Burkina Faso
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Le Burkina Faso (prononciation : /buʁ.ki.na fa.so/ ou /byʁ.ki.na fa.so/), littéralement « patrie des (personnes) intègres » ou « patrie de l'intégrité », anciennement république de Haute-Volta et couramment appelé Burkina[8], est un pays d'Afrique de l'Ouest. Sans accès à la mer, il est entouré de six pays : le Niger à l'est-nord-est, le Bénin à l'est-sud-est, le Togo au sud-est, le Ghana au sud, la Côte d'Ivoire au sud-ouest et le Mali au nord-ouest. Sa capitale Ouagadougou est située au centre du pays.
Burkina Faso
Drapeau du Burkina Faso |
Armoiries du Burkina Faso |
Devise | Unité, Progrès, Justice[1] |
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Hymne |
Ditanyè |
Fête nationale | |
· Événement commémoré |
Proclamation de la République () |
Plus grande ville | Ouagadougou |
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Superficie totale |
274 200 km2 (classé 73e) |
Superficie en eau | Négligeable |
Fuseau horaire | UTC +0 |
Entité précédente | |
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Indépendance | France |
Date |
Gentilé | Burkinabè (Burkina Faso et ONU)[2] ou Burkinabé (France)[2] |
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Population totale (2020[3]) |
20 835 401 hab. (classé 61e) |
Densité | 76 hab./km2 |
PIB nominal (2020) | 16,22 milliards de dollars[4] |
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Taux de chômage |
6,1 % de la pop. active +0,1 % |
Monnaie |
Franc CFA (UEMOA) (XOF ) |
IDH (2021) | 0,449[5] (faible ; 184e) |
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IDHI (2021) | 0,315[5] (144e) |
Coefficient de Gini (2018) | 47,3 %[6] |
Indice d'inégalité de genre (2021) | 0,621[5] (157e) |
Indice de performance environnementale (2022) | 35,5[7] (127e) |
Code ISO 3166-1 |
BFA, BF |
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Domaine Internet | .bf |
Indicatif téléphonique | +226 |
Organisations internationales | ONU (1960) UA (suspendu) OIF (suspendu) BAD (1964) OCI (1975) OMC (1995) CEN-SAD (1998) CEDEAO (suspendu)OHADAALGCAMESAESMouvement des non alignés |
En 1896, le royaume mossi de Ouagadougou devient un protectorat français, avant de devenir la colonie de Haute-Volta en 1919, puis à nouveau en 1947. Indépendant de la France depuis le , la république de Haute-Volta est renommée Burkina Faso en 1984 sous le régime de Thomas Sankara. Ce dernier est renversé par Blaise Compaoré et assassiné en 1987. Le pays ne connaît pas de régime démocratique avant le et l'accession à la présidence de Roch Marc Christian Kaboré. Cette première période démocratique s'achève en 2022, lors des coups d'État de janvier et de septembre qui aboutissent à l'instauration d'une dictature militaire sur fond de multiplication des attentats terroristes. Le pays est en effet, depuis le milieu des années 2010, victime de l'extension des actions des groupes armés djihadistes à l'ensemble du Sahel.
Sa population est estimée à 20 505 155 habitants[9]. Le Burkina Faso a une superficie de 274 200 km2[10]. Il est classé 184e sur 191, avec un indice de développement humain de 0,449 en 2021. Il est membre de nombreuses organisations comme l'Organisation des Nations unies (ONU), la Banque africaine de développement (BAD), l'Organisation de la coopération islamique (OCI) ou encore l'Organisation pour l'harmonisation en Afrique du droit des affaires (OHADA), mais il a également été suspendu de plusieurs autres organisations (OIF, UA, CEDEAO…) en raison des coups d'État de janvier 2022 et de septembre 2022 dans le pays.
Topographie
Le pays est plutôt plat, avec quelques accidents de terrain localisés. Son altitude moyenne est de 400 m et le différentiel entre les deux points extrêmes ne dépasse pas 600 m. Le point culminant du pays est le mont Tenakourou, situé à 749 m d'altitude.
