Echinoidea
classe d'échinodermes (animaux marins sphériques recouverts de piquants) / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
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Échinoïdes, Échinides, Oursins
Les Oursins sont un groupe d'animaux marins, formant la classe des Echinoidea au sein de l'embranchement des échinodermes. Ils sont aussi appelés par les scientifiques Échinoïdes ou Échinides.
Ce sont des invertébrés de forme arrondie au corps recouvert de piquants, ce qui leur vaut d'être parfois désignés, par analogie, par l'expression populaire de hérissons de mer et plus rarement par l'expression vieillie de châtaignes de mer.
Comme leurs proches parents les concombres de mer et les étoiles de mer, ces organismes benthiques à l'état adulte ont une larve planctonique.
L'allure générale d'un oursin est classiquement celle d'une sphère sombre de 5 à 10 cm de diamètre, densément recouverte de piquants (plutôt que d'« épines ») durs et pointus : c'est la raison pour laquelle on les appelle parfois « châtaignes de mer », ou « hérissons de mer »[1].
La couleur de l'animal est très variable[1] : elle peut aussi bien être noire que blanche, brune, pourpre, verte, rouge ou encore multicolore. Certaines espèces venimeuses signalent ainsi leur dangerosité aux prédateurs potentiels en arborant des robes très voyantes (oursin de feu, oursin fleur, oursin rouge...). D'autres arborent plutôt des couleurs de camouflage (noir, brun, vert ou encore beige, suivant le substrat). La plupart des espèces présentent des tailles allant de 5 à 10 cm de diamètre, mais certaines espèces tropicales ou abyssales peuvent dépasser 30 cm[2]. L’Oursin rouge géant est, devant l'oursin melon, la plus grande espèce littorale connue, mesurant jusqu'à 20 cm sans les piquants, et elle peut vivre plus de 100 ans[3] ; le record semble tenu par Sperosoma giganteum avec un diamètre moyen du test autour de 32 cm[4]. Cependant, piquants compris, les plus grosses espèces sont à chercher chez les oursins-lances ou les oursins-diadèmes, l'espèce Diadema setosum pouvant avoir des piquants de plus de 30 cm de long pour un test de 10 cm de diamètre, soit un diamètre total approchant les 70 cm[5].
La plupart des espèces sont caractérisées par les piquants qui protègent la carapace (appelée « test »[6]) : ceux-ci, appelés « radioles »[6], sont articulés à leur base et servent aussi bien à la locomotion qu'à la défense. Ils sont généralement longs et fins, de section ronde ; cependant l'évolution a donné naissance à une grande variété de tailles et de formes dans les radioles, en fonction de l'écologie de l'espèce - et ce depuis les périodes les plus reculées[1]. Ainsi certaines espèces ont des radioles extrêmement longues (chez les genres Diadema ou Cidaris par exemple), d'autres très courtes (comme Sphaerechinus) voire en duvet (notamment chez les oursins fouisseurs du groupe des Irregularia), d'autres encore en forme de baguettes épaisses (Heterocentrotus, Phyllacanthus) ou même en forme d'écailles (Colobocentrotus) ou de massues (Tylocidaris[7]), voire encore plus complexes[7] (Prionocidaris, Psychocidaris[8], Goniocidaris[7], Plococidaris, Chondrocidaris...)[9]. De nombreuses espèces ont aussi deux types de radioles différentes, appelées « primaires » (les plus longues) et « secondaires » (plus parfois des « miliaires »), plus ou moins différenciées : cela est particulièrement visible chez l'oursin à doubles piquants, par exemple. Leur densité et leur répartition sur le corps peuvent également varier (les Cidaroida ont des radioles primaires très clairsemées), avec parfois des zones nues (comme chez le genre Astropyga ou la famille des Temnopleuridae). Enfin, certaines espèces sont presque dépourvues de piquants : c'est notamment le cas de certaines espèces vivant enterrées dans le sable (comme certains Gnathostomata)[10].
