 90 %) et représentait 4,9 % du forçage radiatif anthropique total (entre 2 et 14 % avec une probabilité de 90 %)[23]. Cela représentait trois fois plus que le seul impact du CO2 émis par les avions. Cette évaluation n'a pas été mise à jour par le GIEC dans son cinquième rapport en 2014, sauf pour les traînées de condensation et les cirrus.
En 2021, la contribution de l'aérien au forçage radiatif effectif est estimée à 3,5 % de la contribution anthropique pour 2011 par rapport à 1750 (intervalle de confiance : de 3,4 % à 4 %), en additionnant l'effet des émissions de CO2 (34 %) et les autres effets (66 %)[1]. Une mise à jour pour l'année 2018 par rapport à 1750, faite à partir des mêmes données pour le secteur aérien, l'a réévaluée à 3,8 % du forçage radiatif effectif[24]. Les mêmes auteurs indiquent que si l'on ne considère que la période récente (2014-2018), la contribution du secteur aérien au forçage radiatif effectif s'élève en moyenne à 5,3 %.
Intervalle de confiance 5-95 % | Min. | Meilleure estimation | Max. |
---|---|---|---|
Traînées de condensation et cirrus induits | 17 | 57,4 | 98 |
Dioxyde de carbone (CO2) | 28 | 34,3 | 40 |
Ozone (dû aux NOx), court-terme | 32 | 49,3 | 76 |
Ozone (dû aux NOx), long-terme | −20 | −10,6 | −7,4 |
Méthane (dû aux NOx) | −40 | −21,2 | −15 |
Vapeur d'eau stratosphérique (due aux NOx) | −6,0 | −3,2 | −2,2 |
Vapeur d'eau stratosphérique | 2,0 | 0,8 | 3,2 |
Aérosols : sulfates | −19 | −7,4 | −2,6 |
Aérosols : suies | 0,1 | 0,94 | 4,0 |
Total | 55 | 100,9 | 145 |
Pondération des émissions
Le forçage radiatif est une mesure de la variation de la puissance du rayonnement solaire reçu par la Terre du fait des activités humaines depuis le début de la révolution industrielle. Il reflète les conséquences des activités passées et présentes[25].
Pour évaluer les politiques d'atténuation du changement climatique, il est nécessaire d'intégrer dans une même mesure les effets futurs de tous les éléments qui y contribuent, aussi bien les effets à long terme du CO2 que ceux à très court terme des autres émissions liées à l'activité aérienne. Pour cela, des facteurs de pondération ont été proposés pour agréger l'ensemble des émissions. Ce sont les coefficients par lesquelles il faut multiplier les émissions de CO2 pour prendre en compte les autres émissions, élaborés sur des critères physiques (augmentation du forçage radiatif, de la température) ou économiques. Selon les critères retenus, leurs valeurs vont de 1,3 à 2,9[26].
Dans leur communication, l'industrie du transport aérien, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI, une agence de l'ONU) ainsi que les pouvoirs publics, notamment français, ne font état que du CO2, revendiquant une part de 2 % des émissions mondiales de ce gaz[7],[27],[28],[29], se référant ainsi implicitement à l'estimation du GIEC pour l'année 1992[30]. Le calculateur de la Direction générale de l'Aviation civile (DGAC) française, qui fournit les émissions de CO2 totales (production et distribution du kérosène, puis combustion lors du vol) pour un parcours donné[31], ne prend ainsi pas en compte les autres émissions contribuant à l'effet de serre.
Facteurs d'émission du transport aérien
Les émissions polluantes des moyens de transport de personnes sont généralement rapportées au passager-kilomètre, obtenues en divisant les émissions totales sur un trajet donné par le nombre moyen de passagers et la distance parcourue. Les émissions de CO2 par passager-kilomètre dépendent de plusieurs paramètres :
- le type d'avion et sa consommation ;
- son taux de remplissage et son emport de fret ;
- la distance parcourue. Sur un vol court, les phases de décollage et d'atterrissage sont proportionnellement plus gourmandes en carburant[32] ;
- l'altitude de vol.
Passagers | 20 – 50 | 51 – 100 | 101 – 220 | > 220 |
---|---|---|---|---|
0 – 500 km (turboprop.) | 200 / 366 | 141 / 258 | ||
0 – 500 km (jet) | 288 / 526 | 241 / 440 | 167 / 305 | |
500 – 1 000 km | 223 / 408 | 183 / 335 | 126 / 230 | |
1 000 – 3 500 km | 284 / 518 | 145 / 266 | 102 / 186 | 97,4 / 178 |
> 3 500 km | 115 / 210 | 82,8 / 151 |
La Base carbone, « base de données publiques de facteurs d'émissions nécessaires à la réalisation d'exercices de comptabilité carbone », administrée par l'Ademe (France)[34], fournit des facteurs d'émission selon la distance parcourue et le nombre de sièges de l'avion (voir tableau).
