Jacques Lafleur
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Jacques Lafleur, né le à Nouméa (Nouvelle-Calédonie) et mort le à Gold Coast (Australie)[1] est un homme politique français.
Jacques Lafleur | |
Jacques Lafleur en 1988. | |
Fonctions | |
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Président de l'Assemblée de la province Sud | |
– (14 ans, 10 mois et 23 jours) |
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Prédécesseur | Aucun (poste créé) |
Successeur | Philippe Gomès |
Président du RPC, du RPCR puis du Rassemblement-UMP | |
– (28 ans, 2 mois et 15 jours) |
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Prédécesseur | Aucun (parti créé) |
Successeur | Pierre Frogier |
Président de la Région Sud | |
– (1 an, 1 mois et 13 jours) |
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Prédécesseur | Aucun (poste créé) |
Successeur | Aucun (poste disparu) |
Député français | |
– (18 ans, 11 mois et 27 jours) |
|
Élection | 5 juin 1988 |
Réélection | 21 mars 1993 25 mai 1997 16 juin 2002 |
Circonscription | 1re de Nouvelle-Calédonie |
Législature | IXe, Xe, XIe et XIIe (Cinquième République) |
Groupe politique | RPR (1988-2002) UMP (2002-2007) |
Prédécesseur | Proportionnelle |
Successeur | Gaël Yanno |
– (2 ans, 1 mois et 12 jours) |
|
Élection | 16 mars 1986 |
Circonscription | Nouvelle-Calédonie |
Législature | VIIIe (Cinquième République) |
Groupe politique | RPR |
– (7 ans, 11 mois et 30 jours) |
|
Élection | 12 mars 1978 |
Réélection | 14 juin 1981 5 septembre 1982 |
Circonscription | 2e de Nouvelle-Calédonie |
Législature | VIe et VIIe (Cinquième République) |
Groupe politique | RPR |
Prédécesseur | Circonscription créée |
Successeur | Proportionnelle |
Membre du conseil de gouvernement de Nouvelle-Calédonie | |
– (4 ans, 11 mois et 25 jours) |
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Biographie | |
Date de naissance | |
Lieu de naissance | Nouméa (France) |
Date de décès | (à 78 ans) |
Lieu de décès | Gold Coast (Australie) |
Nationalité | française |
Parti politique | EDS (1972-1977) RPC (1977-1978) RPCR (1978-2004) R-UMP (2004-2006) RPC (2006-2010) |
Enfants | Deux, dont Isabelle Lafleur |
Diplômé de | Faculté de droit de Paris |
Profession | Chef d'entreprise |
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Député entre 1978 et 2007, président de la Province Sud de Nouvelle-Calédonie de 1989 à 2004 et chef du camp anti-indépendantiste de 1977 à 2004, il a dominé la vie politique néo-calédonienne pendant plus de 25 ans. Il est l'un des principaux négociateurs et signataires des accords de Matignon (avec Jean-Marie Tjibaou et Michel Rocard) en 1988 et de Nouméa (avec Rock Wamytan et Paul Néaoutyine) en 1998.
Issu d'une grande famille néo-calédonienne, il est le deuxième fils de l'industriel et propriétaire de mine Henri Lafleur, qui fut le premier sénateur de l'archipel de 1947 à 1955 et de 1959 à 1974 sous les couleurs des Républicains indépendants ainsi que l'une des figures locales de l'opposition à la domination de l'Union calédonienne (UC) de Maurice Lenormand, et de Claudine Spahr. Il suit les cours au lycée Lapérouse de Nouméa puis poursuit ses études en Métropole où il obtient une licence en droit à la faculté de droit de Paris. Il reprend ensuite, avec ses frères, une partie des affaires de son père.
Il épouse à Paris, le , Roberte Charon (née en 1932, décédée en 2021), seconde fille de Robert Charon, commerçant originaire du Havre et installé à Tahiti où il a été président de la Ligue de la France Libre de 1942 à 1948, de la section locale de la Ligue des droits de l'Homme (LDH) de 1939 à 1949 et le consul honoraire de Norvège en Polynésie française, ainsi que délégué à l'Assemblée consultative provisoire d'Alger de 1943 à 1944. Jacques et Roberte Lafleur, qui se sont séparés dans les années 1980, ont eu deux enfants, nés à Nouméa[2] :
- Isabelle (née le ), chef d'entreprise, divorcée et mère de trois enfants (Coralie, Laurence et Charles),
- Pascal (né le ), chef d'entreprise, marié et père de deux enfants (Édouard et Clarisse).