Comme le reste des membres du phylum des échinodermes, les oursins présentent un test calcaire et un corps à structure dite pentaradiée (symétrie radiale d'ordre 5)[11] : leur corps est ainsi structuré en deux fois cinq colonnes radiales de plaques, partant de l'apex pour s'élargir à l'ambitus (l'« équateur » de l'oursin) et rétrécir à nouveau en direction de la bouche. L'animal ne présente pas de faces « ventrale » et « dorsale » (typiques des bilatériens chordés) mais une face orale (inférieure, où se trouve la bouche) et une face aborale (supérieure, où se trouve l'anus)[6]. Il n'a donc pas non plus de tête, les systèmes digestif, circulatoire et nerveux étant tous répartis en cinq branches symétriques courant le long de la paroi interne du test. Seul l'appareil apical[6] (situé au sommet du test) ne respecte pas complètement cette symétrie : il est composé de deux fois cinq plaques disposées en étoile dont 4 portent des gonopores et l'autre la madréporite (gros organe filtreur), laissant un orifice au centre où se trouve l'anus. Chez les oursins dit « réguliers » la bouche (appelée péristome[6]) est située au centre de la face orale de l'animal, directement en contact avec le substrat, et le système apical à l'opposé, à l'« apex » de la face aborale (soit au sommet de l'animal). En revanche chez les oursins irréguliers (qui sont pour la quasi-totalité des espèces fouisseuses), la bouche et/ou l'anus peuvent avoir migré vers un côté du test pour former un « avant » opposé à un « arrière »[11], qui constitueront le sens privilégié dans la locomotion de l'animal sur (ou dans) le sable (mais le reste de l'appareil apical conserve globalement sa place)[12].
Les oursins fouisseurs dits « irréguliers » ont pour la plupart adopté une forme aplatie (d'ovoïde à discoïdale) qui leur permet d'évoluer plus facilement dans le sable : c'est notamment le cas des oursins plats de l'ordre des Clypeasteroida, en forme de pièce de monnaie, dont certains portent des perforations appelées « lunules »[1], tandis que la solidité du corps est assurée par des piliers internes. De nombreux spatangoïdes comme les Loveniidae sont pour leur part en forme de cœur[13]. Quelques genres abyssaux ont même évolué vers des formes à peine reconnaissables, comme les Pourtalesiidae, en forme de bouteille[14].
Le corps plus ou moins arrondi de l'animal est toutefois toujours divisé en 10 sections radiaires (les « radius » ou « méridiens »), aires alternativement dites « ambulacraires » et « interambulacraires »[6], qui convergent du pôle aboral vers le pôle oral. Cinq de ces sections, les zones ambulacraires, sont généralement plus étroites et portent des doubles rangées de petits tentacules à collants appelés podia ou podions[10] : ils n'atteignent pas la bouche chez les irréguliers, où les ambulacres fortement modifiés forment généralement une sorte de fleur à 5 pétales sur la face aborale. Le test est formé de plaques emboitées et plus ou moins soudées appelées « assules », composées d'un épiderme externe cilié très fin recouvrant un derme entièrement calcifié, qui constituent le « squelette » de l'animal[15].
À l'intérieur du test se trouvent différents organes : tout d'abord chez la plupart des espèces non-filtreuses la bouche complexe (appelée lanterne d'Aristote[6]) pourvue de cinq puissantes dents effilées, puis le système digestif, le système nerveux (qui se sépare en cinq canaux tapissant le test et se rejoignant autour de la bouche et de l'apex), et enfin le système aquifère, lui aussi divisé en cinq parties, qui permet de réguler la pression hydrostatique de l'animal à partir de la plaque madréporitique. L'élément le plus visible est généralement l'appareil reproducteur (les « gonades »), tapissant la moitié aborale de l'intérieur du test de cinq masses charnues généralement orange ou rouge vif (la couleur varie selon l'espèce, la saison et le sexe), couleur à laquelle il doit son nom vernaculaire de « corail »[10].
Oursin noir
(Arbacia lixula).Oursin blanc
(Tripneustes ventricosus).Oursin-diadème de Savigny
(Diadema savignyi).Oursin rouge
(Astropyga radiata).Oursin de feu
(Asthenosoma varium).Oursin fleur
(Toxopneustes pileolus).Oursin rouge géant
(Strongylocentrotus franciscanus).Oursin crayon
(Heterocentrotus mammillatus).Oursin baguette
(Phyllacanthus imperialis).Oursin-lance
(Eucidaris tribuloides).Oursin tortue
(Colobocentrotus atratus).Oursin cœur
(Spatangus purpureus).Oursin plat, ou « dollar des sables » (Mellita longifissa).
Épiderme
Tout le corps des oursins est recouvert par une fine cuticule de peau, dont la structure est celle d'un épithélium cilié. Celle-ci recouvre également les piquants, sauf chez les Cidaroida dont les radioles sont nues[16] (ce qui permet à des algues, des éponges et d'autres organismes de s'y développer comme sur un substrat minéral inerte)[17]. Cette cuticule permet de réguler les échanges avec le milieu externe (notamment la respiration et certains sens), et joue parfois un rôle actif dans le maintien du squelette (comme chez les oursins flexibles Echinothuriidae). C'est à la surface de la cuticule que se trouvent les organes mous comme les podia, les pédicellaires et les spheridia[18].
