Juntes de défense
organisations corporatives militaires espagnoles / De Wikipedia, l'encyclopédie encyclopedia
Ne doit pas être confondu avec Junta de Defensa Nacional.
Les Juntes de défense ou Comités de défense (en espagnol Juntas de Defensa) sont des organisations militaires de caractère prétorien apparues en 1916 en Espagne.
Il s’agit d’organisations corporatives — et non d'une sorte de syndicat comme on a pu l’affirmer ; elles défendent les intérêts de certains corps déterminés, notamment l’artillerie et les ingénieurs[1] — de militaires en poste dans la Péninsule réclamant des augmentations de salaire — la Première Guerre mondiale créant un contexte de forte inflation économique — et protestant contre les rapides promotions obtenues pour mérites de guerre de ceux affectés aux opérations en cours au Maroc[2],[1],[3]. Elles incarnent à la fois la figure extrême des « bureaucrates militaires mal payés » et la défense du « statut "moral" » de l’Armée espagnole[4].
Recevant dans un premier temps le soutien du roi Alphonse XIII, elles forment un groupe de pression militaire sur le pouvoir civil qui finit par intervenir activement dans la vie politique du pays, provoquant la chute de plusieurs gouvernements. L’action des Juntes constitue le déclencheur de la crise du régime de la Restauration en 1917[5],[6],[7],[8]. Le mouvement des Juntes, « qui fut essentiellement une grève d'officiers en faveur d'améliorations économiques, fut accepté par l'opinion publique comme un moyen légitime pour imposer la rénovation de la vie politique »[4].
L’épisode des Juntas illustre une évolution du régime, le rôle des partis dans l’initiative politique s’atténuant au profit du pouvoir royal et des garnisons militaires. Il marque un point de non-retour : jusqu’au coup d'État de Primo de Rivera en 1923, les crises de gouvernements de la monarchie constitutionnelle s’enchainent, les élections générales sont convoquées à 4 reprises, trois présidents du Conseil des ministres chutent sous la pression directe des militaires, et les espoirs d’une régénération du système de l’intérieur s'évanouissent. Le roi cède au prétorianisme, dans une tentative d’instrumentaliser les Juntes pour son bénéfice propre tout en cherchant à les modérer : pour contrer les protestations sociales, il recourt à la militarisation de l’ordre public, laissé aux mains d’une Armée devenue corporatiste[9],[4].
En janvier 1922, elles sont rebaptisées « commissions informatives » (comisiones informativas), puis dissoute en novembre de la même année, dix mois avant le coup d'État de Primo de Rivera qui débouche sur une dictature militaire et met fin au régime constitutionnel.