Reliefs
Deux grands types de paysages existent au Burkina :
- la plus grande partie du pays est couverte par une pénéplaine. Elle forme un relief très légèrement vallonné avec par endroits quelques collines isolées, ultimes vestiges d'un massif du Précambrien. C'est un paysage assez uniforme, avec un sol le plus souvent coloré en ocre par la latérite. Il a un relief plat qui ne retient pas de grandes quantités d'eau d'où l'insuffisance hydrique dans certaines régions ;
- la partie sud-ouest du pays forme un massif gréseux. Le point culminant du pays s'y trouve : le Tenakourou (749 m). Le massif est limité par des falaises très escarpées atteignant 150 m de haut : falaise de Banfora, pics de Sindou, cavernes de Douna, etc.
Hydrographie
Quoique peu élevé et assez peu arrosé, le Burkina dispose d'un réseau hydrographique relativement dense, surtout dans sa partie méridionale. Les cours d'eau se rattachent à trois bassins principaux : les bassins de la Volta, de la Comoé et du Niger.
Le pays devait son ancien nom de Haute-Volta aux trois cours d'eau qui le traversent : le Mouhoun (anciennement Volta Noire), le Nakambé (Volta Blanche) et le Nazinon (Volta Rouge). Le Mouhoun est le seul cours d'eau permanent du pays avec la Comoé qui coule au sud-ouest.
Système hydrologique
Le système hydrographique burkinabé se compose, dans l'ensemble, des éléments suivants :
- Le bassin de la Volta, le plus important, s'étend au centre et à l'ouest du pays sur une superficie de 178 000 km2. Il est constitué par trois sous-bassins majeurs : ceux du Mouhoun, du Nakambé et du Nazinon. Les eaux de ces bassins se rejoignent au centre du Ghana, où elles forment le lac Volta.
- Le Mouhoun (Volta noire), seul cours d'eau permanent avec un bassin versant de 92 000 km2, parcourt le pays sur une distance d'environ 860 km, prend sa source sur le versant nord du massif gréseux de la falaise de Banfora, dans une région où les précipitations dépassent 1 000 mm par an. Il coule d'abord vers le nord-est puis s'infléchit brusquement vers le sud. Au confluent du Sourou, le bassin versant du Mouhoun et ses principaux affluents (Plandi, Kou, Voun Hou) fournissent un débit moyen de 25 m3/s. Ce débit est cependant très irrégulier.
- Le Nakambé (Volta blanche), prend sa source à l'est de Ouahigouya dans une région qui reçoit 500 à 600 mm d'eau par an. Il draine un bassin versant de 50 000 km2. Il draine toute la partie centrale et le nord du plateau central et ne coule que pendant la saison des pluies.
- Le Nazinon (Volta rouge), et son principal affluent la Sissili, drainent la partie sud-ouest du plateau central avec un bassin versant de 20 000 km2. Leur régime hydrologique est très voisin de celui du Nakambé.
- Le Pendjari, quant-à-lui, forme la frontière sud-est du Burkina avec le Bénin et reçoit en rive droite trois affluents (le Doudodo, le Singou et la Konpienga) dont les bassins versants totalisent 21 600 km2. Ces affluents apportent moins de 30 % du débit moyen de la Pendjari qui elle-même tarit complètement une année sur deux en avril à Porga au Bénin.
- La Comoé, draine l'extrémité sud-ouest du pays sur un bassin versant de 18 000 km2 comprenant de nombreux affluents, prend sa source dans les falaises autour de Banfora, notamment dans le village de Takalédougou-Koko. Son cours, coupé par des rapides et des chutes, communique avec des mares permanentes situées au pied de la falaise de Banfora, comme le lac de Tengréla. Les écoulements sont permanents.