Elle fournit également des valeurs moyennes pour les vols court-, moyen- et long-courriers. Un trajet long-courrier induit en moyenne une émission de 152 g CO2éq/passager-km en 2018, dont 69 g de CO2 liés à la combustion du kérosène, 14 g de CO2 liés à sa production et sa distribution et 69 g d'émissions fugitives (à courte durée de vie). L'incertitude est évaluée à 10 % pour le CO2 seul, 70 % pour l'ensemble[33]. La Base carbone indique qu'elle utilise « à titre conservatoire » un facteur multiplicatif de 2, c'est-à-dire que les émissions à courte durée de vie représentent autant en équivalent CO2 que les émissions de CO2 liées à la combustion. Mais elle précise que plusieurs valeurs du facteur multiplicatif sont possibles, de « 1 virgule quelque chose » à 8, pour passer du CO2 aux émissions totales selon l'objectif des facteurs d'émission[35].
En 1999, chaque passager effectuant un vol aller-retour Paris-New York ayant une bonne efficacité énergétique (c'est-à-dire fortement rempli et sans classe affaire, effet des traînées de condensation inclus) émettait environ un quart des émissions annuelles totales d'un Français[36].
À titre de comparaison, la Base carbone indique que pour des trajets longue distance dans une voiture moyenne, le facteur d'émission moyen par passager est de 75 g CO2éq/passager-km[33],[A 1], contre 230 g CO2éq/passager-km pour un trajet de 500 à 1 000 km dans un avion de 101 à 220 places. La différence d'empreinte carbone entre un passager d'avion et un passager de voiture tient également à la distance parcourue[37]. À titre de comparaison également, le facteur d'émission d'un TGV en France est de 2 gCO2éq/passager-km[33].
Facteur d'émission selon la classe
Selon une étude de la Banque mondiale publiée en 2013, l'empreinte carbone du transport aérien dépend fortement de la classe choisie[38]. Ainsi, les passagers de première classe ou de classe affaires ont une empreinte carbone respectivement neuf fois ou trois fois plus forte que les passagers de classe économique. Cela est lié au fait qu'il y a moins de sièges par surface dans ces classes et que leur taux de remplissage est également moindre. Leurs passagers emportent plus de bagages[39]. La base officielle de facteurs d'émission du gouvernement du Royaume-Uni permet de différencier les facteurs d'émission selon la classe. Par exemple, pour un vol long-courrier, les émissions sont évaluées à 163, 472 ou 651 g CO2éq/passager-km selon qu'on voyage en classe économique, en classe affaires ou en première classe[A 2],[40].
Acheminement des passagers à l'aéroport
Il faut également tenir compte des émissions des véhicules utilisés pour se rendre à l'aéroport ou en revenir. Elles ont été estimées à 9 kgCO2 par passager pour l'aéroport de Nantes-Atlantique (en tenant compte du projet de desserte de l'aéroport par le tramway)[41].
Un bilan carbone exhaustif du transport aérien doit également inclure les activités liées, notamment la fabrication, la maintenance et l'élimination des avions, la production, le raffinage et l’acheminement du kérosène, ainsi que les infrastructures aéroportuaires.
Selon une méta-analyse parue en 2020 et portant sur des analyses du cycle de vie, l'exploitation des appareils ne représente ainsi que 77 à 91 % du potentiel de réchauffement global du secteur. Parmi la part restante, la production du carburant compte pour 8 à 12 % des émissions, en fonction du type d'appareil, tandis que la fabrication des appareils représente 1,48 à 7,5 % du total et les infrastructures, 0,397 à 5,41 %[42]. Une autre source estime en 2019 que les aéroports représenteraient 5 % de l'empreinte carbone du secteur[43].
Le groupe ADP réalise depuis 2011 un bilan annuel des émissions de gaz à effet de serre des aéroports qu'il gère en région parisienne. Elles ont été évaluées à 82 000 tCO2éq en 2015[44],[A 3].
D'autres effets notables de l'extraction, du raffinage du pétrole et du transport du carburant sont l'acidification de l'environnement et, dans une moindre mesure, le smog estival et l'eutrophisation. Le raffinage consomme en effet beaucoup d'énergie et libère quantité de soufre[42].
Trafic aérien
Le volume du trafic aérien mondial double tous les 15 ans depuis le milieu des années 1970[45], ce qui équivaut à un taux de croissance de 5 % par an[46], bien supérieur à celui du PIB mondial.
Transport de passagers
En 2019, les vols réguliers ont transporté 4,5 milliards de passagers (soit 12,3 millions de passagers par jour). Ils ont parcouru en moyenne 1 976 km. Le nombre de passagers-kilomètres payants (PKP) a atteint 8 686 milliards, en augmentation de 4,9 % par rapport à 2018, une croissance un peu moins soutenue que celle de 7 à 8 % constatée les années précédentes[47].
En 2020, le trafic passagers a chuté de 60 % sous l'effet de la pandémie de Covid-19, ramenant le nombre de voyageurs au niveau de 2003[48].