À partir de 1985 et jusqu'à son décès en 2010, il vit maritalement avec Françoise Sagnet-Chaverot[3], qui s'engage également en politique au sein du RPCR jusqu'en 2006 puis au RPC dont elle est la trésorière depuis lors. Elle fut élue au Congrès, et successivement au conseil de la Région Sud puis à l'assemblée de la Province Sud, de 1985 à 2009.
Il entre en politique le en étant élu à l'Assemblée territoriale[4]. À l'époque, la vie politique calédonienne est dominée par un parti, l'Union calédonienne de l'ancien député Maurice Lenormand. Mais, depuis le début des années 1970, ce dernier est de plus en plus contesté en raison de sa mainmise autoritaire sur le parti. De nombreux petits partis se créent, parmi eux l'Entente démocratique et sociale (EDS) d'Henri Lafleur (opposant de longue date de l'UC) et de son fils Jacques. Aux élections territoriales de 1972, l'Union calédonienne ne réussit pas à obtenir la majorité absolue mais contrôle toujours le conseil de gouvernement, auquel Jacques Lafleur est élu jusqu'en 1977[5]. Au cours de ce mandat, la défection d'un des alliés politiques de l'Union calédonienne (l'Union multiraciale) entraîne une véritable instabilité politique où aucun parti n'a la majorité et ne peut donc diriger les affaires locales.
RPC
Dans le même temps, l'indépendantisme trouve de plus en plus d'écoutes. Aux municipales de , des indépendantistes font une percée spectaculaire tandis que lors de son congrès de la même année à Bourail, l'Union calédonienne prend officiellement position pour l'indépendance. Face à cela, Jacques Lafleur décide de fédérer tous les partisans du maintien de la Nouvelle-Calédonie dans la France en vue des élections territoriales du . Ainsi, le , lors d'un grand congrès à Nouméa dans une ambiance de kermesse « à l'américaine », est créé le Rassemblement pour la Calédonie (RPC) unissant les grandes tendances loyalistes et autonomistes non-indépendantistes et des représentants des grands partis de droite de métropole : des chiraquiens (Dick Ukeiwé, Jacques Lafleur) et des giscardiens (le maire de Nouméa Roger Laroque, le sénateur Lionel Cherrier).
Premières victoires électorales et RPCR
Ce nouveau parti remporte les élections territoriales avec 16 sièges sur 34, sa majorité est complétée par les deux élus du Mouvement libéral calédonien (MLC), un parti anti-indépendantiste dissident de l'UC en 1971 et dirigé par Jean Lèques. Au conseil de gouvernement, dont les compétences ont été élargies par une loi de 1976, il y a, sur 7 membres, 5 RPC et 2 UC et c'est un membre du Rassemblement, André Caillard, qui devient vice-président de ce conseil.
Mais Jacques Lafleur, lui, ne s'est pas présenté sur la liste RPC aux élections territoriales : il se réserve pour un autre scrutin, les législatives de 1978 où il brigue le siège de député dans un nouveau district électoral tout juste créé, la seconde circonscription dite « circonscription ouest », tandis que Dick Ukeiwé se présente contre Rock Pidjot dans la première. Le , dès le premier tour et face à cinq autres candidats[6], il est élu pour la première fois à l'Assemblée nationale avec 55,2 % des suffrages exprimés tandis que Dick Ukeiwé réussit à mettre en ballotage Rock Pidjot avant d'être assez sévèrement battu au second tour par 40,6 % des voix contre 59,4 % au député sortant[7]. Jacques Lafleur est par la suite réélu à sept reprises au Palais Bourbon où il siège jusqu'en 2007, dont six fois au premier tour.