- Le bassin du Niger, draine le nord-est et l'est du pays. Son bassin versant a une superficie de 72 000 km2. Les affluents burkinabés du Niger les plus septentrionaux sont en grande partie endoréiques (le Béli, le Gorouol, le Goudébo et le Dargol) et sont à l'origine de crues importantes. Par contre, les affluents soudano-sahéliens (la Faga, la Sirba, la Bonsoaga, le Diamangou et la Tapoa) ont des régimes un peu moins irréguliers et contribuent à la crise dite soudanienne du Niger qui se produit en septembre. Ces cours d'eau de faible débit ne forment souvent qu'un chapelet de mares.
Toutes les rivières du Burkina, exceptés le Mouhoun et celles du sud-ouest (bassin de la Comoé), sont temporaires : elles ne coulent que de juillet à octobre.
En dehors du réseau hydrographique, il existe des bassins fermés qui alimentent de nombreuses grandes mares ou lacs naturels, sans écoulement permanent ou temporaire, qui occupent les bas-fonds ou les espaces interdunaires : les lac de Tingrela, de Bam et de Dem, les mares d'Oursi, de Béli, de Yomboli et de Markoye. Les observations effectuées sur la mare d'Oursi et le lac de Bam laissent penser que le fond de ces lacs se colmate par des dépôts argileux.
Le manque d'eau est souvent problématique, surtout dans le nord du pays.
Climat
Le Burkina Faso possède un climat tropical de type soudano-sahélien (caractérisé par des variations pluviométriques considérables allant d'une moyenne de 350 mm au nord à plus de 1 000 mm
au sud-ouest) avec deux saisons très contrastées : la saison des pluies avec des précipitations comprises entre 300 mm et 1 200 mm et la saison sèche durant laquelle souffle l'harmattan, un vent chaud et sec, originaire du Sahara. La saison des pluies dure environ 4 mois, entre mai-juin et septembre, sa durée étant plus courte dans le nord du pays.
On peut donc distinguer trois grandes zones climatiques :
- zone sahélienne, au nord du pays : moins de 600 mm de pluviométrie par an et amplitudes thermiques élevées (15 à 45 °C) ;
- zone soudano-sahélienne, entre 11° 3' et 13° 5' de latitude Nord. C'est une zone intermédiaire pour les températures et les précipitations ;
- zone soudano-guinéenne, au sud du pays : plus de 900 mm de pluie par an et des températures moyennes relativement basses.
On distingue deux saisons, de durées inégales :
- une saison d'hivernage, très courte, de 3 à 4 mois (juin à septembre) ;
- une saison sèche, de 8 à 9 mois (octobre à juin).
La rareté et la mauvaise répartition des pluies provoquent des migrations de plus en plus fortes des populations principalement du Nord et du centre vers les villes, le sud-ouest du Burkina Faso et les pays de la côte.
La température varie de 16 à 45 °C. L'évaporation moyenne annuelle est estimée à 3 000 mm et la recharge annuelle de la nappe souterraine à 40 mm.
Environnement
La savane soudanienne occidentale couvre la grande majorité du pays, à l'exception de la pointe nord.
Dans les années 1980, alors que la conscience écologique est encore très peu développée, le président du Burkina Faso Thomas Sankara est l'un des rares dirigeants africains à considérer la protection de l’environnement comme une priorité[11].
Il s’engage dans trois combats majeurs : contre les feux de brousse « qui seront considérés comme des crimes et seront punis comme tel » ; contre la divagation du bétail « qui porte atteinte au droit des peuples car les animaux non surveillés détruisent la nature » ; et contre la coupe anarchique du bois de chauffe « dont il va falloir organiser et règlementer la profession »[11].
Dans le cadre d’un programme de développement associant une grande partie de la population, dix millions d’arbres en quinze mois ont été plantés au Burkina Faso pendant la « révolution ». Pour faire face à l’avancée du désert et aux sècheresses récurrentes, Thomas Sankara propose également la plantation de bandes boisées d’une cinquantaine de kilomètres, traversant le pays d’est en ouest. Il songe ensuite à étendre cette ceinture végétale à d’autres pays[11].