Squelette
Les radioles et le test sont composés d'une structure minérale (appelée stéréome[19]) en carbonate de calcium renforcé par une armature en cristaux de calcite. Ces deux ingrédients donnent au corps et surtout aux piquants des oursins une grande solidité, mais aussi un poids modéré et une certaine souplesse, ainsi que la capacité de se morceler une fois brisés dans un corps étranger, tout comme de se régénérer à partir de la cuticule. Au microscope, le stéréome apparaît plus ou moins spongieux selon les espèces (les vides étant comblés par du tissu conjonctif appelé « stroma »), ce qui fait varier le poids et la solidité du test[20]. D'après une étude de 2012[21], les radioles d'oursins seraient composées à 92 % de « briques » de monocristaux de calcite riche en magnésium[22],[23] (conférant solidité et dureté) et à 8 % d'un « mortier » (permettant la souplesse et la légèreté) constitué à 99,9 % de carbonate de calcium, avec 0,1 % seulement de protéines de structure, ce qui fait des oursins des animaux au squelette extrêmement minéralisé (ce qui explique au passage leur excellente fossilisation)[21]. La grande solidité conférée par cette structure mixte en fait un modèle pour des bétons ultra-résistants[24].
Le test est généralement rond, sphérique et plus ou moins aplati (parfois complètement plat), et présente deux orifices principaux[25] : le premier est le « péristome » (large ouverture de la face orale, où se trouve la bouche chez les spécimens vivants), qui présente souvent des dentelures, des encoches et des rivets qui constituent autant d'apomorphies utiles dans la classification des espèces. Chez les spécimens vivants, le péristome est recouvert d'une membrane tendre, protégée par cinq couples de plaques buccales portant chacune un podia ; chez certaines espèces le péristome laisse aussi apparaître des échancrures dites branchiales[1]. La seconde ouverture est le périprocte[6] (au centre du « système apical », parfois appelé « calice »), situé chez les oursins réguliers au sommet du test (à l'opposé de la bouche), généralement plus petite et entouré de 10 plaques (5 génitales et 5 terminales ou oculaires[6]) dont l'agencement est lui aussi un critère de classification des espèces fossiles[25] : ces plaques primordiales peuvent en effet être disposées en deux cercles de 5 plaques (dicyclique) ou en un cercle de 10 plaques (monocyclique)[1]. Les cinq plaques génitales sont chacune percée par un orifice génital, et la plus grosse d'entre elles présente un aspect spongieux : c'est la plaque madréporitique[26], seul élément ne respectant jamais la symétrie pentaradiaire (ce qui permet de définir un axe appelé « plan de Lovén »[6]). Au centre se trouve l'anus, qui peut éventuellement être surmonté d'une papille anale (chez les Diadematidae)[27]. La surface du test est composée de plaques hexagonales disposées en colonnes radiales et appelées « assules », qui sont soudées (plus ou moins solidement) les unes aux autres : c'est au niveau de ces soudures que se fait la croissance, ainsi que par génération de nouvelles plaques à partir de l'apex. La surface du test est plus ou moins perforée selon les familles : les principales perforations sont les lignes ambulacraires formées de suites de paires de pores (par où sortent les podia[28]), et les tubercules[29] qui supportent les radioles peuvent également avoir leur mamelon perforé chez certains ordres[30].
À la mort d'un oursin, les tissus mous se dégradent et libèrent les radioles et la lanterne d'Aristote, qui ne sont pas imbriqués dans le test : ceux-ci sont donc rarement retrouvés sur un cadavre ancien (qui ne laisse généralement que le test nu), et encore moins dans les fossiles, ce qui complexifie la classification des espèces disparues.
- Test d'Echinus esculentus, un oursin régulier.
- Test de Phyllacanthus imperialis, un oursin cidaroïde. Ceux-ci sont caractérisés par des tubercules primaires très élargis, supportant d'épaisses radioles.
- Détail de la paroi d'un test d'oursin (régulier). On voit une aire ambulacraire (jaune) avec ses deux rangées de paires de pores, entre deux aires interambulacraires (vertes). Les tubercules d'implantation des radioles sont ici non-perforés.
- Détail du système apical d'un oursin (cidaroïde) : Les cinq perforations sont les pores génitaux, et le trou au centre l'anus (ou périprocte). La plus grosse plaque génitale est la plaque madréporitique.
Circulation
Les oursins sont parcourus par deux systèmes circulatoires, organisés en cinq fibres ramifiées tapissant l'intérieur du test et se rejoignant aux deux pôles. Ces deux systèmes sont propulsés grâce aux cils microscopiques qui recouvrent l'épithélium[31].