À l'Assemblée nationale, Jacques Lafleur s'inscrit au groupe du Rassemblement pour la République (RPR) et transforme dès le son RPC en Rassemblement pour la Calédonie dans la République (RPCR) en l'affiliant au parti de Jacques Chirac qui est présent pour la circonstance, provoquant le départ des fidèles de Valéry Giscard d'Estaing dont le sénateur Lionel Cherrier[8]. Cela provoque une division de la droite néo-calédonienne (création d'une section locale de l'UDF et d'un parti autonomiste modéré, la Fédération pour une nouvelle société calédonienne, ou FNSC, du maire de Bourail Jean-Pierre Aïfa) et, le , lors du renouvellement du conseil de gouvernement, le RPCR n'obtient que 3 élus, à égalité avec l'Union calédonienne qui s'associe avec un élu du Parti socialiste calédonien (PSC) pour faire accéder Maurice Lenormand à la tête de l'exécutif[9]. Après une loi en 1979 augmentant le nombre d'élus à l'Assemblée territoriale et créant un conseil de gouvernement formé non plus à la proportionnelle des groupes politiques mais par la liste ayant obtenu le plus de voix de conseillers territoriaux, les élections du voient une nouvelle fois la victoire du RPCR avec 40,2 % des suffrages exprimés sur l'ensemble du Territoire (et notamment 50,1 % dans la circonscription Sud, à savoir le Grand Nouméa sans Païta et avec l'Île des Pins et Yaté)[10] et 15 sièges sur 36[11]. Jacques Lafleur est élu comme tête de liste dans le Sud, mais il démissionne trois jours plus tard pour ne pas avoir à cumuler de mandats[4].
Le RPCR obtient en 1979 le contrôle du conseil de gouvernement, sous la vice-présidence de Dick Ukeiwé, en s'alliant à la FNSC, et Jacques Lafleur est réélu député au premier tour avec 54,3 % des suffrages et face à huit adversaires en 1981[7]. Mais la gauche arrive au pouvoir au même moment sur le plan national (François Mitterrand est élu président de la République en mai et le PS, allié au MRG et au PCF, remporte les législatives de juin). Le nouveau gouvernement, à travers son secrétaire d'État à l'Outre-mer, Henri Emmanuelli, et le nouveau Haut-commissaire, par ailleurs député socialiste, Christian Nucci se rapprochent des indépendantistes et tiennent à affaiblir la droite locale (en sachant qu'en Nouvelle-Calédonie, Mitterrand n'a obtenu que 35 % des voix contre 65 % à Valéry Giscard d'Estaing). De plus, des tensions commencent à apparaître avec l'assassinat du secrétaire général de l'Union calédonienne Pierre Declercq le . C'est dans ce contexte que la FNSC, de plus en plus en désaccord avec le RPCR notamment sur les réformes foncières et fiscales, choisit de changer de camp et de s'allier au Front indépendantiste en , permettant l'arrivée à la tête du conseil de gouvernement de Jean-Marie Tjibaou[11]. Pour protester contre ce renversement de situation, les loyalistes descendent dans la rue et investissent l'Assemblée territoriale avant d'être repoussés par la police. Pour rétablir l'ordre et montrer au gouvernement de Paris qu'il a le soutien de la population calédonienne, Jacques Lafleur démissionne le de son mandat de parlementaire et se représente à sa propre succession lors de l'élection législative partielle du 5 septembre qui se transforme en véritable plébiscite en sa faveur. En effet, l'électorat de la FNSC, mécontente de la nouvelle alliance de leur parti, se reporte en masse sur le député sortant qui est réélu avec 91,4 % des voix[7].
Mais bientôt, tout s'accélère pour mener aux « Événements » : en , à Nainville-les-Roches, le nouveau ministre de l'Outre-Mer, Georges Lemoine, réunit les chefs des deux camps pour négocier un nouveau statut. Les indépendantistes croient alors obtenir que seuls les Kanak, soit environ 60 000 habitants sur les 127 000 que comptait alors la Nouvelle-Calédonie, voteraient lors du référendum d'autodétermination prévu pour 1989. Jacques Lafleur s'insurge contre cette promesse, refuse de signer la déclaration finale de la rencontre par laquelle « nous (les Calédoniens d'origine européenne) serions "acceptés" nous, Calédoniens, parce que victimes de l'histoire » et s'en prend au « statut évolutif et de transition » proposé par le gouvernement Mauroy en exprimant à la tribune de l'Assemblée nationale ses craintes que ce régime cache une indépendance déguisée : « Transition, peut-être, vers un nouveau système électoral baptisé démocratique, où la minorité devient majorité par un savant découpage géographique et la manipulation politique »[12].