La production de céréales, proche de 1,1 million de tonnes avant 1983, va grimper à 1,6 million de tonnes en 1987. Jean Ziegler, ancien rapporteur spécial pour le droit à l’alimentation de l’ONU, souligne alors que le pays « est devenu alimentairement autosuffisant »[11].
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Ancienne colonie française, la Haute-Volta obtient l'indépendance le . Le nom actuel du pays, Burkina Faso, date du , sous la présidence du révolutionnaire Thomas Sankara. Combinaison de deux mots dans deux langues principales du pays, il signifie « la patrie des hommes intègres » — Burkina se traduisant par « intégrité, honneur » en moré et Faso se traduisant par « territoire, terre ou patrie » en dioula[12],[13]. Les habitants, du Burkina sont des Burkinabè[14], un mot tiré de la langue Fulfuldé[15].
La Constitution nationale[16] nomme les habitants du Burkina Faso les Burkinabè (mot invariable en genre et en nombre), où le suffixe bè se traduit par « habitant » (homme ou femme) en peul. Le choix de ce mélange de langues (fondé sur trois idiomes ayant le statut de langues nationales — mooré, dioula (malinké) et le peul — avec le français) dans la dénomination du pays et de ses habitants, traduit la volonté d'unification d'une société multi-ethnique (plus de soixante ethnies)[17]. Dans la francophonie, les habitants du Burkina peuvent être désignés comme Burkinabés[2].
On utilise les termes Burkina, Faso ou Burkina Faso dans les usages courants, et Burkina Faso dans les usages officiels. D'après la Constitution du Burkina Faso, « le Faso est la forme républicaine de l'État »[16]. Le terme « Faso » remplace donc le terme « république » : « république du Burkina Faso » ou « république du Burkina » ne sont pas employés à l'intérieur du pays. De même on utilise officiellement « président du Faso » au lieu de « président de la République ».
Période préhistorique
Comme pour tout l'ouest de l'Afrique, le Burkina Faso a connu un peuplement très précoce, avec notamment des chasseurs-cueilleurs dans la partie nord-ouest du pays (12 000 à 5 000 ans avant l'ère chrétienne), et dont des outils (grattoirs, burins et pointes) ont été découverts en 1973. La sédentarisation est apparue entre 3 600 et 2 600 avant l'ère chrétienne, avec des agriculteurs dont les traces des constructions laissent envisager une installation relativement pérenne. L'emploi du fer, de la céramique et de la pierre polie s'est développé entre 1 500 et 1 000 avant l'ère chrétienne, ainsi que l'apparition de préoccupations spirituelles, comme en témoignent les restes d'inhumation découverts.
Des vestiges attribués aux Dogons ont été découverts dans la région du Centre-Nord, du Nord et du Nord-Ouest. Or ceux-ci ont quitté le secteur entre le XVe et le XVIe siècle pour s'installer dans la falaise de Bandiagara. Par ailleurs, des restes de murailles sont localisés dans le Sud-Ouest du Burkina Faso (ainsi qu'en Côte d'Ivoire), mais leurs constructeurs n'ont à ce jour pas pu être identifiés avec certitude. Les ruines de Loropéni, situées près des frontières de la Côte d'Ivoire et du Ghana, sont aujourd'hui reconnues comme site du Patrimoine mondial.
Période précoloniale
Avant la colonisation, le territoire du Burkina Faso était partagé entre différents royaumes ou chefferies[18] :
- le Gourma, pays des Gourmantchés et des Bembas ;
- le Mossi, pays des Mossis ;
- le Gwiriko, pays des Bobo-Dioulaso ;
- le Bissa, pays des Bisa ;
- le Liptako, pays des Peuls, et des Bellas.
On trouve peu de témoignages sur cette époque au Burkina Faso. Toutefois, une chronologie des royaumes mossis existe.