1980 | 1990 | 2000 | 2010 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Passagers (millions) | 642 | 1 025 | 1 674 | 2 708 | 3 560 | 3 798 | 4 066 | 4 331 | 4 486 | 1 800 |
Croissance annuelle (%) | 4,8 | 5,0 | 4,9 | 5,6 | 6,7 | 7,1 | 6,5 | 3,6 | −60,0 | |
Passagers-km (milliards) | 4 930 | 6 653 | 7 144 | 7 717 | 8 279 | 8 686 | ||||
Croissance annuelle (%) | 6,2 | 7,4 | 8,0 | 7,3 | 4,9 | −65,9[50] |
La forte croissance du trafic passagers jusqu'en 2019 s'explique par la hausse de la demande conjuguée à une offre plus attractive avec le développement des compagnies low-cost et la facilité de réservation offerte par Internet. La demande croît alors sous l'effet de la croissance du tourisme international (+7 % en 2017) et de l'activité économique, ainsi que de la mondialisation qui disperse géographiquement les familles (27 % des passagers prennent l'avion pour visiter famille ou amis, contre 52 % pour les loisirs et 14 % pour le travail[51],[52]). Elle est stimulée par l'absence de taxation du kérosène pour les vols internationaux[53] et nationaux dans de nombreux pays dont la France.
Malgré le fort impact de la pandémie de Covid-19 sur le transport aérien passagers, l'association du transport aérien international (IATA) prévoit un taux de croissance annuel moyen de 3,7 % sur la période 2019-2039, soit une multiplication par 2,1 en 20 ans[54]. Pour la même période, Boeing prévoit une croissance moyenne de 4,0 %[55].
Fret
1980 | 1990 | 2000 | 2010 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Tonnes-km (Milliards) | 27 | 56 | 118 | 188 | 201 | 208 | 227 | 234 | 228 | 190 |
Croissance annuelle (%) | 7,5 | 7,8 | 4,4 | 1,1 | 3,6 | 9,2 | 2,9 | −2,3 | −16,7 |
Le fret constitue une part importante du transport aérien, mais sa croissance est plus faible que celle du trafic passager. En 2019, 58 Mt ont été transportées, parcourant en moyenne environ 3 900 km, soit une quantité transportée de 228 milliards de tonnes-km, en diminution de 2,3 % sur l'année précédente[56]. En 2017, l’aviation a transporté 35 % (en valeur) des marchandises du commerce mondial[57]. Au volume de fret, il faut ajouter les envois postaux qui ont représenté 6,8 milliards de tonnes-km en 2019[47]. En 2020, le fret aérien a été beaucoup moins affecté par la pandémie de Covid-19 que le trafic passagers. Il n'a décru de 16,7 % par rapport à 2019 en tonnes-km.
Contribution du trafic aérien au réchauffement climatique
1990 | 2000 | 2010 | 2015 | 2016 | 2017 | |
---|---|---|---|---|---|---|
Consommation mondiale de kérosène aviation (Mt)[58] | 160 | 212 | 237 | 276 | 289 | 307 |
Émissions mondiales de CO2 des avions[A 5],[5] (Mt) | 506 | 670 | 749 | 872 | 913 | 970 |
Émissions mondiales de CO2 responsabilité aviation[A 6],[5] (Mt) | 613 | 812 | 908 | 1 057 | 1 107 | 1 176 |
Les émissions de CO2 et les autres facteurs qui contribuent à l'effet de serre n'ont pas cessé d'augmenter et continuent d'augmenter car les améliorations technologiques des avions et l'optimisation des procédures opérationnelles sont insuffisantes pour compenser la forte croissance du trafic.
Alors que l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI, une agence de l'ONU) vise une amélioration de 2 % par an entre 2013 et 2050 de l'efficacité énergétique de la flotte aérienne[59], l'industrie du transport aérien ne s'est engagée qu'à une amélioration de 1,5 % par an entre 2009 et 2020[28],[60]. L'Agence internationale de l'énergie indique que l'efficacité énergétique s'est améliorée au rythme de 2,4 % par an entre 2000 et 2010, mais que ce taux s'est réduit à 1,9 % par an entre 2010 et 2019[61].
En 2015, le Parlement européen estime que la part des émissions de CO2 de l'aviation internationale dans les émissions mondiales de CO2 pourrait atteindre 22 % en 2050 si l'ambition du secteur aérien continuait à être inférieure aux efforts déployés dans d'autres secteurs[62].
Impact climatique des avions supersoniques
Deux avions de ligne supersoniques (en) sont en cours de développement aux États-Unis, en 2021 : l'Overture de la société Boom Technology et le Spike S-512 (en). L'International Council on Clean Transportation (ICCT) estime que ce type d'avion consommerait en moyenne de cinq à sept fois plus de carburant par passager qu'un avion subsonique. Dans le meilleur des cas, la consommation par passager serait trois fois plus élevée que celle d'un passager en classe affaires d'un avion subsonique récent. Comparée à celle d'un passager en classe économique, elle pourrait être jusqu'à neuf fois plus forte[63]. Toujours selon l'ICCT, une flotte de 2 000 avions supersoniques en 2035 pourrait effectuer 5 000 vols par jour, émettant environ 96 millions de tonnes de CO2 par an[64], soit 10 % des émissions de 2017[A 7].