D'un autre côte, Jean-Marie Tjibaou et les indépendantistes souhaitent que cette limitation du corps électoral soit acquise, et de préférence avant les prochaines échéances électorales de 1984 où le RPCR était pressenti pour obtenir une importante victoire. Le , le dirigeant nationaliste kanak réunit tous les indépendantistes derrière lui au sein du Front de libération national kanak socialiste (FLNKS) et appelle à boycotter les élections territoriales du . Les indépendantistes dressent des barrages à certains endroits pour empêcher d'aller voter tandis qu'Éloi Machoro fait scandale en brisant une urne avec un casse-tête traditionnel kanak. Ce sont là les premiers pas vers les Événements. Mais, avec une forte abstention qui n'atteint pas néanmoins les 50 % (42,5 % des inscrits ne se rendent pas aux urnes), le RPCR remporte une victoire écrasante avec 70,87 % des suffrages exprimés et 34 élus sur les 42 de l'Assemblée territoriale. Dick Ukeiwé, élu sénateur en 1983, devient président du nouveau gouvernement, et Jean Lèques est porté au perchoir de l'assemblée délibérante locale[11]. Jacques Lafleur, qui était une nouvelle fois la tête de liste du parti dans la circonscription Sud (où il a remporté la totalité des 17 sièges à pourvoir), conserve cette fois-ci son mandat de conseiller territorial.
Deux camps face à face
Lorsque la situation s'envenime entre loyalistes et indépendantistes, avec des heurts sanglants en brousse, Jacques Lafleur s'impose bientôt comme le principal rempart contre l'indépendance, utilisant, comme le sénateur Dick Ukeiwé, son mandat parlementaire pour relayer les attentes des anti-indépendantistes néo-calédoniens en Métropole. Il reçoit en ce sens le soutien actif du RPR, et plus généralement de l'ensemble de l'opposition nationale de droite, et de son chef Jacques Chirac. En visite sur le Territoire à la fin du mois de , ce dernier s'oppose au projet d'« indépendance-association » (système « profondément malhonnête et indigne » selon lui), proposé par Edgard Pisani et le gouvernement socialiste, dans un grand meeting « bleu, blanc, rouge » sur la place des Cocotiers à Nouméa, devant 7 000 personnes. Le chef de l'opposition nationale de l'époque se dit toutefois favorable à l'organisation d'un référendum d'autodétermination ouvert à tous les néo-calédoniens, quels que soient leur origine, et répond aux indépendantistes : « Vous êtes chez vous mais nous sommes aussi chez nous car nous avons tous ici notre place dans un destin commun : Mélanésiens, Caldoches venus de la vieille Europe mais aussi Wallisiens, Tahitiens ou Asiatiques. Oui, nous sommes chez nous car nous sommes en France ! »[8]. Charles Pasqua quant à lui conseille les dirigeants du RPCR sur les moyens de défendre et de diffuser auprès de la population locale leur discours, notamment en initiant le parti anti-indépendantiste à l'importance des médias[13]. C'est ainsi que le parti de Jacques Lafleur se dote de deux organes importants : la Radio Rythme Bleu (RRB, à partir d'une station existant depuis 1981 et jusque-là appelée Radio Riposte Bis) le , puis l'hebdomaire Les Nouvelles Hebdo en 1988.
Mais Jacques Lafleur appelle également, de même que Jean-Marie Tjibaou de son côté, à la paix[14] et déclare dès le début des violences espérer un retour à une coexistence pacifique entre les différentes communautés de l'archipel[15]. Mais partout, des milices sont constituées (les Comités de Lutte pour les indépendantistes, des Caldoches de Brousse, notamment autour du maire de Thio et dirigeant local du Front national Roger Galliot, et des milices loyalistes à Nouméa) et, le , Jacques Lafleur déclare que la Nouvelle-Calédonie est en état de « légitime défense » et demande bientôt au gouvernement français de faire dissoudre et interdire le FLNKS[16].