Les Européens ont eu peu de contacts avec le Mossi, ainsi que l'on désignait ce territoire, et ils se sont produits peu avant la colonisation. Le compte rendu Du Niger au Golfe de Guinée du voyage de Louis-Gustave Binger (1856-1936) relate son séjour, en juin 1888, chez Boukary, le frère du Mogho Naaba Sanem de Ouagadougou. Lequel Boukary devait devenir le Moro Naaba Wobgho qui résista aux Français, avec des moyens bien limités devant leurs armes modernes. Binger décrit un royaume organisé suivant un système féodal[19].
Période coloniale
En 1896, le royaume mossi de Ouagadougou devient un protectorat français. En 1898, la majeure partie de la région correspondant à l'actuel Burkina Faso est conquise. En 1904, ces territoires sont intégrés à l'Afrique-Occidentale française au sein de la colonie du Haut-Sénégal et Niger.
De nombreux habitants participèrent à la Première Guerre mondiale au sein des bataillons de tirailleurs sénégalais. En 1915 et 1916 a lieu la guerre du Bani-Volta pour protester contre les recrutements forcés. Près de trente mille personnes furent tuées par les troupes de l'Afrique-Occidentale française. Le , Édouard Hesling devient le premier gouverneur de la nouvelle colonie de Haute-Volta. Celle-ci est démembrée le et le territoire est partagé entre la Côte d'Ivoire, le Mali et le Niger.
La population indigène est fortement discriminée. Par exemple, les enfants africains n'ont pas le droit d'utiliser une bicyclette ou de cueillir des fruits aux arbres, « privilèges » réservés aux enfants des colons. Contrevenir à ces règlements pouvait mener les parents en prison[20].
Le , la Haute-Volta est reconstituée dans ses limites de 1932. Le , elle devient la république de Haute-Volta, une république membre de la Communauté française, et elle accède à l'indépendance le . Le nom Burkina Faso est adopté le .
Après l'indépendance
1960-1983
Le premier président de la république de Haute-Volta est Maurice Yaméogo. Le , le lieutenant-colonel Sangoulé Lamizana le remplace au pouvoir après un soulèvement populaire[21].
Au début des années 1980, la Haute-Volta est l'un des pays les plus pauvres du monde : un taux de mortalité infantile estimé à 180 pour 1000, une espérance de vie se limitant à 40 ans, un taux d’analphabétisme allant jusqu’à 98 % et un produit intérieur brut par personne de 53 356 francs CFA (soit 72 euros)[21].
Régime de Thomas Sankara (1983-1987)
Le , un coup d'État militaire porte le colonel Saye Zerbo au pouvoir. Celui-ci est renversé en 1982 par un autre coup d'État militaire qui place le médecin commandant Jean-Baptiste Ouédraogo à la tête de l'État et le capitaine Thomas Sankara à la tête du gouvernement. Ce premier entre en conflit avec Sankara et le limoge de son poste de Premier ministre en mai 1983. Trois mois plus tard, le , Thomas Sankara effectue un nouveau putsch et instaure le Conseil national de la révolution (CNR) d'orientation marxiste. Le , le président Sankara rebaptise son pays Burkina Faso. Le décret présidentiel est confirmé le 4 août par l'Assemblée nationale[22]. Son gouvernement défend la transformation de l’administration, la redistribution des richesses, la libération de la femme, la mobilisation de la jeunesse et des paysans dans les luttes politiques, la lutte contre la corruption, etc.[21]
Thomas Sankara retire aux chefs traditionnels les pouvoirs féodaux qu'ils continuaient d'exercer. Il crée les CDR (Comités de défense de la révolution), qui sont chargés localement d'exercer le pouvoir, gérant la sécurité, la formation politique, l'assainissement des quartiers, la production et la consommation de produits locaux ou encore le contrôle budgétaire des ministères. Cette politique visait à réduire la malnutrition, la soif (avec la construction massive par les CDR de puits et retenues d'eau), la diffusion des maladies (grâce aux politiques de « vaccinations commandos », notamment des enfants, burkinabés ou non) et l'analphabétisme (grâce aux « opérations alpha », l'analphabétisme est passé pour les hommes de 95 % à 80 %, mais seulement de 99 % à 98 % pour les femmes). Des projets de développement sont également portés par les CDR, comme l'aménagement de la « Vallée de la Sourou » destiné à irriguer 41 000 hectares[20].