Le premier est le « système aquifère », qui permet une circulation d'eau de mer à pression hydrostatique variable, entrant par la plaque madréporitique située à l'apex, et circulant d'abord par le canal aquifère en direction de l'anneau aquifère (qui entoure la bouche). À partir de celui-ci, cinq canaux radiaires ramifiés tapissent les parois du test (en suivant les aires ambulacraires) pour irriguer les podia et permettre la respiration[32] (via des ampoules podiales), jusqu'à finalement rejoindre l'apex, où l'eau sort par les pores aquifères[31],[33]. Les oursins ayant de grands besoins en oxygène (notamment ceux des grandes profondeurs ou surtout ceux vivant enfouis dans la vase[34]) ont des podia spécialisés sur la face aborale, modifiés pour optimiser la respiration : ceux-ci sont souvent élargis et aplatis, pour augmenter la surface d'échange, et proviennent, chez les oursins irréguliers, d'ambulacres modifiés en cinq « pétales »[32].
Le second système est le système hemal, qui contient le sang, et part lui aussi du pourtour du tube digestif pour rayonner le long du test avec la symétrie pentaradiaire caractéristique, avant de se ramifier pour irriguer l'intégralité de la cuticule. La cavité interne des oursins (le « cœlum ») est remplie d'un liquide circulatoire constitué principalement d'eau purifiée, qui contient des cellules immunitaires appelées cœlomocytes phagocytaires, qui font la navette avec les systèmes vasculaire et hemal. Les cœlomocytes jouent un rôle essentiel dans l'immunité et la coagulation sanguine, mais collectent aussi les déchets et les ôtent activement de l'organisme à travers le système respiratoire et les podia[1].
Système digestif
Le système digestif des oursins est relativement simple, et se compose principalement d'un long conduit composé d'un œsophage (situé dans la lanterne d'Aristote), suivi d'un estomac formant une boucle, puis d'un intestin plus ou moins complexe[35] ; un rectum précède l'anus, et chez la famille des Diadematidae ce dernier est surmonté d'une papille anale, au rôle encore peu clair[36].
Suivant le régime alimentaire, l'environnement et la stratégie biologique des différentes espèces, le système digestif occupe une place plus ou moins importante dans la cavité interne des oursins, en concurrence avec d'autres organes et notamment les gonades. Ce compromis très variable a pu être mis en évidence notamment grâce à la technologie IRM[37].
Il a été montré que les oursins hébergent une vaste flore intestinale qui facilite leur digestion, flore microbienne qui varie selon les espèces mais aussi au sein d'une même espèce selon l'habitat, et donc le régime alimentaire[38].
Système respiratoire
Le système respiratoire des oursins est rudimentaire, leur circulation étant déjà très ouverte sur l'eau de mer. Les organes respiratoires sont principalement de deux types : chez les oursins primitifs (Echinothurioida et Cidaroida) le test contient un organe appelé Organe de Stewart[39], relié à la lanterne d'Aristote et permettant des échanges entre l'oxygène de l'eau et la cavité interne. Chez les oursins plus modernes (Euechinoidea), le péristome (membrane entourant la bouche) est équipé de sortes de branchies qui permettent la respiration directement dans l'eau[39].
Dans tous les cas, les podia semblent également impliqués dans les échanges gazeux et permettent de complémenter ce système rustique ; chez certaines espèces (notamment fouisseuses) il existe même des podia particuliers dont la seule fonction est respiratoire[28].
Système nerveux
Le système nerveux des oursins est rudimentaire. Il n'y a pas de vrai cerveau central : le centre nerveux consiste en un grand anneau de nerfs encerclant la bouche (plus précisément la partie antérieure de la lanterne d'Aristote). De cet anneau nerveux, partent cinq nerfs rayonnant sous les canaux radiaux du système aquifère qui se raccordent à un réseau de plus en plus fin pour innerver les podia, les radioles et les pédicellaires[1].
Sens
Les oursins sont pourvus de capteurs mécaniques (toucher), chimiques (Chimiotactisme) et lumineux (vue)[40]. Si certaines familles d'oursins semblent pourvues de capteurs lumineux assez développés pour identifier le mouvement et les formes (comme les Diadematidae[41]), les scientifiques considèrent que la majorité des oursins peuvent également obtenir une vision rudimentaire via l'ensemble du corps grâce à des cellules photoréceptrices qui seraient disposées dans la cuticule, au niveau des radioles[42] ou encore (hypothèse la plus probable) des podia[43]. Leur sensibilité à la lumière semble particulièrement importante dans les ultraviolets[44].
Les oursins (à l'exception des Cidaridae) sont également équipés sur la surface de leur test de minuscules organes globulaires appelés « sphérides » ou spheridia[45], qui leur conféreraient le sens de l'équilibre.