Succession des statuts
En attendant, les statuts se multiplient. Celui préparé par le Premier ministre Laurent Fabius et le ministre chargé de la Nouvelle-Calédonie Edgard Pisani en 1985 prévoit la création d'un Congrès du Territoire à la place de l'Assemblée territoriale, de quatre régions (Sud, Centre, Nord et Îles) et d'un Conseil exécutif composé du président du Congrès et des quatre présidents de régions. Jacques Lafleur s'oppose à ce projet, notamment au découpage géographique qui assure au moins deux régions (le Nord et les Îles Loyauté) et lui donne un avantage certain dans une troisième (le Centre), et donc deux à trois sièges sur cinq au Conseil exécutif (qui n'a toutefois qu'un rôle consultatif) alors que minoritaires sur le plan démographique. Lors du débat sur la loi à l'Assemblée nationale le 20 août, il déclare à la tribune : « Nos débats se trouvent entachés d'une véritable violation de la Constitution et je me demande quelle peut être la validité de nos délibérations. [...] Je savais que les gouvernements socialistes avaient pour habitude de ne pas respecter les lois qu'ils avaient eux-mêmes fait voter, concernant la Nouvelle-Calédonie, mais je n'osais pas imaginer que l'on irait, pour forcer une terre française à devenir étrangère, jusqu'à violer la Constitution elle-même »[17]
Une fois ce texte accepté, les loyalistes participent néanmoins aux élections qui sont, comme prévu, remportées par le RPCR à l'échelle du Territoire (53,48 % des suffrages exprimés, avec une participation très forte, étant donné que le FLNKS participe cette fois au scrutin, à 80,62 % des inscrits, et 26 sièges sur 46 au Congrès dont la présidence revient à Dick Ukeiwé) et dans la Région Sud (la liste menée par Jacques Lafleur y obtient 70,62 % des suffrages et 17 élus sur 21 au Conseil de Région qui est dirigé par Jean Lèques puis, après son accession à la mairie de Nouméa en , par Pierre Frogier). Mais le FLNKS dirige les trois autres régions (Jean-Marie Tjibaou dans le Nord, Léopold Jorédié dans le Centre, Yeiwéné Yeiwéné, bras droit de Tjibaou, dans les Îles Loyauté). Dans le Centre, où le scrutin était particulièrement serré (45,47 % et 5 sièges sur 9 pour le FLNKS mené par Léopold Jorédié, contre 41,86 % et les 4 autres élus pour le RPCR et président du gouvernement local sortant Dick Ukeiwé), Jacques Lafleur a des mots très durs pour la liste « OPAO » (favorable au projet d'indépendance association) du maire de Bourail et président de la FNSC Jean-Pierre Aïfa, dénonçant sur les ondes de RRB « la troisième force [...] des individus mi-hommes mi-femmes […] qui croient aux mirages ». En effet, pour lui, la FNSC est responsable de la situation tendue pour s'être alliée avec les indépendantistes en 1982 et pour avoir maintenu sa candidature dans une Région Centre qui était véritablement l'enjeu crucial de ce scrutin (la seule où aucun des deux camps ne semblait être avantagé), permettant, selon lui, la victoire de la liste FLNKS de Léopold Jorédié qui ne l'emporte que de peu. Qui plus est, la liste RPCR dépose un recours en annulation des élections dans cette région mais Dick Ukeiwé finit par se déclarer, lors de l'installation du Conseil de Région à La Foa, « prêt à travailler, mais pas dans le cadre de la préparation à l'indépendance »[17]. Jacques Lafleur démissionne de son mandat au Congrès et au Conseil de la Région Sud dès le .
Aux élections législatives du , la droite revient au pouvoir sur le plan national, et les deux députés calédoniens sont désormais RPCR : Jacques Lafleur et Maurice Nénou, leur liste obtenant 88,5 % des suffrages exprimés pour une participation de 50,4 % des inscrits seulement, le FLNKS ayant appelé à l'abstention[7].
Le nouveau ministre de l'Outre-Mer, Bernard Pons, met en place un nouveau statut visant à contrer l'indépendance et défendant le droit commun face au droit coutumier, et propose l'organisation rapide d'un référendum d'autodétermination ouvert à tous les néo-calédoniens, quelle que soit leur origine ou leur communauté d'appartenance, avec toutefois une condition de résidence de trois ans minimum. Ce référendum, boycotté par le FLNKS, se tient le et se traduit par un rejet massif de l'indépendance : 98,3 % des suffrages exprimés, et 58,1 % des inscrits (puisque « seuls » 40,9 % des électeurs se sont abstenus, un score relativement faible étant donné l'appel du front indépendantiste).