Les dépenses de fonctionnement diminuent pour renforcer l'investissement. Les salaires sont ponctionnés de 5 à 12 % mais les loyers sont déclarés gratuits pendant un an. En 1986, le Burkina Faso atteint son objectif de deux repas et de dix litres d'eau par jour et par personne. Soucieux d'environnement, Sankara dénonce des responsabilités humaines dans l'avancée du désert. En avril 1985, le CNR lance ainsi les « trois luttes » : fin des coupes de bois abusives et campagne de sensibilisation concernant l'utilisation du gaz, fin des feux de brousse et fin de la divagation des animaux. Le gouvernement mène des projets de barrages alors que des paysans construisent parfois eux-mêmes des retenues d'eau. Thomas Sankara critique également le manque d'aide de la France, dont les entreprises bénéficient pourtant en majorité des marchés liés aux grands travaux. Symboliquement, une journée du marché au masculin est instaurée pour sensibiliser au partage des taches ménagères. Sankara avance aussi l'idée d'un « salaire vital », prélevé à la source d'une partie du salaire de l'époux pour le reverser à l’épouse[20].
En décembre 1985, une courte guerre frontalière, la guerre de la Bande d'Agacher, oppose le Burkina Faso au Mali. Elle s'achève grâce à la médiation du Nigeria et de la Libye : la bande de territoire contestée est partagée entre les deux États, en décembre 1986, par un jugement de la Cour internationale de justice[23].
Régime de Blaise Compaoré (1987-2014)
Le capitaine Blaise Compaoré prend le pouvoir lors d'un putsch le . Au cours de ces évènements, il aurait fait assassiner son prédécesseur Thomas Sankara. La mort de ce dernier est sujette à controverses[24]. La période suivant le coup d'État est baptisée « Rectification » par Blaise Compaoré.
Une nouvelle constitution est adoptée par référendum et le , Blaise Compaoré est élu président de la République (taux d'abstention : 74 %). Il est réélu en 1998, 2005 et en 2010.
Les violences policières et les meurtres d'opposants au président Blaise Compaoré scandent les décennies 1990 et 2000 : Dabo Boukary en 1990 ; deux étudiants en 1995 ; Flavien Nébié (12 ans) en 2000. Tous étaient militants ou manifestants[25]. Le Burkina Faso connaît aussi des mouvements d'émeutes : en 1998 après l'assassinat du journaliste Norbert Zongo, en 2006 avec l'arrestation de certains étudiants à la suite d'une conférence de presse à l'université de Ouagadougou, en 2007-2008 contre le coût élevé de la vie[25]. En juin 2008, l'université de Ouagadougou connaît une grève massive, qui se solde par une reprise en main brutale de l'université par le pouvoir : suppression de toutes les prestations sociales étudiantes (bourses, restauration, résidences universitaires vidées en deux jours) après tirs à balles réelles sur les étudiants[26]. La révolte de 2011 secoue le pays en même temps que le Printemps arabe.
En 1999, à la suite de la loi ivoirienne de 1998 sur le domaine foncier rural, un conflit foncier a lieu à Tabou, en Côte d'Ivoire, entre Burkinabés et Ivoiriens. 17 000 d'entre eux fuient au Burkina Faso. En septembre 2000, de nouveau, un conflit foncier, à San-Pédro cette fois, provoque l'évacuation d'un millier de Burkinabés. Enfin, en 2001, à la suite de l'élection de Laurent Gbagbo, des émeutes se multiplient. 80 000 Burkinabés rentrent au Burkina Faso[27].
Le , Blaise Compaoré fait face à un soulèvement populaire contre son projet de modification de l'article 37 de la loi fondamentale limitant le nombre de mandats présidentiels, afin de se représenter en 2015[28]. À la suite des émeutes, Blaise Compaoré quitte le pouvoir[29].
Première transition et élection du président Kaboré
Le chef d'état-major des armées Honoré Traoré annonce le 31 octobre la création d'un « organe de transition », chargé des pouvoirs exécutif et législatif, dont l'objectif est un retour à l'ordre constitutionnel « dans un délai de douze mois »[30]. Le , l'armée publie un communiqué qui affirme son soutien à Isaac Zida comme président de transition[31]. Honoré Traoré en est un des signataires, ce qui implique son renoncement au pouvoir[32]. Le , le diplomate Michel Kafando est nommé président de transition[33]. Il nomme Isaac Zida Premier ministre.
Le , des militaires du Régiment de sécurité présidentielle (RSP) retiennent en otage le président et le Premier ministre et annoncent la dissolution du gouvernement transitoire[34]. Gilbert Diendéré, ancien chef d'état-major particulier de l'ancien président Blaise Compaoré, se proclame chef d'État, dans un climat de tensions importantes au sein du pays[35]. Le coup d'État entraîne la suspension du Burkina Faso parmi les membres de l'Union africaine[36]. Le , l'armée entre à Ouagadougou pour exiger la reddition des putschistes[37]. Le jour même, le chef des putschistes annonce que le président de la transition sera « remis en selle » après que la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest a demandé à son régiment de déposer les armes.
Le , le président de la transition, à travers une allocution à la Nation annonce la fin du coup d'État et reprend son poste. Le Burkina Faso est réintégré comme membre de l'Union africaine fin septembre[38].
Le , à la suite des élections présidentielle et législatives, Roch Marc Christian Kaboré (MPP) est élu au premier tour, président du Burkina Faso avec 53,49 % des voix devant Zéphirin Diabré (UPC), qui récolte 29,65 % des voix, les 12 autres candidats se partageant le reste[39]. Il est le deuxième président civil depuis l'accès à l'indépendance du Burkina Faso après Maurice Yaméogo.
Le nouveau président doit rapidement faire face à des attaques djihadistes, dans le nord du pays, à la frontière avec le Mali[40]. Et la politique intérieure est marquée par un marasme et une contestation montante du président élu en 2015[41],[42].
Début de la guerre du Sahel au Burkina Faso
Le pays enregistre sa première grande attaque terroriste dans la nuit du 15 au [43], signe que l'extension de la guerre du Sahel touche désormais profondément le pays. Bilan : une trentaine de morts et une centaine de blessés.
Dans la nuit du 3 au 4 février 2019, un groupe terroriste attaque la ville de Kaïn dans le département du même nom, au nord de la province du Yatenga. Le bilan est de 14 morts civils[44]. L'armée réagit rapidement, avec des actions contre les groupes terroristes dans le nord-ouest du pays, déclarant avoir alors « neutralisé » 146 terroristes[45]. À la veille du début de l'année de la présidence par le pays du G5 Sahel[46], l'attaque terroriste porte à près de 300 le nombre d'habitants assassinés par ces groupes depuis 2015[47]. Le jour inaugural du G5 Sahel, mardi 5 février, un détachement de la gendarmerie est attaqué à Oursi, cinq militaires meurent, contre selon l'armée, 21 assaillants tués lors de l'attaque[48]. L'insécurité croissante a entrainé la multiplication des milices. En 2020, le pays compterait près de 4 500 groupes de koglweogo, mobilisant entre 20 000 et 45 000 membres[49],[50].