Après cette victoire pour les loyalistes, un nouveau statut Pons est mis en place le , prévoyant le maintien du Congrès, la modification du découpage des régions (Sud, Sud, Est, Îles Loyautés) afin de limiter une éventuelle « sur-représentation » indépendantiste et la modification de la composition du Conseil exécutif (un président, les quatre présidents de régions et cinq membres élus par le Congrès). Le RPCR et Jacques Lafleur, estimant que la revendication pour l'indépendance n'a plus lieu d'être après le résultat du référendum, appellent à la dissolution du FLNKS le 15 mars[16]. Le FLNKS rejette ce nouveau statut et appelle à l'abstention lors des élections aux conseils de régions et au Congrès du , si bien que Jacques Lafleur et son parti remportent une victoire écrasante dans toutes les régions (avec 64,52 % des suffrages exprimés, et 38,22 % des inscrits puisque le taux de participation n'est que de 59,23 %) : Jacques Lafleur devient président de la Région Sud (avec 13 élus sur 21, contre 5 au FN, 2 à un autre mouvement loyaliste radical, le Front calédonien, et 1 à la liste divers droite « Entente »), Harold Martin, qui depuis toujours organise les campagnes du député, est élu dans l'Ouest (où Dick Ukeiwé était tête de liste, et avec 8 sièges sur 11, les 3 restants revenant au FN), Henri Wetta à l'Est (où la candidature du parti était tirée par le député Maurice Nénou, avec 7 conseillers sur 9 face aux 2 seuls élus indépendantistes de ce scrutin, issus de liste « Unir pour Construire » du maire LKS de Poindimié Francis Poadouy, le taux de participation n'était que de 29 %) et Simon Loueckhote dans les Îles Loyauté (la liste qu'il menait à emporter la totalité des 7 sièges, mais avec une abstention s'élevant à 76,5 %), tandis que Dick Ukeiwé reste le chef d'un Conseil exécutif comprenant en plus quatre membres élus RPCR et un Front National[18]. Les présidents de Conseils de Région, et donc Jacques Lafleur, doivent, selon ce nouveau statut, abandonner leur siège au Congrès à un suivant de liste.
Crise d'Ouvéa
Mais à la même époque, pour protester contre le statut Pons, un commando du FLNKS attaque la gendarmerie d'Ouvéa, les militaires résistent : quatre d'entre eux sont tués et vingt-sept sont emmenés en otage dans les grottes de Gossanah. C'est le point culminant des « Événements ». Les preneurs d'otage donnent pour condition à la libération des gendarmes l'annulation des élections régionales, le retrait des forces de l'ordre de l'île et la nomination d'un médiateur. Le 25 avril, l'île d'Ouvéa est interdite aux journalistes tandis que le ministre Bernard Pons arrive sur le territoire avec des renforts de gendarmerie, dont des membres du GIGN. Jacques Lafleur, au même titre que les deux autres parlementaires, membres du RPCR, Maurice Nénou et Dick Ukeiwé, propose de se substituer aux otages[19]. Entre les deux tours de l'élection présidentielle, le , le Premier ministre Jacques Chirac et Bernard Pons, avec l'accord du président de la République, François Mitterrand, décident de libérer les otages en ordonnant l'assaut par le GIGN de la grotte de Gossanah : l'« opération Victor » fait 21 morts (19 preneurs d'otage et 2 militaires).
Si ces évènements agissent comme un électrochoc sur l'électorat anti-indépendantiste (qui, le jour du second tour de l'élection présidentielle le 8 mai choisit Jacques Chirac à 90 % avant de réélire Jacques Lafleur député avec 83,3 % des voix, mais avec une participation inférieure à 50 % du fait du boycott des indépendantistes et face à une percée du Front national dont le candidat, Guy George, atteint les 13,8 %[7]), ils font surtout prendre conscience à l'État (le nouveau Premier ministre, Michel Rocard, appelle à la négociation dès son entrée en fonction), à Jacques Lafleur et à Jean-Marie Tjibaou que les choses ont été trop loin. Des négociations tripartites commencent le .