Pour faire face au crime organisé (attaques à main armée dans les lieux de travail et habitations, vols d'animaux et autres formes de violences ciblant notamment les populations rurales et périurbaines), des groupes d'autodéfense se sont constitués au sein de certaines communautés. Dénommés « koglwéogo », ils sont indépendants de l'État, ne rendent comptes à personne et agissent hors de tout cadre légal. Ils ont localement fait reculer la délinquance, mais des exactions commises par certains de leurs membres créent une nouvelle source d'insécurité et de péril pour les droits humains, et affaiblissent encore le système judiciaire (déjà critiqué pour son inefficacité par la population et les médias). Au sein des koglwéogo qui, sous prétexte d'une réponse citoyenne à la crise sécuritaire, « s'arrogent le droit d'arrêter, de juger et de sanctionner, par des amendes, sévices corporels et humiliations, au terme de tribunaux populaires expéditifs », de graves violences (torture notamment) sont observées. « De présumés voleurs sont ligotés au pied d'un arbre, fouettés avec des branches enflammées de tamarinier, le tout en public, et ce jusqu'à ce qu'ils avouent leur crime »[51], bafouant les droits humains via une justice expéditive[52]. Selon Amnesty International[53], « les Koglwéogo ont commis des exactions, telles que des passages à tabac et des enlèvements, poussant ainsi des organisations de la société civile à reprocher à l’État de ne pas agir suffisamment pour empêcher ces violences et y remédier ; une levée de boucliers qui avait amené l'État à condamner en septembre 2016 4 Koglwéogo à 6 mois d'emprisonnement, et 26 autres à des peines allant de 10 à 12 mois de prison avec sursis[50].
Les 29 et 30 mai 2020, plusieurs attaques djihadistes ont fait une cinquantaine de morts à Kompienga[54]. Dans la nuit du 4 au 5 juin 2021, une nouvelle attaque djihadiste tue plus de 160 personnes dont « une vingtaine d'enfants » à Solhan, un village situé au nord-est du pays. C'est l'attaque la plus meurtrière enregistrée au Burkina Faso depuis le début des assauts djihadistes, en 2015. En six ans, les violences ont déjà fait plusieurs milliers de morts, plus particulièrement dans les zones proches des frontières avec le Mali et le Niger[55].
Coups d'État de 2022
Le 23 janvier 2022, un coup d'État renverse le président Kaboré. Les putschistes, rassemblés sous la bannière du « Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration » et menés par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, annoncent la dissolution du gouvernement et de l’Assemblée nationale ainsi que la « suspension » de la Constitution[56]. Le 24 janvier 2022, certains médias locaux et internationaux relaient une information selon laquelle le président de Faso serait détenu par des soldats mutins[57]. D'autres médias assurent que c'est une information erronée[58]. Le , Paul-Henri Sandaogo Damiba, le chef de la junte au pouvoir au Burkina Faso, signe un plan pour entamer une transition de trois ans vers la démocratie[59].
En , Mahamadou Issoufou, médiateur de la Cédéao pour le Burkina Faso, estime que 40 % du territoire du Burkina « sont hors du contrôle de l'État »[60].
Le 30 septembre 2022, un groupe de militaires menés par le capitaine Ibrahim Traoré, chef de l'unité des forces spéciales antijihadistes « Cobra » dans la région de Kaya (nord), annonce à la télévision nationale la mise à l'écart du chef de la junte Paul-Henri Damiba. Celui-ci est « accusé d'avoir trahi l'idéal commun de départ de libérer les territoires occupés, des zones jadis paisibles étant passées sous contrôle terroriste » depuis le premier coup d'État de janvier [61].
La situation sécuritaire au Burkina Faso s'est considérablement détériorée ces dernières années, marquée par une multiplication d'attaques meurtrières perpétrées par des groupes armés islamistes alliés à Al-Qaïda et à l’État islamique au Grand Sahara (EIGS) à l’encontre de civils. L'armée burkinabé est également mise en cause, notamment dans le massacre de près de 150 civils à Karma. Selon Amnesty International, les forces spéciales de l'armée seraient responsables de ce massacre [62]. La société civile burkinabé demande des comptes après cette tuerie[63].
Une première tentative de déstabilisation du régime se déroule en décembre 2022 et est suivie d'une deuxième tentative de putsch contre le gouvernement de transition par différents officiers, perpétrée le 26 septembre 2023[64]. Ibrahim Traoré déclare par la suite que la sécurité du pays est prioritaire contrairement à la tenue de l'élection présidentielle prévue en juillet 2024[65],[66].